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Fiora et le roi de France

Fiora et le roi de France

Titel: Fiora et le roi de France
Autoren: Juliette Benzoni
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qu’il vaudrait mieux rentrer.
    – Allez
sans moi ! Je m’en vais passer quelques jours chez donna Chiara au palais
Albizzi. Dites à Démétrios qu’il ne se tourmente pas et, si vous voulez bien
revenir demain, dites aussi à Samia de préparer quelques vêtements pour moi.
    Le sourire
d’Esteban approuva l’escapade :
    – Cela
vous fera du bien de vivre un peu avec des femmes, déclara-t-il. Mais je vais
tout de même vous escorter jusqu’au palais Albizzi. Je serai plus tranquille.
    – Oh !
Regardez ! s’écria Colomba, pointant vers le ciel un doigt tremblant d’excitation.
Le soleil ! Le soleil revient !
    En
effet, les nuages venaient de s’écarter, comme déchirés par un brusque coup de
vent, et la flèche lumineuse d’un chaud rayon alluma des rutilances au fond du
ruisseau des teinturiers. Dans la Seigneurie, un immense cri de triomphe, cette
fois, salua cette apparition inattendue.
    – Ils
vont prendre cette éclaircie pour un signe du ciel et un encouragement, grogna
le Castillan. D’ici à ce qu’ils aillent en déterrer d’autres...
    Quand,
en rejoignant la demeure de Chiara, on atteignit le Borgo degli Albizzi dont le
palais Pazzi avait été l’un des plus beaux ornements, Fiora ne put se défendre
d’un mouvement de pitié. Le magnifique édifice, commencé vers le milieu du
siècle par Brunelleschi et achevé par Giuliano da Maiano, avait cruellement
souffert de la colère populaire. Les fenêtres avaient perdu leurs carreaux.
Au-dessus de la porte éventrée on avait martelé les armes de la famille et
partout subsistaient les traces de l’incendie qui avait ravagé l’intérieur.
Dans la grande cour carrée, les débris s’amoncelaient, vestiges devenus sans
intérêt d’objets naguère précieux que l’on avait brisés faute d’en connaître la
valeur. Ce n’était plus qu’une coquille vide, les veuves et leurs enfants s’étant
enfuis pour chercher refuge dans la campagne ou dans quelques foyers
charitables.
    – Ne
t’attendris pas ! dit Chiara qui avait suivi la pensée de son amie. Ces
gens ont fait détruire ton propre palais, aujourd’hui bien plus abîmé encore
que celui-ci. En outre, leurs femmes ne seront pas traquées comme tu l’as été.
A l’exception toutefois... du moins je l’espère, de l’infernale Hieronyma dont
on prétend qu’elle serait revenue.
    – Elle
est morte, dit Fiora. Poignardée dans le logis de Marino Betti par un de mes
amis alors qu’elle essayait de m’étrangler.
    – Eh
bien, en voilà une nouvelle ! s’écria Colomba à qui revenait toujours la
palme de la plus fieffée commère de Florence. Pourquoi donc n’en a-t-on pas
parlé sur les marchés ?
    – Parce
que Monseigneur Lorenzo l’a voulu ainsi, répondit Fiora. Par ses ordres,
Savaglio et quelques-uns de ses hommes ont fait écrouler la maison sur son
cadavre qui n’aura pas d’autre sépulture. Il demeurera cloué au sol par la
dague qui l’a frappé et que son possesseur a refusé de reprendre. Il paraît qu’un
écriteau a été planté sur les décombres.
    – Et
que dit-il, cet écriteau ? demanda Colomba fort intéressée.
    – « Ici
la justice de Florence a frappé. Passant, éloigne-toi ! »
    – C’est
presque trop beau pour cette abominable créature, remarqua Chiara. Puis, en
guise d’oraison funèbre, elle conclut avec satisfaction : de toute façon,
c’est une bonne chose qu’elle soit morte.
    – Plus
encore que tu ne l’imagines ! dit son amie.
     
    Se
retrouver chez les Albizzi, dans ce cadre familier où elle n’avait connu que de
bons moments, donna à Fiora l’impression délicieuse que le temps s’abolissait
et que le passé renaissait. Rien n’y avait changé, les objets n’avaient pas
bougé et l’odeur de cire vierge et de résine de pin était celle que, de tout
temps, elle y avait respirée. Les prunes confites, chef-d’œuvre de Colomba qu’on
lui offrit dès l’entrée, restaient aussi exquises. Même l’oncle de Chiara, le
vieux ser Lodovico, n’avait pas vieilli d’un cheveu. En rentrant pour le repas
du soir, il embrassa Fiora comme s’il l’avait vue la veille, la complimenta sur
sa bonne mine et disparut dans son « studiolo » avec la hâte d’un
homme dont le temps est précieux. C’était en effet un naturaliste passionné qui
considérait comme perdu le temps qu’il ne consacrait pas à la botanique, aux
minéraux et aux différentes familles de papillons. Bon et simple,
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