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Berlin 36

Berlin 36

Titel: Berlin 36
Autoren: Alexandre Najjar
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    —  Colledge ! s’écria-t-il, radieux.
    — Oui, c’est ça, colledge . Et qui sait ? Avec l’aide de Dieu, un peu plus de travail et moins de bavardage de ta part, tu pourrais bien finir par aller à un de ces colledges , un jour.
    Elle retroussa ses manches, prit un seau et un torchon, puis ajouta :
    — Mais pour l’heure, si tu n’emmènes pas ce pauvre mulet chez M. Cannon, il mourra de vieillesse. Et s’il meurt de vieillesse, le proprio ne nous donnera pas les trois dollars et demi qu’il nous a promis. Et s’il ne nous donne pas cet argent, tout le monde ne pourra pas prendre le train et tu seras certainement un de ceux qu’on laissera sur place ! Allez ouste !
    JC sortit de la maison et détala. Il courut vite, très vite, le plus vite qu’il pouvait, pour ne pas rater le train.

3
    Où l’on découvre la vie agitée
 de la famille Lagarde
    Claire Lagarde s’enferma dans la penderie au premier étage pour ne plus entendre ses parents se disputer. Elle se sentait lasse de leurs scènes de ménage et n’avait plus la force de s’interposer pour tenter d’y mettre fin. Que faisaient-ils encore ensemble ? Ils étaient si différents qu’elle s’interrogeait sans cesse sur ce qui avait bien pu les réunir. Sa mère, Ursula Otten, était allemande ; son père, Victor Lagarde, français. Passionnée de peinture, elle passait le plus clair de son temps derrière son chevalet, les mains barbouillées de couleurs ; notaire de son état, il consacrait ses journées à la rédaction d’actes de toutes sortes. A l’âge de vingt ans, Ursula avait quitté Berlin, sa ville natale, pour Paris, dans l’espoir d’y perfectionner sa technique picturale. A l’instar de nombreux artistes étrangers attirés par la Ville Lumière, elle s’était inscrite à l’académie Julian, puis à l’académie Colarossi où l’on peignait des nus d’après modèles. A l’occasion d’une exposition collective au Grand Palais, elle avait rencontré son futur mari, venu en visiteur. Séduite par sa vaste culture et son sérieux, elle n’avait pas tardé à l’épouser malgré l’opposition de leurs familles respectives, peu enclines à accepter un élément étranger en leur sein. Rapidement, les rapports du couple s’étaient dégradés. Victor tolérait mal les extravagances de sa femme ; Ursula déplorait le manque de fantaisie de son mari, trop absorbé par ses dossiers. La naissance de leur fille Claire avait certes permis une trêve pendant laquelle ils avaient voulu ignorer les brèches qui fissuraient l’édifice conjugal, mais la Grande Guerre était arrivée, qui avait coupé la jeune femme de ses racines et exacerbé la méfiance de la famille Lagarde à son endroit.
    Claire entrouvrit la porte de la penderie et tendit l’oreille. Un vacarme de vaisselle cassée, des éclats de voix lui parvinrent.
    — Je pars, Victor. Je ne resterai pas une minute de plus dans cette maison !
    — Va au diable !
    Il y eut un bruit confus, comme si son père bousculait sa mère.
    — Claire ! hurla Ursula de toutes ses forces.
    L’adolescente ferma les yeux. Elle ne voulait rien voir. Elle se sentait incapable de réagir, pétrifiée par la peur.
    — Laisse-la tranquille, répliqua Victor d’un ton impérieux. Ne la mêle pas à nos histoires !
    — Elle vient avec moi à Berlin !
    — Pas question ! Elle reste ici avec moi.
    — Tu es incapable de l’élever, ricana Ursula.
    — Qu’est-ce que tu en sais ?
    — Tu veux me couper de ma fille ? vociféra-t-elle.
    — Je ne te coupe pas d’elle, non. Tu pourras venir la voir quand tu voudras, elle passera ses vacances chez toi…
    Claire se mit à triturer nerveusement ses boucles blondes. Comment choisir entre un père et une mère quand on les aime pareillement et que ni l’un ni l’autre n’est responsable de l’échec du couple ? Elle se plaisait à Paris, appréciait son collège où elle comptait de nombreuses amies. Pourquoi irait-elle à Berlin ? Elle ouvrit la porte et descendit à pas lents l’escalier pour rejoindre ses parents.
    — Je t’aime, maman, sanglota-t-elle. Mais si tu pars, je reste !
    Sa mère s’approcha d’elle et l’enlaça tendrement.
    — Je n’ai pas le choix, lui dit-elle à l’oreille en lui caressant les cheveux. Un jour, tu comprendras…
     
    Deux heures plus tard, Ursula prenait le train pour Berlin.

4
    Où l’on voit la famille Owens
 refaire sa vie à
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