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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin
Autoren: Ken Follett
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l’église surplombait de toute sa
hauteur la foule compacte des fidèles et se dissolvait dans la nuit.
Émergeaient seuls de l’ombre la partie inférieure, les arches et les meneaux,
que les torches coloraient d’une teinte rouge orangé. En approchant du portail,
le cortège ralentit. Gwenda aperçut alors les habitants de la ville qui
arrivaient par l’autre bout de la place. Ils étaient bien des centaines,
peut-être des milliers, se dit-elle, bien qu’elle ne se représente pas très
bien combien cela faisait de personnes, un millier, ne sachant pas compter
aussi loin.
    La foule s’écoulait lentement vers la nef. Dans la lumière
tremblante des torches, les saints sculptés sur les parois du porche semblaient
mener une danse endiablée au-dessus des monstres et des démons dont Gwenda ne
pouvait détacher le regard. Ces dragons et ces griffons la mettaient mal à
l’aise, notamment l’ours à tête d’homme et le chien à deux corps et un seul
museau, car, pour un certain nombre d’entre eux, ces êtres fabuleux étaient
manifestement en lutte avec l’humanité : ici, un succube avait passé un
nœud coulant autour du cou d’un homme ; là, un animal ressemblant à un
renard traînait une femme par les cheveux ; ailleurs, un aigle lacérait un
homme nu de ses serres, représentées sous forme de mains. Les saints
s’alignaient en rang d’oignons au-dessus de ces images infernales, séparés par
de petits auvents des apôtres sculptés plus haut, juste au ras de la voûte.
Dans le bas de celle sous laquelle se tenait Gwenda, on reconnaissait saint
Pierre et saint Paul, le premier à sa clef, le second à son rouleau de
parchemin. Et tous deux levaient des yeux emplis d’adoration vers le Christ en
majesté qui trônait au centre, au-dessus du portail principal.
    Gwenda avait beau savoir que Jésus exhortait les fidèles à
ne pas pécher, elle craignait davantage la torture des hommes que celle des
démons. Si elle ne volait pas la bourse de sieur Gérald, son père lui donnerait
le fouet. Et il Y avait pire : sa famille n’aurait rien d’autre à manger
que de la soupe aux glands. Philémon et elle souffriraient de la faim pendant
de longues semaines ; le lait de Ma sécherait dans son sein et le bébé
mourrait comme déjà les deux autres avant lui ; Pa disparaîtrait des jours
entiers pour revenir avec un héron décharné ou deux écureuils. Et ils
n’auraient rien d’autre à faire cuire. La faim était plus redoutable que le
fouet. Elle durait plus longtemps.
    On lui avait enseigné à chaparder dès son plus jeune âge – à
chiper une pomme sur un étal, un œuf frais sous le cul de la poule du voisin,
ou encore le couteau oublié par l’ivrogne sur la table de la taverne. Mais
voler de l’argent, c’était différent. Si elle se faisait prendre en train de couper
la bourse de sieur Gérald, il ne lui servirait à rien d’éclater en sanglots. On
ne se contenterait pas de la sermonner, comme la religieuse au cœur tendre, le
jour où elle avait volé une paire de chaussures en cuir très doux. Couper le
cordon de la bourse d’un chevalier, ce n’était pas une blague de chenapan,
c’était en vérité un crime de grande personne et il était puni en conséquence.
    Elle essaya de ne pas penser à ce qui l’attendrait en cas
d’échec. Elle était petite et agile, elle était rapide. Oui, elle saurait
s’emparer de cette bourse subrepticement, comme un fantôme. Pourvu seulement
que ses mains ne tremblent pas !
    L’immense cathédrale était déjà bondée. Éclairés par les
torches que tenaient des moines, au visage dissimulé sous leur capuche, les
bas-côtés vibraient d’une lumière rougeoyante. Dans la nef, l’enfilade des
piliers s’élevait si haut que leurs fûts se perdaient dans l’obscurité.
Laissant la foule progresser vers l’autel, Gwenda demeura auprès de sieur
Gérald. Le chevalier à la barbe rousse et sa maigre épouse ne l’avaient pas
remarquée. Quant à leurs deux garçons, ils ne lui prêtaient pas plus
d’attention qu’aux pierres des murs. Gwenda avait perdu de vue sa famille,
restée en arrière.
    La nef se remplissait rapidement. Gwenda n’avait jamais vu
tant de monde rassemblé dans un même endroit – il Y en avait bien plus que dans
le pré devant la cathédrale, les jours de marché. Et tous ces gens se saluaient
gaiement l’un l’autre, heureux d’être protégés des mauvais esprits dans ce lieu
sacré. Le bruit de
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