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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire
Autoren: Michel Peyramaure
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partage.
    Rien n’avait manqué à ce festin qui se déroulait à l’hôtel de l’archevêché, dans l’immense salle du Tau. Tout ce que la ville comptait de maîtres queux, cuisiniers, cordons-bleus, marmitons et gâte-sauce avait été mis à contribution pour que ces agapes fussent dignes de rester dans la mémoire des Rémois. On sortit des caves et des celliers victuailles et boissons à pleines pannetées. Le seigneur-archevêque fit remplir de vin le grand cerf de bronze doré qui, disait-on, remontait aux tribus de la Gaule soumises par César ; on le fit circuler entre les tables qui débordaient sur la place, au vu de la populace ébahie, et chacun des convives s’arrosa joyeusement le gosier du jus de la treille qui jaillissait de la panse généreuse de l’animal ; on le promena à travers la foule, comme les Hébreux l’avaient fait jadis du veau d’or.
    Il y eut d’aigres discussions entre le corps de ville et les gens de la cour lorsqu’il s’agit de solder les frais du sacre, ainsi que les libéralités et les réjouissances qui l’accompagnaient. Charles imposa la paix à ces trublions. Il constatait avec plaisir qu’il était capable d’imposer sa loi ; il se le devait puisqu’il était le roi.
     
    Charles invita la Pucelle à l’assister pour la cérémonie des écrouelles, fixée au 20 juillet. Elle se déroulait à l’abbaye de Saint-Maclou, sur la grand-route de Laon. Une vingtaine de pauvres rogneux l’attendaient, assis en file sur des bancs, étalant leurs scrofules, leurs abcès, leurs plaies. Il y avait parmi eux des femmes et des enfants.
    Le roi dit à Jeanne, en descendant de cheval :
    – Tu tiendras la bassine et tu distribueras les aumônes en mon nom.
    Un médecin de Reims et un capitaine de la place assistaient le roi. Le premier tenait bien droite et immobile la tête des malades tandis que le second veillait à ce qu’ils eussent les mains jointes comme pour une prière. Charles traçait du bout du pouce sur chaque visage un signe de croix en partant du front, et prononçait la formule rituelle : « Le roi te touche, Dieu te bénisse », puis il effleurait du bout des doigts plaies et bubons.
    Lorsqu’il eut terminé, il plongea les mains dans la bassine d’eau parfumée à la lavande et les essuya à la serviette que la Pucelle portait sur son avant-bras. Le grand aumônier lui tendit un plat d’argent contenant le même nombre d’écus qu’il y avait d’écrouelleux. Elle s’apprêtait à jeter l’eau du récipient quand l’aumônier arrêta son geste : la tradition voulait que l’on abandonnât aux malades le liquide où avaient trempé les mains de l’oint du Seigneur.
    – Ils vont se partager cette eau, dit-il, et la boire...
     
    Charles gardait rancune au duc Philippe de s’être abstenu de paraître à la cérémonie du sacre, malgré l’invitation qui lui en avait été faite ; en revanche, il avait délégué quelques-uns de ses notables de la cour d’Arras, qui avaient pris soin de ne pas trop se faire remarquer, le duc souhaitant se garder à la fois de Charles et de Bedford.
    Philippe avait reçu un autre courrier, qui l’avait fait sourire : il était signé de Jeanne et rédigé dans un galimatias où alternaient suppliques et menaces. Elle lui enjoignait instamment, « au nom du Roi du ciel et de son droiturier et souverain Seigneur », de promettre qu’il ne combattrait pas contre le nouveau roi de France et éviterait ainsi d’autres bains de sang. Elle ajoutait : « S’il vous plaît de guerroyer, allez plutôt chez les Sarrasins ! » Elle terminait par ces mots : « Je vous recommande à Dieu pour qu’Il vous ait en Sa sainte garde s’il Lui plaît. Écrit au lieu-dit de Reims, le dix-septième jour de juillet. »
    Philippe ne tarda pas à faire des ouvertures en vue de la paix. Il envoya à Reims une nouvelle délégation conduite par le bailli d’Artois. Les pourparlers ne traînèrent guère : quelques jours plus tard, une trêve de quinze jours était décidée de part et d’autre.
    Quinze jours... Ce délai ridicule semblait convenir à Philippe. Les Anglais venaient de faire passer la mer à quelques milliers de volontaires consacrés à une croisade contre les hérétiques hussites dont les idées gangrenaient la Bohême et menaçaient l’Occident. Le régent vit dans ce rassemblement de forces fraîches une aubaine inespérée : comme il manquait de troupes en France, il détourna la croisade de son but
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