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À l'ombre des conspirateurs

À l'ombre des conspirateurs

Titel: À l'ombre des conspirateurs
Autoren: Lindsey Davis
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plus méfiant, mais comment imaginer qu’il parviendrait à lever pareille armée ? Ils ressemblaient à ces mercenaires germains recrutés par le défunt empereur Vitellius. Désœuvrés à la fin de la guerre civile, et ayant bu l’argent de leur solde dans les bouges bordant le Tibre, ils étaient restés bloqués dans Rome. Notre nouveau Cæsar, plus pointilleux, refusait catégoriquement d’employer des auxiliaires étrangers dans la cité.
    Le ventre gonflé par trop de bière et de saucisses, ils savaient pourtant se battre, et avaient le nombre pour eux. Sur la frontière du Rhin, un capitaine sévère avait fait subir à ces mastodontes plusieurs années d’un entraînement intensif. Ils étaient armés d’énormes lames celtiques plates qu’ils faisaient tournoyer au-dessus de leur tête, ou pointaient à hauteur de la taille. Armé de mon court glaive romain, il m’était quasiment impossible de les atteindre. Sous mon costume de prêtre, j’avais endossé un pourpoint de cuir et des protections de bras, mais ils ne suffiraient pas à me protéger contre ces six sanguinaires. Je les voyais déjà se pourlécher les babines, à l’idée de me pourfendre comme un sanglier des forêts de Germanie.
    Pertinax éclata de rire.
    — Amuse-toi bien ! écumai-je, sans quitter les Germains des yeux. Je vais régler le sort de ces bouffons, et puis ce sera ton tour.
    Il hocha la tête et se dirigea vers la sortie, oubliant la présence de Milo. À la vue de ce monstre totalement dépourvu d’humour, Pertinax s’arrêta net et fit demi-tour. Je le vis courir souplement vers l’escalier. Impossible de le suivre : je m’efforçais de parer six lames puissantes, manquant me briser le poignet à chaque fois. Ce fut Curtius Gordianus qui se lança à la poursuite de Pertinax, animé par un puissant désir de vengeance. Il brandissait le couteau aiguisé qu’il avait utilisé pendant la cérémonie, encore dégoulinant du sang du mouton sacrifié.
    Le visage bovin de Milo indiquait clairement sa perplexité.
    — Sois gentil, Milo, lâche ta flûte et attrape un glaive !
    Il s’en procura un par la méthode la plus simple : en soulevant le mercenaire le plus proche de lui, avant de le cogner par terre jusqu’à ce que les yeux lui sortent de la tête.
    — Continue comme ça, haletai-je.
    Je venais d’en désarmer un moi-même, en lui décochant d’abord un cruel coup de botte dans une partie de son anatomie qui lui ferait défaut avec les dames.
    Milo étant parvenu à me rejoindre, nous nous étions mis dos à dos pour les repousser. Leur cercle s’était élargi, ce qui nous permettait de mieux voir venir les coups. Deux Germains chargeant brusquement, en provenance de directions opposées, nous nous accroupîmes d’un commun accord pour les laisser s’empaler mutuellement avec un bruit qui donnait envie de se boucher les oreilles.
    Les deux derniers préférèrent prendre la fuite en traînant les blessés. Pour éviter tout rapprochement possible entre cette échauffourée et la résidence Pertinax, Milo m’aida à traîner les morts dans un caniveau, loin de la maison. On mettrait leurs morts sur le compte d’une bagarre d’ivrognes.
    — Tu es blessé, Falco !
    Je n’avais pas encore mal, mais une longue estafilade au côté gauche me faisait perdre beaucoup de sang. Après cinq ans passés à exercer le métier de détective privé, je n’éprouvais plus le besoin de m’évanouir, mais cette blessure n’en arrivait pas moins au plus mauvais moment.
    Lorsque Milo insista pour que j’aille voir un médecin, je fis non de la tête.
    Nous nous dépêchâmes de regagner la maison pour découvrir ce qu’était devenu Gordianus. Personne ne répondit quand nous criâmes son nom à tous les échos. Après avoir verrouillé la porte de la rue, je fourrai la clef dans ma poche. Un grand silence régnait dans la maison vide, qui mettait les nerfs à vif.
    Nous empruntâmes l’escalier en tendant l’oreille. Une fois au premier étage, nous ouvrîmes toutes les portes une à une. Seuls des salons vides et des chambres désertes s’offraient à nos yeux. Partout de la poussière, et des mouches se heurtant à des fenêtres fermées.
    Dans la dernière pièce, apercevant Gordianus en tas sur le sol, nous le crûmes mort. Il n’était que désespéré.
    — Je le tenais à la pointe de mon couteau, et je l’ai raté. Il a réussi à se débarrasser de moi et à s’enfuir.
    — Il y a
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