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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire
Autoren: Michel Peyramaure
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contre moi, ma fille. Les choses sont claires : vous avez agi par idéal et moi par intérêt, mais nous avions un but identique et le résultat vers lequel nous tendions est atteint. L’Angleterre est blessée. Bientôt elle devra retirer ses armées du continent et ce sera en grande partie notre oeuvre. Si vous me détestez pour vous avoir ainsi manipulée, vous n’entendrez plus parler de moi et je ne vous imposerai plus ma présence, mais dites-vous que, tandis que vous créiez une légende, je sauvais un pays et travaillais ainsi pour l’Histoire. Nous sortons toutes deux grandies de cette épreuve.
    Elle ajouta, en se levant :
    – Vous pouvez partir à présent, mais sachez que je resterai, pour le roi comme pour vous, la mère que j’ai toujours été.
     
    En retournant à l’archevêché, Jeanne trouva dans l’antichambre ses deux frères, Pierre et Jean, qui, fort discrètement, avaient suivi l’armée du Sacre. Ils étaient revêtus de tenues dignes de bourgeois et, en toutes circonstances, affichaient des airs supérieurs en se disant frères de la Pucelle, ce qui, en leur faisant des amis, leur ouvrait des portes et des bourses. Jeanne ne les voyait que de temps à autre et ne souhaitait pas les rencontrer plus souvent : ils ne lui témoignaient qu’une affection intéressée et n’avaient de guerriers que l’apparence.
    – Tu sembles l’ignorer, dit Pierre, mais notre père a tenu à être de la fête, ainsi que l’oncle Laxart.
    – Par exemple ! s’exclama Jeanne. Pourquoi ne m’en avez-vous pas informée plus tôt ?
    – Nous étions de service de garde, dit le cadet, et la nouvelle vient de nous parvenir. Si tu souhaites les rencontrer...
    – Si je souhaite... Allez les prévenir de ma visite. Où pourrai-je les trouver ?
    – À l’auberge de l’Âne rayé, dit Pierre, chez la dame Alix. C’est à deux pas d’ici. Nous t’y rejoindrons dans un moment.
    Elle partit dans la mi-journée, avoir avoir expédié quelques courriers. Dans les rues baignées de soleil, au pavé encore humide, tout était rentré dans l’ordre. Les boutiques avaient baissé leurs auvents, les mendiants avaient repris leurs complaintes et les colombes leurs roucoulades sur l’avancée des toits. Elle arriva bientôt devant une auberge de belle apparence portant comme enseigne un équidé rayé, à la façade découpée de grandes fenêtres aux carreaux verts translucides.
    Jeanne vit son père entouré de Durand Laxart et de ses fils, qui l’attendaient dans la courette ombragée par un gros poirier, assis à une table de pierre. Ils restèrent muets, face à face, l’espace d’un instant, puis Jacques se leva, s’avança vers sa fille, les bras ouverts, l’oeil humide.
    – Père, oh, père ! gémit-elle contre sa poitrine. J’aime être sûre que vous m’avez pardonné. J’ai conscience d’avoir été une fille désobéissante et de mériter une sévère punition.
    Il éclata de rire entre les larmes coulant sur ses joues mal rasées qu’il essuya d’un revers de manche.
    – Te punir, toi, ma Jeannette ! dit-il. Te punir ! Je m’en veux au contraire de n’avoir pas deviné ce qui te poussait à abandonner ton foyer. Pourtant, te dire la peine que m’a causée ton départ... La colère qui s’est emparée de moi... Et ta mère, Jeannette, ta pauvre mère... Elle n’a cessé de pleurer des jours et des nuits, disant plus de prières que je ne pourrai en réciter toute ma vie. Jusqu’à ton chien, Brutus, qui te cherchait partout et refusait sa pâtée. Et les voisins qui venaient nous consoler... Et notre vieux curé qui s’imaginait que tu étais partie rejoindre les garces qui suivent les soldats...
    Il commanda une cruche de vin, laissa à Pierre le soin d’emplir les gobelets.
    – Moi seul, ajouta Laxart, savais pourquoi tu étais partie. Jamais je n’ai douté de ta réussite.
    – Brigand ! éclata Jacques. Tu ne m’en as rien dit. Tu nous a laissés nous morfondre...
    Jeanne trempa ses lèvres dans le vin de Beaune, frais et gouleyant, y mêla de l’eau. Le père n’avait pas changé, malgré son chagrin et sa colère : la même allure un peu lourde, le même visage aux traits rudes, la même économie de gestes. Laxart non plus : elle reconnaissait son visage maigre, son allure déhanchée, ses gestes nerveux.
    – La mère, dit Jeanne, comment se porte-t-elle ?
    – Elle a été longue à te pardonner ton départ, dit l’oncle, mais aujourd’hui elle est très fière
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