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Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II

Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II

Titel: Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II
Autoren: Benjamin Franklin
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Bonhomme.—Voulez-vous apprendre ce que vaut l'argent ? Essayez d'en emprunter. Celui qui va faire un emprunt, va chercher une mortification, dit le bonhomme Richard ; et certes, autant en fait celui qui, après avoir prêté à certaines gens, redemande son dû.
»Les avis du bonhomme Richard vont plus loin. L'orgueil de se parer, dit-il, est une malédiction. Quand vous en êtes atteint, consultez votre bourse avant de consulter votre fantaisie : l'orgueil est un mendiant qui crie aussi haut que le besoin, et est bien plus insatiable. Quand vous avez acheté une jolie chose, il faut que vous en achetiez encore dix autres afin d'être assorti.—Mais, dit le bonhomme Richard, il est plus aisé de réprimer la première fantaisie que de satisfaire toutes celles qui la suivent. Il est aussi fou au pauvre de vouloir singer le riche, qu'il l'est à la grenouille de s'enfler pour devenir l'égale d'un bœuf. Les grands vaisseaux peuvent se hasarder en pleine mer : mais les petits bateaux doivent se tenir près du rivage.
»Les folies de l'orgueil sont bientôt punies ; car, comme le dit le bonhomme Richard, l'orgueil qui dîne de vanité, soupe de mépris. Il dit encore : L'orgueil déjeune avec l'abondance, dîne avec la pauvreté, et soupe avec la honte.—Mais après tout, à quoi sert cette vanité de paroître, pour laquelle on se donne tant de peine et l'on s'expose à de si grands dangers ? Elle ne peut ni nous conserver la santé, ni adoucir nos souffrances ; et sans augmenter notre mérite, elle nous rend l'objet de l'envie, et accélère notre ruine.
    »Mais quelle folie n'y a-t-il pas à s'endetter pour des superfluités ? Dans la vente qu'on va faire ici, l'on nous offre six mois de crédit ; et peut-être cela a-t-il engagé quelques-uns de nous à s'y trouver, parce que, n'ayant point d'argent comptant, ils espèrent de satisfaire leur fantaisie, sans rien débourser. Mais, hélas ! songez bien à ce vous que faites, quand vous vous endettez. Vous donnez à un autre des droits sur votre liberté. Si vous ne pouvez pas payer au terme fixé, vous rougirez de voir votre créancier ; vous ne lui parlerez qu'avec crainte ; vous vous abaisserez à vous excuser auprès de lui, d'une manière rampante ; peu-à-peu, vous perdrez votre franchise, et vous vous déshonorerez par de misérables menteries. Le bonhomme Richard observe que la première faute est de s'endetter, et la seconde de mentir.—Les dettes portent le mensonge sur leur dos, dit-il ailleurs.
»Un anglais, né libre, ne devroit jamais rougir ni craindre de parler à qui que ce puisse être. Mais la pauvreté ôte à l'homme toute espèce de courage et de vertu. Il est difficile qu'un sac vide puisse se tenir de bout.
»Que penseriez-vous d'un prince ou d'un gouvernement qui vous défendroit, par un édit, de vous habiller comme les personnes de distinction, sous peine d'emprisonnement ou de servitude ?—Ne diriez-vous pas que vous êtes nés libres ; que vous avez le droit de vous vêtir à votre fantaisie ; que l'édit est contraire à vos priviléges et le gouvernement tyrannique ? Cependant, vous vous soumettez volontairement à cette tyrannie, quand vous vous endettez pour vous parer !
»Votre créancier a le droit de vous priver de votre liberté, en vous confinant dans une prison pour toute votre vie, ou en vous vendant comme un esclave, si vous n'êtes pas en état de le payer.
    »Quand vous avez fait un marché, vous ne songez, peut-être, guère au paiement.
 Mais, comme dit le bonhomme Richard, les créanciers ont meilleure mémoire que les débiteurs. Les créanciers sont une secte superstitieuse et grande observatrice des nombres de jours, et des temps précis. L'échéance de votre dette arrive sans que vous y preniez garde, et l'on vous en fait la demande, avant que vous vous soyez préparé à y satisfaire. Si au contraire, vous pensez à ce que vous devez, le terme qui sembloit d'abord si long, vous paroîtra, en s'approchant, extrêmement court. Vous vous imaginerez que le temps aura mis des ailes à ses talons, comme il en a à ses épaules.—Le carême n'est jamais long pour ceux qui doivent payer à pâques.
»Peut-être vous croyez-vous, en ce moment, dans un état prospère, qui vous permet de satisfaire impunément quelque petite fantaisie. Mais épargnez pour le temps de la vieillesse et du besoin, pendant que vous le pouvez. Le soleil du matin ne dure pas tout le jour. Le gain est incertain et
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