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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle
Autoren: Jacqueline Duchêne
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carrosses décorés de plusieurs rangs de gros clous en bronze sur l'impériale, et d'un fauteuil au lieu des chaises à dossier droit des autres dames ?
    Quel besoin de s'achamer contre les Condé, de vouloir prendre le pas sur les femmes de cette famille, en toutes circonstances, même les plus futiles, en passant une porte ou en montant dans une voiture ? Quel besoin de dénigrer les actions de leur grand homme, le jeune prince, le brillant vainqueur de Rocroi ?
    Parce qu'elle était jalouse, simplement. Parce que la douairière de Condé était une amie proche de la reine et que la jeune fille enviait leur connivence née de leur égalité d'âge et de goûts. Parce que, aussi, le prince portait ombrage à la réputation militaire de son père.
    Alors elle s'appliquait à se montrer odieuse envers le clan rival et détesté. Quand Condé eut gagné la bataille de Mardick, décisive mais terriblement meurtrière, elle dit très fort, au Te Deum que l'on fit chanter à Notre-Dame pour la victoire : « Il eût mieux valu faire chanter un De profundis.  »
    La régente détestait ce genre de provocations. Anne-Louise aurait voulu la première place dans son cœur. Après ses fils, à la rigueur ! En fait elle ne parvenait qu'à la mécontenter.
    La tante d'Angleterre, en revanche, s'empressait toujours auprès de sa nièce. Le trésor de son époux Charles I er était vide. Ce n'était pas la pension que la bonté d'Anne d'Autriche lui octroyait qui pouvait financer la lutte contre les républicains de Cromwell. Après les cérémonies fastueuses de l'installation de la reine déchue en France, sa cour s'amenuisait. Rien d'étonnant à ce qu'elle recherchât la compagnie de la riche héritière.
    L'arrivée de son fils en août 1646, marquée par trois jours de divertissements à Fontainebleau avec chasse, bals et festins de gibier, redoubla son ardeur. Elle arracha Anne-Louise à l'une des cavalcades en forêt, qu'elle prisait, pour lui présenter en petit comité son rejeton.
    — Enfin, voici Charles, prince de Galles, l'aîné de mes enfants, et votre cousin. N'a-t-il pas un air de son oncle Gaston ? Ne le trouvez-vous pas charmant, Mademoiselle ?
    La jeune fille en convint. Ses dix-neuf ans n'étaient pas insensibles à la séduction du prince qui en avait seize. Il était grand, élégant, ses cheveux bouclés et ses yeux noirs en amande le rendaient agréable à regarder.
    — Dommage pourtant, Madame, qu'il ne parle ni n'entende le français.
    La reine n'osa la détromper. Son fils, léger et farceur, avait inventé cette fable pour se dispenser des conversations ennuyeuses et des politesses accablantes, alors qu'il connaissait la langue française, jusque dans ses moindres raffinements.
    Sans se démonter, la mère vanta longuement l'exquise civilité de son fils.
    — Dieu sait le nombre de visites qu'il a rendues à des princesses ! Mais, parmi toutes, il semble qu'il n'ait vu que vous, Mademoiselle. Il me parle sans cesse de vous.Je le crois votre amoureux car, si je ne le retenais pas, il viendrait dans votre chambre à toute heure.
    — Vraiment, Madame ?
    Anne-Louise trouvait son temps long. Cette insistance maternelle l'ennuyait. Elle ne savait rien de ce Charles. En outre, il demeurait muet, planté au côté de sa mère comme un échalas dans une vigne. Au moins, s'il avait su le français, ils auraient pu échanger quelques mots. Elle l'aurait jugé.
    Par politesse, elle se forçait à sourire... Mais, derrière ce sourire, c'étaient les millions de l'héritière que la tante imaginait, ses rentes, ses châteaux, ses prés, les redevances de ses fermiers, les coupes de ses bois, les récoltes, ses troupeaux de moutons et de bovins, les bijoux fabuleux des Montpensier, toute cette fortune qu'il aurait été si facile et si utile de convertir en bons petits soldats anglais, courageux et fiers de chasser hors du royaume l'infâme racaille de Cromwell.
    — Vraiment, Mademoiselle, vraiment, insista la mère. Il vous trouve fort à son gré. Et la seule chose qui le chagrine, c'est que l'impératrice vient de mourir. Ne risquez-vous pas d'épouser l'empereur ?

4
    Les deux cousins
    On lui avait monté la tête. Juste avant l'arrivée de Charles en France, l'impératrice, sœur d'Anne d'Autriche, était morte à quarante ans, épuisée par ses nombreuses grossesses. On avait persuadé Mademoiselle qu'elle devait prendre sa place et épouser l'empereur d'Allemagne.
    Qui, on ? La Rivière et
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