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Un espion à la chancellerie

Un espion à la chancellerie

Titel: Un espion à la chancellerie
Autoren: Paul C. Doherty
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tout le repas : il buvait sec. Son visage s’était empourpré, le sentiment de fierté – allié aux effets du bordeaux – faisait briller ses yeux.
    — Les fils de Tuberville, continua-t-il plus chaleureusement, rentreront chez eux. Les lettres de leur pauvre père parlant de médailles de saint Christophe et de la vie dans un petit manoir austère du Shropshire toucheraient le coeur de n’importe qui. Bien sûr, la fille du comte de Richemont sera la première à partir. Notre roi insiste sur ce point.
    Corbett fit signe qu’il comprenait ; il pouvait à peine en croire sa chance. Il s’efforça de rester impassible et de garder l’air profondément malheureux et abattu, car si de Craon s’apercevait qu’il était tombé dans le piège, il ne lui permettrait jamais de quitter la France vivant. Corbett reposa son gobelet et se tourna en bâillant vers Ranulf.
    — Il faudrait que nous rentrions à présent, dit-il tranquillement.
    Ranulf, la bouche pleine d’une chère succulente, opina, et s’empressa de bourrer ses poches avec les friandises qu’un cuisinier avait posées devant lui. Hervey s’était presque assoupi, terrassé par le vin, et Corbett dut le rudoyer quelque peu pour le réveiller.
    De Craon se pencha par-dessus la table :
    — Vous vous en allez, Monsieur ?
    — Oui ! En fait, j’aimerais partir pour Londres dès demain.
    De Craon plissa les yeux.
    — Pourquoi ? Pourquoi tant de hâte ?
    Corbett haussa les épaules.
    — Pourquoi pas ? Nous avons les termes de l’accord. Il n’est pas nécessaire de les recopier, il suffit de les transmettre verbalement au roi Édouard d’Angleterre. Nous n’avons aucune raison de rester. De plus, certaines affaires à Londres requièrent ma présence.
    De Craon hocha lentement la tête en scrutant le visage de Corbett, comme pour y déceler les vraies raisons de ce départ précipité.
    — En êtes-vous sûr ?
    — Tout à fait, répliqua Corbett jouant toujours les diplomates abattus. Ces conditions ne sont guère avantageuses pour notre souverain. Plus tôt nous reviendrons en Angleterre pour l’en informer, mieux ce sera. Je vous serais obligé, Messire, de bien vouloir nous procurer les sauf-conduits nécessaires ainsi qu’une escorte militaire jusqu’à Calais.
    De Craon haussa les épaules. Il savait qu’il ne pouvait retenir l’envoyé anglais contre sa volonté. Mais il avait des soupçons. Corbett aurait-il découvert quelque chose ? Il aurait voulu que son adversaire commît une erreur, juste une seule : il aurait pu ainsi se venger des revers que lui avait infligés cet insupportable Anglais. Sans compter qu’il n’avait pas oublié que Corbett était responsable de la mort récente d’un de ses meilleurs agents. Le Français tenta de dissiper les brumes de son cerveau en se concentrant sur ce qu’il avait dit à Corbett depuis la venue de celui-ci à Paris. Il n’avait rien laissé échapper, rien ! Il se leva :
    — Vos sauf-conduits seront prêts demain. Je vous souhaite bon voyage !
    Sur ce, il tourna les talons et alla à la table haute chuchoter à l’oreille de son auguste maître. Corbett ne prit pas la peine de savoir si le roi soulevait des objections ou non. Il quitta la grand-salle pour regagner leurs quartiers en poussant Ranulf devant lui et en tirant Hervey tant bien que mal.

CHAPITRE XVIII
    De Craon tint parole ; le lendemain, les sauf-conduits étaient prêts ainsi qu’une petite escorte de soldats choisis par lui-même.
    En traversant la campagne du nord de la France, en ce début d’automne, Corbett prenait bien soin de dissimuler ses pensées et de garder l’attitude qui sied à un porteur de mauvaises nouvelles. Ranulf et Hervey étaient ravis de retourner en Angleterre, mais le premier connaissait assez les humeurs de son maître pour rester silencieux et ne pas risquer de l’agacer par de vains bavardages. Le capitaine de l’escorte, un solide Breton, surveillait de près l’envoyé anglais, comme de Craon en personne le lui avait secrètement ordonné. Ce dernier soupçonnait toujours Corbett de savoir quelque chose, mais il n’était pas parvenu à deviner quoi. Pendant toute la chevauchée, le clerc ne se départit pas de son air triste et de son trouble manifeste, ce qui rassura l’escorte et le capitaine qui, à Boulogne, envoya un courrier à de Craon, l’assurant que l’envoyé continuait à se comporter comme s’il redoutait l’entrevue à venir avec son
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