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Complots et cabales

Complots et cabales

Titel: Complots et cabales
Autoren: Robert Merle
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proximité des gens de la cabale et ceux-ci de leur côté nous fuyant comme lépreux. C'était donc bien la première fois que je la voyais de ces yeux que voilà, à moins d'une toise de moi et m'adressant la parole d'une voix tendre et mélodieuse.
    Bien que sa taille tir‚t plutôt sur le petit, elle était si svelte qu'elle paraissait grande. Je dis svelte, mais non maigrelette, car tout le rebours, ni de front, ni de dos, elle ne faillait en rondeurs. Je ne saurais dire si elle était belle, il lui manquait se peut quelques pouces pour qu'on la désign‚t comme telle. Mais elle était à coup s˚r excessivement jolie, et toute rouée qu'elle f˚t, elle portait cet air enfantin et fragile qui attire tant les hommes, et à mon avis, bien à tort.
    L'ovale de son visage était parfait, ses traits délicatement ciselés, ses yeux du bleu le plus bleu, le front fort beau et auréolé de cheveux longs, blonds et soyeux, et enfin ses lèvres, dont elle usait beaucoup en ses petites mines séductrices, étaient charnues et bien dessinées. Même quand elle ne parlait pas, elle les laissait quelque peu entrouvertes, comme si elle attendait des baisers. Monsieur de Bautru, notre grand faiseur de bons mots à la Cour, disait d'elle : "quand je la regarde comme cela et que je vois sa petite bouche entrouverte, à peu que je ne me jette sur elle pour la pénétrer par toutes les portes qu'elle voudra. "
    Le silence entre Catherine, la chevrette et moi devenant pesant en se prolongeant, je décidai, à la parfin de le rompre.
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    - Madame, dis-je d'un air aimable, mais sans aller jusqu'au sourire, vous avez demandé à me voir, c'est donc que vous avez quelque chose à me dire.
    - En effet, mon cher duc, dit Madame de Chevreuse, bien que n'ayant pas grand commerce avec vous jusque-là pour les raisons que vous savez, je n'oublie pas cependant que vous êtes le demi-frère de mon mari, qu'il vous appelle
    mon cousin ", et qu'il ne jure que par vous. Je suis donc fondée, si du moins vous me le permettez, de vous appeler aussi " mon cousin ", et de faire appel à vous en ma détresse.
    - Ma cousine, dis-je, ce sentiment de famille de vous àmoi est un peu nouveau, mais je ne laisserais pas d'y répondre, si vous vouliez bien me dire en quoi je puis vous être de quelque service.
    - Mon cousin, reprit-elle, les yeux embrumés, mais pas au point qu'une larme p˚t couler sur sa joue qui e˚t g‚té son pimplochement, je suis dans une situation, en effet, de très grande détresse. Le roi a exilé Monsieur de Ch‚teauneuf, et je suis épouvantée à l'idée que Sa Majesté puisse demain en faire autant avec moi.
    - Ma cousine, dis-je, vous ne pouvez ignorer ce que le roi vous reproche.
    Et ne croyez-vous pas qu'il soit fondé àvous garder quelque mauvaise dent pour les méchants tours que vous lui avez joués, sans compter les petites moqueries dont vous l'avez personnellement accablé ?
    - Comment! dit la chevrette étourdiment, le roi sait aussi cela ?
    - Le roi sait tout, ma cousine. Et il connaît aussi les lettres, les intermédiaires, les courriers, les conciliabules... Croyez-moi, ma cousine, vous ne pouvez ouvrir la bouche sans qu'il sache quasiment à l'avance ce que vous allez dire.
    - Je suis donc perdue ! s'écria Madame de Chevreuse.
    - Je n'ai pas dit cela.
    - Nenni! Nenni! Je le vois! Mon destin est scellé d'ores et déjà ! On va m'arracher à la reine, à la cour, à Paris, et
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    me reléguer en province en coin perdu, pour y vivre d'ores en avant une vie de recluse !
    - ¿ ma connaissance, cela non plus n'est pas décidé.
    - Ah, mon cousin! Si j'osais vous demander une faveur grandissime, ce serait d'obtenir que le cardinal veuille bien me recevoir quelques minutes pour lui dire mon repentir et mon désir de servir désormais le roi et lui seul.
    - Madame, si c'est là votre requête, elle est à peine présentée que déjà
    elle reçoit satisfaction. J'ai prévenu le cardinal de votre visite chez moi et il va se joindre à nous dans quelques instants.
    - Dieu bon! s'écria Madame de Chevreuse, et elle faillit p‚mer, ce que toutefois elle ne fit pas jusqu'au bout, étant aussi maîtresse de ses p
    ‚moisons que de ses larmes.
    CHAPITRE XVIII
    Pour la bonne intelligence de ce que vont se dire chez moi au bec à bec les deux mortels ennemis : le cardinal et Madame de Chevreuse, il me faut, lecteur, revenir sur le conflit qui opposait depuis belle heurette le duc de Lorraine Charles IV à notre
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