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Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Titel: Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique
Autoren: Jean-Claude Pomonti
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qui l’amuse. « Laura m’a accordé ce titre », me dit-il, car il venait d’être promu général de brigade. À l’époque de la guerre, le café-glacier était le siège de tant de rumeurs qu’on l’avait surnommé Radio-Catinat. Le « titre » semble plaire à Pham Xuân Ân dans la mesure où la dérision est également une façon de faire passer le message contraire.
    Son histoire n’est pas seulement celle de l’espion parfait. Agent de renseignements communiste dans les zones viêt côngs du Sud, Muoi Nho a reçu et relayé les documents envoyés par Pham Xuân Ân de 1961 à 1964. Il a attendu près de trois décennies pour révéler que dans la capitale du Nord, le Bureau politique du PC et le commandement militaire étaient, en règle générale, « très heureux » lors de la réception des rapports de Pham Xuân Ân. Le Premier ministre Pham Van Dông, a dit Muoi Nho, « rit avec bonheur alors que le général Vo Nguyên Giáp déclare : nous sommes maintenant dans la salle d’opérations américaine » quand les rapports de Pham Xuân Ân tombent enfin entre leurs mains.
    « Dans la salle d’opérations américaine », a donc affirmé Vo Nguyên Giáp, le vainqueur des Français et des Américains. Si tel est le cas, il ne s’agit pas que d’un compliment à l’adresse d’un grand espion.
    Pham Xuân Ân a fait partie d’une poignée de Saigonnais – journalistes, intellectuels, politiciens –, auxquels je suis resté particulièrement attaché en dépit d’une très longue absence. Chacun à sa façon, sans que je m’en rende toujours compte, a été un tuteur. Mais, en 1978, j’étais encore très loin de deviner, à l’époque, la personnalité de Pham Xuân Ân. Il me faudra de longues années pour saisir la dimension du personnage. L’histoire, en effet, ne s’arrête pas avec la découverte de l’espion, trois ans après la fin de la guerre. Elle commence avec cette révélation.

Chapitre 2 Fin de guerre
    Dans le faubourg saigonnais de Gia Dinh, non loin de l’aéroport de Tân Son Nhât, se trouve une ruelle baptisée «  the hundred pee alley  », l’allée à cent piastres. On peut y acheter de l’héroïne, de l’opium, un fusil, une gamine. Mieux vaut, toutefois, ne pas s’y aventurer seul, surtout après la tombée de la nuit. En 1971, ce Prisunic est régi par des déserteurs et d’anciens combattants. Un jour, la souricière de la police se referme sur une dizaine d’Américains. Le petit arsenal découvert à cette occasion mérite mention : 31 armes, 190 livres de marijuana, 7 grenades, de fausses cartes d’identité, 44 caisses d’alcool, 87 caisses de bière, 212 cartouches de cigarettes, 75 ordres de vol en blanc et une quinzaine de permissions également en blanc. Mais, le plus souvent, les gangs n’ont qu’à graisser quelques pattes de policiers pour avoir la paix.
    Ce genre de dérive se dissipe, toutefois, avec les retraits progressifs de troupes américaines dans le cadre de la « vietnamisation » de la guerre par le président Richard Nixon. L’état-major à Washington commence par rapatrier ses unités les plus indisciplinées, composées de soldats qui refusent de partir en opération ou qui comptent un pourcentage trop élevé de drogués. Réorganisée pendant quelques années autour de la centaine de milliers d’Américains installés dans ses murs, Sài Gòn n’en prend que davantage l’allure d’une agglomération en voie d’abandon.
    Tout un monde est réduit au chômage – la secrétaire, le chauffeur, l’interprète. D’autres voient fondre leurs revenus – hôteliers, logeurs, cireurs de souliers, restaurateurs, trafiquants qui revendaient les produits des magasins militaires américains. Sans parler de la trentaine de milliers de prostituées. Perdant leur clientèle la plus fortunée, les bars ferment les uns après les autres.
    Au tournant des années 1970, dans le centre-ville, un grand cabaret abrite encore orchestre philippin, entraîneuses chinoises, danseuses sud-coréennes et prestidigitateur américain. Sous les lumières multicolores, l’alcool coule à flots. Une boîte de nuit pour militaires venus non seulement d’Amérique mais d’Australie, des Philippines, de Thaïlande ou de Corée du Sud.
    Deux années plus tard, le même cabaret est récupéré par un public vietnamien attablé autour d’une bière, d’un citron pressé ou d’une limonade.
    Sagement, ce public y attend
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