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Brautigan, Un Rêveur à Babylone

Brautigan, Un Rêveur à Babylone

Titel: Brautigan, Un Rêveur à Babylone
Autoren: Keith Abott
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Des petits malins ont débarqué, ils ont
emporté des brassées de pantalons, probablement pour les refourguer dans le
Golden Gâte Park. Bien vite, les cartons ont été vidés, et il n’est plus resté
dans le magasin que les habituelles frusques importables. J’ai été le témoin de
plus d’un événement Digger de cet acabit : une écume composée d’un petit
nombre d’individus concernés par des préoccupations communautaires, pour une
vague de fuyards envapés et d’arnaqueurs à la petite semaine.
    Brautigan n’ignorait pas cette ambiguïté, mais, tant que la
Compagnie de communication des Diggers continuait de publier ses travaux, il
tendait à minimiser, voire ignorer les aspects les moins mythiques de leurs
entreprises. Cette admiration mutuelle contrastait avec l’accueil frileux
jusqu’alors réservé aux travaux de Brautigan, à commencer par l’establishment
des écrivains beat de North Beach.
    Lawrence Wright, dans l’article qu’il écrivit pour Rolling
Stone, juste après la mort de Brautigan, souligne son statut marginal à
North Beach. Allen Ginsberg lui avait collé le surnom de
« Bunthorne ». Personnage tiré de Gilbert et Sullivan,
« Bunthorne » est synonyme de poète précieux et charmeur, qui laisse
libre cours à « un noble bavardage de saveur transcendantale ». Cette
réputation ne semblait pas complètement usurpée, tant que Brautigan écrivait
dans la veine de ses poèmes du début ; d’authentiques productions « à
la Bunthorne », composées de brèves pensées étranges et éphémères. Cette
facette de « Bunthorne-le-poète », celle de son personnage, eut pour
effet de souvent tourner Brautigan en dérision – Ginsberg se montrant
d’ailleurs l’un de ses détracteurs les moins malveillants. Tant qu’il
continuait à largement publier ses poèmes, il était parfois difficile de faire
le lien entre ces textes presque simples d’esprit, et l’idée si haute qu’il se
faisait de lui-même.
    A North Beach, son travail industrieux de romancier était
ignoré de la plupart des gens qu’il fréquentait, et, pour eux, il était facile
de le prendre pour un rigolo. Toutefois, après s’être obstiné sur ce qu’il
estima plus tard s’élever à dix-sept versions de La Pêche à la truite, Richard
est devenu tout à fait conscient de ses propres dons, et s’est dès lors,
sérieusement, considéré comme un écrivain. Lorsqu’il a touché le gros lot en
tant que romancier, son statut de poète marginal de North Beach, son
comportement parfois épique sur le Haight, et son obstination à jouer les
poètes naïfs en posant sur les couvertures de ses livres, tout cela s’est
combiné pour constituer une image médiatique qu’il n’a jamais vraiment remise
en question.
    En 1966, tout comme la réputation littéraire de Brautigan,
la Compagnie de communication des Diggers était une opération précaire, montée
à la sauvette, se résumant en grande partie à un ensemble de poly-copieuses
Gestetner et de massicots. Outre les journaux, manifestes et bandes dessinées
que publiait la Compagnie de communication, on trouvait, en plus de ceux de
Brautigan, quelques ouvrages littéraires, dont un roman de Willard Bain, Informed
Sources , qui a été publié ensuite par un éditeur new-yorkais. Le titre des
polycopiés sur lesquels étaient imprimés les poèmes de Brautigan constituait
autant d’indications sur leur contenu : « Kit de réparation du
Karma », « Le très beau poème », « Poème d’amour »,
« Des fleurs pour ceux que tu aimes ». Lorgnant vers le registre
cybernétique, dans le vent à l’époque, il avait baptisé son recueil gratuit
« Entièrement pris en charge par des machines de grâce et d’amour ».
Et si une telle entreprise ne permit pas de dégonfler les stocks de livres
invendus, les publications ronéo des Diggers permirent de résoudre trois
problèmes pratiques, auxquels Brautigan, en tant qu’auteur, était confronté.
    Premièrement, il était difficile de se procurer ses travaux
car une infime quantité de sa poésie avait été publiée et seul un roman en
solde était disponible. Alors, pour ce qui était de les acheter… La solution
fut la suivante : les distribuer gratuitement dans la rue.
    Deuxièmement, la distribution des polycopiés était prise en
charge par de dévoués Diggers, autrement dit une équipe enthousiaste de
vendeurs bénévoles.
    Et ceci résolvait le troisième
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