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Mathilde - III

Titel: Mathilde - III
Autoren: Alain Pecunia
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rangs.
– Mais doit-on jeter le bébé avec l’eau du bain pour
autant ?
    Toutes ces hautes considérations laissèrent indifférente la
duchesse douairière de Montevaux de la Passette et rien ne pouvait
lui ôter de l’esprit que sa vieille bique de rivale avait trouvé la
mort par prétention – « Elle a toujours voulu péter plus haut
que son c…  », dit-elle à sa fille aînée. Et, jusqu’à sa
propre mort, deux ans plus tard et en des circonstances toutes
naturelles, elle resta persuadée que feue la duchesse douairière de
la Rable du Puy avait eu la « prétention » de parlementer
avec ces barbares analphabètes.
    Ces événements ne furent pas sans répercussion sur la destinée
du jeune Louis-Marie de la Rable du Puy, puisqu’il décida, peu
après Noël, de renoncer à sa vocation ecclésiastique, jugeant
peut-être que le double martyre du cardinal et de sa grand-mère
rendait superflu son propre sacrifice.
     
     
    Si la fin tragique de la duchesse douairière et de son cousin le
cardinal frappa donc grandement les esprits du Faubourg, elle n’en
fut pas moins un bien modeste événement eu égard aux conséquences
historiques de la marche sur Rome des partisans de Mussolini, qui
en avait pourtant été la cause. Mais, en moins de quinze jours,
même le Faubourg avait oublié le sort de la duchesse douairière de
la Rable du Puy au rappel, le 11 novembre, des morts par centaines
de milliers de la Grande Guerre.
    Ce 11 novembre 1922, qui était également un samedi, était
particulier car il inaugurait le 11-Novembre férié.
    À onze heures du matin, pour la première fois, tous les
citoyens, jeunes et vieux mêlés, étaient conviés à se réunir devant
le monument aux morts de leur commune dans la plus grande
solennité.
    De ces monuments, il y en avait de toutes sortes et ils avaient
poussé tels des champignons après une bonne pluie.
    Dans la foule qui les entourèrent, le noir des veuves
prédominait et il aurait occulté la présence des éclopés de guerre
si l’on n’avait songé, dans la plupart des cas, à les mettre sur le
devant, et nul – qu’il eût à pleurer un mort ou non, même à maudire
la guerre – ne put s’empêcher de tressaillir lorsque retentit la
sonnerie aux morts.
    Ces monuments étaient en quelque sorte des cimetières laïques
miniatures, mais les pauvres et les riches s’y trouvaient mêlés,
contrairement aux cimetières de bonne terre chrétienne, dans la
plus stricte égalité républicaine – et par ordre alphabétique pour
qu’il n’y eût pas de tricherie possible. Toutefois, l’on
reconnaissait malgré tout les morts des basses classes au fait
qu’en général leur patronyme y figurait par deux ou par trois, ce
qui était rarement le cas pour les notables.
    Mme de La Joyette avait fait tout exprès le déplacement depuis
Paris avec ses filles et son neveu. Elle avait trouvé l’exercice
des plus pénibles, mais elle devait à ses gens d’être présente à la
cérémonie car l’existence de tous les habitants de la petite
commune dépendaient peu ou prou de l’activité du domaine des De La
Joyette, et cela depuis des temps immémoriaux, bien avant même
qu’un ancêtre des De La Joyette n’entrât en possession de ces
terres.
    Pourtant, ils étaient les descendants de ces mêmes paysans qui
avaient tenté de mettre le feu au manoir durant la « Grande
Peur » et qui n’en avaient été dissuadés que par l’annonce de
l’arrivée imminente de la milice bourgeoise de la ville.
    Avec la Révolution, certains avaient acquis des terres, d’autres
pas. Mais, depuis, tous les maîtres du domaine, génération après
génération, les avaient vus en grignoter patiemment des parcelles.
Certes, on ne leur cédait pas les meilleures terres, mais tout de
même, son beau-frère, le mari d’Éléonore et régisseur du domaine,
était-il si avisé que cela en leur en cédant toujours
plus ?
    Il avait fait l’acquisition d’un nouveau tracteur et ne jurait
toujours que par les Américains et leur culture intensive sur de
grands espaces. Et Éléonore, pourtant née de La Joyette, lui
donnait raison en cela alors qu’elle lui avait reproché, à elle
Mathilde, ce qui avait été cause d’une longue fâcherie entre elles
deux, de vendre quelques bois et parcelles lorsqu’elle avait choisi
de s’établir à Paris !
    Éléonore avait-elle contaminé son mari avec ses idées
« avancées » ?
    Sa belle-sœur prétendait le
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