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Sur le quai

Titel: Sur le quai
Autoren: Alain Pecunia
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du bureau.
     
     
     
     
     
     
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    – Merde, merde, merde…, se répéta Me Alexandre Caillard après le
départ de sa femme.
    C’était dingue. Ça remontait à près de quarante ans. Trente-sept
exactement, se dit-il après un bref calcul mental.
    Il avait cinquante-sept ans et ça s’était passé l’année de ses
vingt ans. Juste après sa première année de droit – il avait
redoublé sa terminale. En juillet 66.
    En fait, ça remontait à avril 63.
    Il pouvait même remonter à l’automne 62, lorsque, avec son pote
de lycée Jean Lestrade, il s’était mis à fréquenter un groupe de
jeunes anars franco-espagnols qui avaient projeté de combattre la
vague touristique qui commençait de déferler sur l’Espagne de
Franco par la pose de pains de plastic ici et là en Europe contre
des bâtiments abritant des intérêts espagnols. Comme des banques ou
les sièges d’Iberia, la compagnie aérienne espagnole.
    Un truc foireux qui avait logiquement foiré.
    Le 5 avril en fin de matinée, il était arrivé à Barcelone et
avait pris une chambre dans un hôtel de la Plaza Real. Il devait
récupérer Jean à sa descente du bateau en provenance de Palma de
Majorque, le 6 ou le 7.
    La mission de Lestrade consistait à poser deux pains de plastic
sur ce paquebot et à repasser immédiatement la frontière en prenant
le train.
    Pour des raisons connues d’eux seuls, les responsables du groupe
avaient décidé que le franchissement de la frontière
s’effectuerait, cette fois, clandestinement. Il fallait donc
envoyer quelqu’un pour prévenir Lestrade des nouvelles modalités.
Quelqu’un qui le connaisse et qui aurait sa confiance.
    Caillard devait le conduire dans une planque des environs de
Lérida où il attendrait son passeur. Une fois Lestrade en lieu sûr,
lui-même repasserait la frontière légalement sans plus
attendre.
    Pour l’instant, le 6 au matin, à sept heures trente, il est déjà
sur le port.
    Le bateau doit arriver à huit heures. Mais il n’est toujours pas
en vue.
    Il sourit en pensant à la surprise que va avoir Jeannot en le
trouvant là. Mais il s’attend à ce qu’il fasse la gueule quand il
lui apprendra que d’autres bombes doivent exploser simultanément
dans d’autres villes espagnoles. Jean Lestrade croit être seul en
opération en ce moment. Justement, les responsables lui ont
présenté sa mission comme étant une opération
« test ».
    Une demi-heure plus tard, Alexandre Caillard commence de
s’impatienter.
    Toujours pas de bateau en vue.
    Il se rassérène quand il l’aperçoit au loin vers neuf heures.
Puis l’attente lui paraît de nouveau interminable.
    Près d’une heure pour que le paquebot soit enfin à quai.
    Vers dix heures, alors que celui-ci achève ses ultimes manœuvres
d’accostage, une sourde explosion à bord le fait tressaillir.
    Il se tient en retrait sur le quai.
    Avec la vingtaine de personnes qui attendent le débarquement des
passagers, il se retrouve brusquement refoulé à l’extérieur par
quelques policiers en uniforme.
    Ils restent là agglutinés derrière des barrières
métalliques.
    La passerelle tarde à être jetée.
    Quelques policiers énervés vont et viennent sur le quai.
    Les passagers sont agglutinés sur le pont côté quai.
    Alexandre Caillard croit apercevoir Lestrade.
    Puis il baisse les yeux. Il est soucieux.
    Il se dit qu’il ne peut pas rester à attendre comme ça. Que Jean
va se faire arrêter.
    Il ne panique pas. Juste une angoisse mal définie.
    Et de la tristesse, car il ne peut rien pour son ami.
    Personne ne le remarque s’éclipser avec son petit sac de
voyage.
    Il sait qu’il y a un train vers onze heures à la gare de
Francia.
    Il s’efforce de marcher lentement, mais, imperceptiblement, il
allonge le pas comme malgré lui.
    Il a hâte à présent d’atteindre la gare.
    Il frissonne. Il fait encore frais en ce matin d’avril.
    Il soupire de soulagement en pénétrant dans le hall.
    Il a faim et prend la direction du buffet.
    Il avise une table isolée dans le fond et y prend place.
    Il y a peu de monde.
    Deux hommes, derrière lui, se sont arrêtés à l’entrée du
buffet.
    Alexandre Caillard ne les a pas remarqués.
    Il est en train de commander un café et un sandwich au jambon au
serveur nonchalant au long tablier, en essayant de faire comprendre
qu’il est pressé.
    – De prisa, por favor,
dit-il.
    Les deux hommes se jettent un regard entendu.
    Le plus jeune vient
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