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À l'ombre des conspirateurs

À l'ombre des conspirateurs

Titel: À l'ombre des conspirateurs
Autoren: Lindsey Davis
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bienveillants de son propriétaire, cet animal semblait avoir pris un rendez-vous à l’abattoir avant le début de la course. Il baissait la tête comme si son cavalier essayait de l’étrangler. Ses pattes de derrière ne s’agitaient pas au même rythme que celles de devant, et donnaient l’impression de ruer à chaque foulée. Heureusement qu’on ne lui demandait pas de sauter des haies !
    Du moins sa queue flottait-elle à un angle joyeux qui faisait plaisir à voir. Pour le reste, il me semblait tellement déplorable que je commençais à regretter de ne pas avoir misé sur lui, par sympathie pour les perdants.
    Au sixième tour, Ferox menaçait toujours le premier. L’air heureux.
    Petit Chéri, reconnaissant le cheval qui l’avait bousculé au départ, décida de le dépasser et y parvint. Cette fois, Titus n’émit aucun commentaire. Il était maintenant sixième sur sept. Pas de quoi sauter de joie, surtout qu’il ne restait qu’un tour et demi.
    Les hurlements de la foule s’amplifièrent, et Petit Chéri secoua les oreilles. Devant, les choses commençaient à bouger. En troisième position, un cheval d’un gris boueux courait seul depuis si longtemps qu’il commençait à s’endormir. Une haridelle tachetée, que tout le monde avait ignorée jusque-là, força soudain l’allure, obligeant Ferox à accomplir un effort pour la distancer. Il y démontra une grande facilité, mais en prenant grand soin de garder son museau à la hauteur du garrot du Maurétanien. La paume de mes mains devenait de plus en plus moite. Ferox allait être deuxième, et il serait deuxième dans toutes les courses auxquelles il participerait…
    Tout ce que j’entreprenais dans la vie allait de travers. Je ne parvenais à atteindre aucun des buts que je me fixais. Qui avait dit cela ?… Helena, quand elle avait cru que je l’avais abandonnée, et qu’elle attendait notre enfant… Elle me manquait tellement que je faillis prononcer son nom tout haut. Je m’en gardai bien : Titus Cæsar s’était toujours bien trop intéressé à Helena pour mon goût, et je ne tenais pas à attirer son attention sur elle.
    Quand les chevaux passèrent pour la sixième fois devant les juges, il y avait une bonne vingtaine de longueurs entre le premier et le dernier. Certains qu’il allait prendre la tête pendant le dernier tour, les spectateurs hurlaient le nom de Ferox. Pas moi, car j’étais intimement persuadé que ce ne serait pas le cas.
    Ils se trouvaient exactement à l’opposé des juges, et il restait un demi-tour à accomplir, quand il se produisit quelque chose d’inouï. Mon cheval, Petit Chéri, se mit à courir comme si sa mère l’avait conçu avec le vent.
    Ils arrivaient vers nous. Il était tellement large, par rapport aux autres que je n’avais aucun mal à le distinguer. Quand il démarra comme l’éclair, ce fut incroyable. Le cavalier n’eut pas à se servir de son fouet une seule fois, se contentant de faire son possible pour rester en selle. Ce canasson incroyable avait décidé que c’était le moment ou jamais. Même si la plupart des spectateurs perdaient de l’argent à chacune de ses foulées, il gagna leur cœur à tous.
    Ferox arriva second, et Petit Chéri gagna. Par trois longueurs.
    Titus Cæsar me donna une grande claque sur l’épaule.
    — Falco ! Quelle course extraordinaire ! Comme tu dois être fier !
    Titus récompensa mon cavalier avec une bourse d’or. Je reçus également un présent… Titus me promit un turbot !
    — Ton cuisinier saura l’accommoder ?
    — Oh ! je donnerai congé au cuisinier, déclarai-je joyeusement à Titus, je cuisine toujours les turbots moi-même.
    Avec une sauce au cumin, bien évidemment.
    À la suite de cette victoire inespérée, ma famille organisa une grande fête. C’était l’occasion ou jamais de me faire offrir à boire gratuitement, mais je dus décliner car je tenais à garder la tête claire. Tout ce que je me rappelle de cette épouvantable soirée, c’est mon pernicieux beau-frère Famia faisant ribote, et ma jeune nièce de 3 ans en train de jouer avec les jetons inutiles que m’avait offerts Tullia « de la part » de Pertinax. Après avoir étalé les tristes petits disques d’os autour d’elle, Marcia n’avait rien trouvé de mieux à faire que de se mettre à les avaler – sans tenir aucun compte des adultes qui lui disaient de cesser.
    Dès que possible, je partis rendre visite à Gordianus. Il
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