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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986
Autoren: Michèle Cotta
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élections. Le problème, avec Chirac, n'est pas dans un affrontement personnel, au contraire. Entre nous, cela ne se passe pas si mal. Le problème n'est pas là : il est dans le fait que je sois en désaccord avec le plus grand nombre des mesures qu'il propose... »
    Il conclut : « Je ne sais pas combien de temps cela peut durer. Mais, pour moi, pas grand-chose ne change. Je l'ai dit à Chirac, d'ailleurs. “Avec Fabius, lui ai-je indiqué, je ne faisais rien, j'avais à rendre un arbitrage tous les quinze jours, pas plus. Avec vous, j'ai beaucoup à faire : je n'arrêterai pas de vous surveiller !” »
    C'est sur l'audiovisuel que sa relation avec moi est la plus surprenante ; il m'en parle aujourd'hui comme si rien ne nous avait séparés, comme si je n'y avais joué aucun rôle au long de ces années. Il regrette, me dit-il, l'abolition de la Haute Autorité 13 .
    « Je sais ce que Chirac vous a dit : il ne désirait pas y toucher, mais, vis-à-vis de l'UDF, il est obligé de le faire. Je lui ai dit, moi, que dans les périodes difficiles, on a tort de toucher trop vite aux institutions. Ceux qui viendront plus tard changeront les institutions que Chirac et sa majorité mettront demain en place. C'est idiot ! »
    Il ne se battra pas pour la Haute Autorité. À vrai dire, je sais qu'il se bat pour certaines personnes, pour certaines institutions. Pas celle-là : il ne faut tout de même pas trop lui en demander, même si de l'eau a coulé sous les ponts depuis 1984 !
    Et d'ailleurs, que pourrait-il faire ? Il attend la loi, comme nous tous. « Nous en reparlerons, me dit-il, lorsque le texte sera rendu public. »
    Sur le plan politique, il ajoute que la composition du gouvernement a été beaucoup plus difficile qu'on ne l'a su : six ou sept noms ont été évoqués, par exemple, pour le Quai d'Orsay. Qui ? « Chirac, me dit-il, ne me proposait que des hommes politiques qu'il savait bien que je ne pouvais accepter ! » François Léotard, Jean Lecanuet...
    Je demande : « Est-ce pour écarter Lecanuet du gouvernement en vous en faisant porter la responsabilité qu'il vous l'a proposé ?
    – Je n'en sais rien, dit-il, mais je ne l'exclus pas. »
    C'est lui, me dit-il, qui, le premier, a proposé le nom retenu, celui de Jean-Bernard Raimond, alors ambassadeur à Moscou. Chirac pouvait difficilement le refuser : Jean-Bernard Raimond a été conseiller technique auprès de Georges Pompidou lorsque celui-ci était à Matignon, et l'a également été plus tard au secrétariat général de l'Élysée.
    Nous parlons de Léotard : je lui raconte qu'il m'a reçue rue de Valois avec beaucoup de courtoisie, qu'il s'est montré tout à fait correct, et que si l'entretien n'a pas duré longtemps, c'est que nous n'avions rien à nous dire. De tous les jeunes giscardiens comme celui-là, Mitterrand, je le sens, ne se préoccupe guère. En revanche, au bout de quelques jours seulement de cohabitation, il pense que Jacques Chirac ne sera pas un adversaire mineur.
    Il revient sur la Haute Autorité comme si rien, absolument rien n'était advenu de ce qui nous a opposés. Ai-je rêvé les affrontements d'il y a quelques années ? Suis-je « niçoise », comme il l'a dit à Serge July, ai-je exagéré ? Hélas, mes cahiers sont là pour prouver le contraire...
    Ce qui change – et sans doute n'est-il pas mécontent de cette issue –, c'est que la Haute Autorité est condamnée à mort par une opposition dont elle a prétendu, par indépendance, préserver les droits, et qui, devenue aujourd'hui majorité, s'en débarrasse prestement tandis que lui, il reste. Malmené, épié, tendu, surveillé, mais il reste.
    Alors peut-être dans tout cela trouve-t-il secondaire ce qui s'est passé de 1981 à 1986 !
    Voici ce qu'il me dit aujourd'hui de la Haute Autorité : « J'avais souhaité, dit-il, l'extension de ses pouvoirs, et j'en ai beaucoup voulu à Georges Fillioud de ne pas la favoriser. Mais, franchement, Fillioud a été contre les radios privées, contre la publicité sur les radios privées, contre la télévision privée. Bref, il a été contre tout ce que j'ai fait ! »
    Peut-être est-il en train de me tester : comme il a tout fait pour nous opposer, Fillioud et moi, il me lance le nom de ce dernier pour que j'abonde dans le sens qu'il m'indique. Je m'en abstiens. En revanche, je ne peux m'empêcher de lui dire : « Et votre Premier ministre, Laurent Fabius, il n'a pas été
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