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Favorites et dames de coeur

Favorites et dames de coeur

Titel: Favorites et dames de coeur
Autoren: Pascal Arnoux
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propriété pour les autres. Appartenaient à la première catégorie les châtellenies normandes de Vernon et Anneville, La Roquecezière en Rouergue : celle-ci produisait un revenu annuel de 1 560 livres et les autres sans doute autant ; Agnès n’y résida jamais. Mais elle habita volontiers les domaines de la seconde catégorie, Issoudun et Bois-Trousseau (Berry), et surtout l’agréable refuge de Beauté-sur-Marne 17  ; ce logis flanqué d’une tour carrée fut le lieu préféré d’Agnès au point de provoquer une confusion sous forme de jeu de mots : « Elle fut appelée demoiselle de Beauté, tant pour cette cause que pour ce que le roi lui avait donné à vie la maison de Beauté-lez-Paris 18  ». Sa troisième fille y naquit en 1442.
    Plus inattendu fut le présent du dauphin Louis, dans un but intéressé : cherchant à se rapprocher d’Agnès, qui animait un parti dévoué au roi, il lui donna plusieurs tapisseries de grand prix. Pourtant, elles ne lui avaient pas coûté grand-chose, puisqu’il s’agissait de sa part de butin après sa campagne contre Jean d’Armagnac (1443).
    Morte à la fleur de l’âge…
    La fin d’Agnès Sorel coïncida avec la reconquête de la Normandie, méthodiquement organisée par le roi et ses capitaines. François de Surienne, « routier » au service du roi d’Angleterre, s’était emparé de Fougères le 24 mars 1449. Ce casus belli justifia la rupture de la trêve de 1444 et les Français ripostèrent par la prise de la place normande de Pont-de-l’Arche (16 mai). Tandis que le roi planifiait les opérations avec son état-major pour arracher définitivement la Normandie aux Lancastre, Agnès se retira à Loches, en compagnie de son écuyer Guillaume Gouffier.
    L’été et l’automne 1449 furent favorables à Charles VII, qui s’empara de toute la haute Normandie ainsi que d’une partie de la basse province. L’hiver n’arrêta pas ses offensives : après la prise de Rouen (novembre) et celle d’Harfleur (1 er janvier 1450), Charles VII prépara le siège d’Honfleur et s’installa à l’abbaye de Jumièges le 7. Il eut l’étonnement d’y retrouver Agnès. Inquiète d’un possible complot contre le roi, elle avait soudain quitté Loches quelques semaines plus tôt et rejoint la zone des armées. Or, elle était dans son septième mois de grossesse ; le voyage hivernal, sur des routes défoncées, peu sûres, dans un véhicule au confort tout relatif, l’avait épuisée. Quelque peu embarrassé par la présence inopportune de la favorite – image vivante du péché aux yeux des contemporains et pas seulement des ecclésiastiques – Jean de La Cauchie, abbé de Jumièges, installa le couple dans ce qu’il possédait de meilleur en ces temps de guerre : le manoir de la Vigne, gentilhommière du XIII e siècle appartenant au domaine abbatial. Rudimentaire, humide voire insalubre, le lieu n’offrait guère de commodités et manquait de l’hygiène élémentaire pour une femme sur le point d’accoucher.
    Mieux renseigné que sa favorite, Charles VII ne prit pas le complot au sérieux ; le dauphin Louis mijotait à son habitude quelque mauvais coup ! Agnès s’était affolée sur la foi d’une confidence démesurément grossie. Mais l’état de santé de la jeune femme préoccupa le roi à juste raison : accouchant d’une fille trois semaines après son arrivée, elle ne s’en remit pas. Sentant venir sa fin, elle confia ses dispositions testamentaires à ses proches, la sénéchale du Poitou, le comte de Tancarville, le fidèle Guillaume Gouffier et son confesseur, maître Denis. Elle récita toutes les prières, demanda l’absolution et mourut saintement, «  réclamant et invoquant la benoîte Vierge Marie » (9 février 1450). C’était aussi la Vierge que, dix-neuf ans plus tôt, Jeanne d’Arc avait invoquée sur le bûcher de Rouen.
    Le roi fut très affecté du décès de cette jeune femme aimante, qui avait façonné sa personnalité. Faisant don de son cœur à l’abbaye de Jumièges, il ordonna l’inhumation d’Agnès dans la collégiale Notre-Dame, à Loches 19 , sous un gisant qui reproduisait ses traits délicats. En 1468, les chanoines voulurent se débarrasser du tombeau, dont la promiscuité les « choquait », paraît-il… Bien qu’ayant toujours détesté la favorite de son père, Louis XI refusa net d’accéder à leur demande. Les chanoines se le tinrent pour dit et les choses
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