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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire
Autoren: Michel Peyramaure
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l’intention de lui faire avouer où il cachait ses réserves de vivres, ils lui ont chauffé les pieds après l’avoir battu au sang et violé sous ses yeux sa femme et ses filles. Lorsqu’ils se sont mis en devoir de faire une hécatombe de ses pommiers, il a failli céder : ces arbres, qui produisaient le meilleur cidre de la contrée, étaient sa fierté. Les brigands partis en ne laissant derrière eux que plaies et bosses, Maury avait fait le compte des arbres abattus : une dizaine. Il avait sa petite idée : tirer vengeance au plus tôt de cet acte criminel et de ces infamies. Un matin, il embrassa sa femme, ses filles, et, sans leur dire où il se rendait, il prit le large avec deux de ses fils qui travaillaient à Neufchâteau. Trois mois plus tard, il était de retour. Il mit les pieds sous la table et réclama sa soupe. Quand il fut rassasié, il raconta qu’il avait passé son temps d’absence à traquer des brigands en maraude ; il en avait tué dix, autant que de pommiers perdus. Pas un de moins, pas un de plus. Il en eût tué onze qu’il ne se le serait pas pardonné. On est honnête ou l’on ne l’est pas...
     
    Jeannette avait sept ans lorsque le père lui confia la garde d’un premier troupeau d’oies. Elle s’acquitta avec conscience et compétence de cette mission, sous l’oeil vigilant de son frère Jean. Il n’avait qu’un an de plus qu’elle, mais on pouvait lui faire confiance : c’était un garçon sérieux et rusé qui avait appris à se tirer à son avantage des situations les plus délicates.
    Jeannette conduit ses oies à travers prés vers les espaces marécageux bordant la Meuse, en vue du village : elles trouvent là une pâture abondante et grasse, un terrain vaste et libre. Les jours de pluie, Jeannette et son frère trouvent un abri sous une cape tendue sur les basses branches d’un têtard. C’est là que Jeannette a appris à confectionner des couronnes d’herbe et de fleurs, des sifflets taillés dans des branchettes de saule, des épées qu’elle passe fièrement dans sa ceinture.
    Parfois, sur la rive opposée de la rivière, elle voit passer en groupe les garnements de Maxey. Ils lancent des injures, des défis, des pierres de fronde ; Jean riposte, les provoque à traverser à gué pour qu’ils se mesurent à lui ; Jeannette ronge son frein et se tait : elle sait que le jour n’est pas loin où, armée de courage et de son épée de bois, elle franchira elle-même la Meuse pour les attaquer et leur faire rentrer leurs insultes dans la gorge.
    Une guerre endémique oppose garçons et filles des deux paroisses. Ceux de Maxey tiennent pour les Bourguignons, c’est-à-dire pour les Anglais ; ceux de Domrémy et de Greux, le village voisin, restent fidèles aux Valois, c’est-à-dire à la France. Parfois on se fixe des rendez-vous pour des batailles rangées, en rase campagne, et ce ne sont pas des batailles pour rire ; on y va de bon coeur, au gourdin et à la fronde, et les horions laissent des traces.
    Un jour, Jeannette a assisté à l’un de ces engagements, juchée dans les ramures d’un saule, non loin du château des Bourlemont situé dans une île de la Meuse, dont son père a la garde ; elle a vu Jacquemin et Pierrelot, ses frères, entourés d’une dizaine d’ardents compagnons, disperser une troupe ennemie et retourner à la maison, radieux, vêtements déchirés et visage en sang.
    De retour au logis, on ne coupe pas aux explications. Aux gémissements de la mère et de Guillemette font écho les corrections du père qui passe pour avoir la main lourde et ne pas badiner avec l’ordre. Et Jeannette de protester : ils ont été agressés ; ils ont riposté.
    – Un jour, a-t-elle dit au père, je ferai de la bouillie des gars de Maxey et de tous les Bourguignons.
    – Un jour, peut-être, a bougonné le père. En attendant ce sera le fouet, comme pour tes frères !
    Elle a confié à l’oncle, quelques mois plus tard, son intention d’aller en découdre avec cette merdaille – un mot qu’elle tenait de son père lui-même. Elle a ajouté, comme il semblait ne pas la prendre au sérieux :
    – Tu crois peut-être que je n’en suis pas capable ?
    – Oh si, je te crois, mais tu es une fille, ma Jeannette. Une jolie petite garce, mais une fille. Avant de songer à te battre contre des hommes plus forts que toi, tu ferais mieux d’essuyer la goutte de lait qui pend encore à ton nez !
    Avec un feulement de chatte en colère, elle
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