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Dieu et nous seuls pouvons

Dieu et nous seuls pouvons

Titel: Dieu et nous seuls pouvons
Autoren: Michel Folco
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d’absence, amaigri, la peau tannée,
les traits marqués par d’indicibles tourments. Sur ses cent cinquante hommes du
départ, douze seulement l’accompagnaient.
    Profitant de son absence, Hugues,
son frère, abbé du monastère franciscain et seigneur de Bellerocaille par
intérim, avait voulu lancer un raid contre l’abbaye de Sainte-Foy avec
l’intention de la délester de ses inestimables reliques.
    Béranger ayant enrôlé dans son ost
tous les hommes capables de se battre, Hugues s’était acoquiné à une bande de
routiers brabançons patibulaires qui le trahirent à la première occasion et
investirent la ville et le château, n’acceptant d’en partir qu’en échange d’une
rançon de dix mille gros tournois qui ne fit qu’alourdir la dette des Boutefeux
envers le banquier lombard.
    Quand le retour de Béranger vint à
sa connaissance, il entreprit l’inconfortable voyage de trois jours séparant
Rodez de Bellerocaille pour lui présenter d’abord ses respects, ensuite ses
créances.
    Béranger se borna à montrer ses
mains vides que l’usage intensif de l’épée avait rendues calleuses comme celles
d’un laboureur.
    — Je n’ai plus rien, banquier.
Il te faudra patienter.
    — Voilà qui est fâcheux,
Monseigneur. Vous n’avez donc rien rapporté de la Terre sainte ? Aucun
trésor, pas une seule relique ? s’étonna le banquier.
    Béranger soupira : sa mère et
son frère lui avaient posé la même question.
    — Non, rien.
    Il revit tous ces insolents
gardes-babouches qui harcelaient les croisés autour de la mosquée du Berceau,
du mont des Oliviers ou du Saint Sépulcre, colportant toutes sortes de
reliques. Ce rustre de Gauthier Fendard faisait fortune depuis qu’il avait
ramené le prépuce du petit Jésus et l’exposait dans une chapelle. « Si
j’avais su », regretta-t-il amèrement en songeant à cette fiole de verre
soufflé contenant trente-trois gouttes du lait de Marie qu’on lui avait
proposée pour un demi-besant seulement. Et que penser de ce gros morceau de la
Vraie Croix et du clou de bronze encore fiché dedans et taché de sang
séché ? Son authenticité était garantie par le vendeur qui lui avait
affirmé qu’à l’époque ses descendants possédaient un négoce d’huile d’olive sur
le Golgotha et qu’ainsi, une nuit, après le crucifiement…
    Béranger n’en avait pas voulu et
c’était Bohémond qui l’avait acheté, recevant en prime la pierre de David qui
avait occis Goliath. Et comment ne pas envier Baudoin de Boulogne, le frère de
Godefroi de Bouillon, à qui tout réussissait depuis qu’il s’était offert une
écaille ayant appartenu au seul poisson sur le dos duquel Jésus avait marché
par mégarde lors de sa traversée pédestre du lac de Tibériade ? Ne
venait-il pas de se faire oindre roi de Jérusalem ? Hélas !
    Son créancier finit par lui accorder
un délai d’un an au-delà duquel le fief de Bellerocaille et ses bénéfices lui
appartiendraient dans leur totalité. Béranger apposa sereinement son sceau sur
le protocole. Il était déterminé à tout faire pour rembourser le Lombard, mais
s’il n’y parvenait pas, il était non moins décidé à lui passer son épée au
travers de la panse plutôt que de le voir s’installer là.
    Il pria sur la tombe de son père
plusieurs nuits d’affilée, l’enjoignant d’intercéder personnellement auprès de
Dieu pour qu’il produise un miracle capable de le sortir de cette impasse.
Puis, au cas où sa démarche resterait sans effet, il reforma sa bande de
coureurs, de fourrageurs et de boutefeux.
    Ça allait arder à nouveau dans la
région lorsque le miracle réclamé se produisit sous la forme d’un chevreau
égaré du troupeau par l’orage. Parti à sa recherche, son berger glissa dans une
crevasse et se brisa les deux jambes en tombant au fond. Ses cris parvinrent à
alerter sa jeune sœur qui courut chercher de l’aide.
    C’est en l’extrayant de la faille
que l’un des sauveteurs, un chaudronnier, découvrit sur les parois le premier
des filons d’argent qui allaient faire la fortune de Bellerocaille et surtout
celle de son seigneur.
    On ignore le sort du chevreau.
     

Chapitre II
     
    Bellerocaille, août 1683.
     
    A la Saint-Fiacre, soit quatorze
jours après avoir commis son atrocité, Pierre Galine n’était toujours pas
rompu, faute d’exécuteur. Le baron réunit une fois de plus son conseil dans la
grande salle. La perplexité était à
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