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Paris vaut bien une messe

Paris vaut bien une messe

Titel: Paris vaut bien une messe
Autoren: Max Gallo
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autres. Retire-toi du monde, si tu ne peux accepter cela, et n’oublie pas
que ceux qui veulent instaurer le royaume de Dieu sur la Terre, le gouvernement
par la religion, deviennent des massacreurs !
     
    Je lui donnais raison, Seigneur. C’est pour cela que je me
tenais aux côtés du roi, que j’approuvais sa politique, que je tentais de
convaincre Séguret ou Jean-Baptiste Colliard de lui demeurer fidèles et
dévoués.
    Séguret baissait la tête, grommelait que l’entourage du roi
était désormais composé de ligueurs que l’argent de la couronne avait achetés.
Les gentilshommes huguenots des temps de disette, quand Henri de Navarre
n’était qu’un « roi sans couronne, un général sans argent, un mari sans
femme », avaient été oubliés ou chassés depuis que le Béarnais avait
abjuré.
    — Doutez-vous que ces changements ne m’aient pas percé
l’âme ? ajoutait Séguret.
    Et moi qui avais si souventes fois voulu l’occire, je
comprenais son dépit, le sentiment qu’il avait d’avoir été trahi.
     
    Pouvait-on, Seigneur, vivre en paix quand tant d’hommes, au
profond de leur cœur, doutaient de la foi du roi, de sa fidélité ?
    J’ai déjà commencé à voir des visages se fermer sur son
passage quand il chevauchait aux côtés d’une litière sur laquelle était étendue
Gabrielle d’Estrées, la favorite, la blonde femme aux oreilles, au cou, aux
poignets et aux mains parés de boucles, de colliers, de bracelets et de bagues.
    Quelqu’un dans la foule a crié : « Voilà la putain
du roi ! »
    J’ai tressailli : c’était, après les jours de beau
temps, l’annonce du retour des orages, la persistance de la haine et, peut-être
pis encore, du mépris.
     
    On arrêta peu après un homme qui se nommait Barrière. On sut
qu’il avait vu plusieurs curés et pères jésuites. Il s’était confessé de son dessein
de punir le tyran hérétique, et il avait reçu bénédiction, assurant que Dieu
l’aiderait dans son entreprise.
    Ô Seigneur, voilà comment on trahit Votre parole !
Voici comment ceux qui prétendent parler en Votre nom font commerce de leur
autorité. Vous couvrent de la boue des choses humaines en Vous mêlant à des
pensées de meurtre !
    On prit Barrière à la porte de Melun. Il avait sur lui un
grand couteau très pointu, aiguisé des deux côtés.
    Il ne cacha rien de ses intentions.
    On le condamna comme parricide et sacrilège.
    J’ai vu en place de Grève le bourreau lui tenailler les
chairs avec un fer rouge, lui brûler la main droite, lui briser à coups de
barre de fer les bras, les cuisses et les jambes, et l’étendre sur la roue,
pantelant, face au ciel, pour qu’il y vive dans la souffrance infernale.
    Tant qu’il Vous plairait, Seigneur !
     
    Je l’ai fait remarquer à Montanari : « C’est le
premier geste de haine contre le roi depuis son abjuration. » Il y en eut
un autre dont je fus le témoin. J’était entré avec plusieurs gentilshommes dans
la chambre de Gabrielle d’Estrées où le souverain nous avait conviés.
    Je me tenais en retrait quand, tout à coup, j’entendis le
roi crier. Je le vis porter les mains à sa bouche cependant que du sang
jaillissait de sa lèvre percée, d’une dent arrachée.
    Un jeune homme vêtu de noir, dont on se saisit, lui avait
porté ce coup de poignard, visant le cou, mais le roi, en se penchant, avait
reçu la lame sur la bouche.
    On le pansa et il dit :
    — Il y a, Dieu merci, si peu de mal que, pour cela, je
ne me mettrai pas au lit de meilleure heure !
    Mais je vis ses yeux las ; une expression d’abattement
lui tirait les traits.
    Encore le temps des assassins, des régicides ! Le temps
des meurtres encore, déjà !
    On questionna le jeune homme, Jean Chatel. Lui aussi avait
reçu l’encouragement des pères jésuites dont il avait été l’élève au collège de
Clermont.
    Il se confessa aux juges. Il livra le nom des pères. On les
bannit, on pendit l’un d’eux, on chassa les jésuites de France.
    Et Jean Chatel, quant à lui, je le vis place de Grève, à
genoux. On lui tranche le poing. On lui tenaille le corps. Et, puisqu’il a
blessé le roi, on va l’écarteler, ses membres attachés à quatre chevaux. La
foule jubile, criaille. Puis on brûlera ces pauvres débris et on dispersera les
cendres au vent.
    Quelle peut être la moisson d’une telle semence, sinon la
haine et la guerre ?
    Henri l’a déjà déclarée à l’Espagne, « à son de
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