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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
Autoren: Alain Decaux
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Palestine, vous devrez mettre le cap sur Haïfa et nous vous escorterons…
    La mer, assez grosse la veille, s’est calmée. Toute la journée, les Anglais diffuseront leur message. L’ Exodus 47 répond par le silence, c’est-à-dire par le mépris. L’un des passagers, Norbert, qui tient son journal, écrit : « Le capitaine se promène comme un lion en cage… Ike nourrit le secret espoir d’être le premier à forcer le blocus anglais d’une façon aussi spectaculaire…»
    On prévoit de se trouver au droit de Tel-Aviv le lendemain, vendredi 18, à partir de 8 heures. Conformément aux ordres du Mossad, on foncera à 9 heures.
     
    Dans la matinée du même 17 juillet, à Paris, Ernest Bevin et Georges Bidault ont une fois de plus conféré. On peut reconstituer la substance de leur dialogue :
    Bevin . – Nos bâtiments de guerre vont intercepter l’ Exodus , dont tous les passagers seront ramenés en France. La France, qui les a accueillis et qui les a laissés appareiller vers la Palestine, doit les prendre en charge.
    Bidault . – Le Président Warfield a quitté Sète avec des papiers réguliers. C’est hors de nos eaux territoriales qu’il a changé de nom, de pavillon et d’itinéraire. Le blocus de la Palestine est une initiative britannique. La France n’a pas à intervenir dans cette affaire  (5) .
    L’accord est impossible. Jamais, depuis la fin de la guerre, les relations n’ont été plus tendues entre Paris et Londres.
     
    À bord de l’ Exodus , Ike décide d’en appeler à l’opinion internationale. La radio du bord lance, en clair, un message : « Sommes cernés par unités de guerre britanniques à 60 milles de la Palestine. Transportons 4 554 personnes déplacées dont 1 282 femmes, 1 017 adolescents et plus de 300 enfants. »
    Comme chaque jour, le soleil s’est couché si vite que chacun s’en est montré surpris. C’est donc pendant la nuit qui commence que l’on entrera dans les eaux palestiniennes. Yossi et Ike se préparent à faire face à l’inévitable attaque britannique. On évacue vers le pont D les vieillards et les enfants : 2 000 personnes de plus dans cette cale où l’on cuit à petit feu ! Pour se protéger des gaz lacrymogènes, on dispose sur le pont supérieur des réserves d’eau boriquée qui imbiberont les mouchoirs des futurs défenseurs. Les médecins et les infirmières, l’heure venue, se regrouperont sur le pont A. Dans l’après-midi, une vingtaine de volontaires – des costauds – ont hissé sur le même pont des centaines de boîtes de jus de fruits, des bouteilles d’eau, du corned-beef, des sacs de pommes de terre destinés à servir de projectiles. On y a aussi disposé des lances à eau, des sacs de boulons, des matraques fabriquées avec des morceaux de bois arrachés aux rampes d’escalier. Et toujours ces messages des haut-parleurs anglais :
    — Rendez-vous, ne poursuivez pas, nous ne voulons pas faire la guerre à des réfugiés. Nous allons vous conduire à Chypre.
    Souvenirs d’Arlette Guez  : « On était à quelques heures de la Palestine et, ce soir-là, tout le monde s’est couché assez tranquillement en se disant que le lendemain, avec l’aide de Dieu, on serait enfin au bout du voyage. »
     
    La nuit noire. Les machines ronronnent. L’ Exodus creuse son sillage. Tout à coup, des projecteurs blancs qui s’allument, une voix qui hurle :
    —  Stop your ship ! You are in the palestinian waters !
    Vains, l’élan et l’effort de l’ Exodus pour échapper à l’étreinte britannique. Les deux destroyers les plus proches ont, eux aussi, forcé leur vitesse. Ils encadrent l’ Exodus , se rapprochent. Vont-ils prendre le bateau en sandwich ? Sur les ponts des destroyers, les passagers de l ’ Exodus distinguent maintenant parfaitement les commandos, avec leurs casques blancs, leurs masques à gaz, leurs manchettes de cuir, leurs gilets de sauvetage, leurs matraques, leurs boucliers, leurs mitraillettes, leurs colts et leurs poignards. Comme le dira Arlette Guez, « une véritable panoplie face aux jeunes de l’ Exodus en sandales et pour la plupart en short ».
    Déjà les bombes lacrymogènes pleuvent sur le pont de l’ Exodus . Et les pétards. Et les fusées traçantes. Sympathique prélude.
    Tout à coup, sur l’ Exodus , un ordre est clamé. Du pont, « l’arrosage » commence. Plusieurs centaines de passagers bombardent les assaillants avec les boîtes de conserves.
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