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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle
Autoren: Jacqueline Duchêne
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le baron de Saujon, tous deux attachés à la maison du duc d'Orléans et pas fâchés d'aider à la gloire de sa fille. Cela pouvait à terme leur rapporter gros ! Refusant de considérer que l'empereur combattait la France les armes à la main, la naïve s'était laissé prendre au piège de la vanité et de l'Empire. Comme pour le roi d'Espagne, Mazarin ne consentirait jamais à ce mariage.
    Emportée par son rêve, Anne-Louise regarda donc le pauvre prince Charles avec pitié. Tout l'hiver, à Paris, il eut beau être aux petits soins, garder, sous la pluie battante ou le vent glacial, la tête découverte devant elle, la raccompagner dans son carrosse, s'asseoir auprès d'elle à la comédie,rien n'y fit. Un fuyard, le fils d'un roi détrôné et d'une mère devenue mendiante par nécessité, voilà comme elle le voyait. Imaginant sans cesse en contrepoint la gloire de l'Empire.
    Pour la fête que Mme de Choisy, la femme du chancelier de Gaston, donna fin décembre en l'honneur de Mademoiselle, mère et fils se surpassèrent. La première vint elle-même voir parer et coiffer la jeune fille, pendant que le second tenait un flambeau pour mieux éclairer l'héritière.
    Il n'avait pas omis d'assortir sa « petite oie », rubans, bas, chapeau, nœud de l'épée et gants, aux couleurs d'Anne-Louise, incarnat, blanc et noir. Il se pressa d'arriver chez Mme de Choisy avant elle pour l'aider à descendre de carrosse. Quand elle s'arrêta dans une chambre pour ajuster sa coiffure, il la suivit pas à pas. Pour ne plus la quitter de la soirée.
    — Sans entendre le français, il devine tout ce que vous dites, Mademoiselle, assura le prince Rupert, qui servait soi-disant d'interprète à Charles.
    Elle fut surprise, mais pas fâchée.
    Elle fut davantage surprise encore quand, de retour au logis, Charles la raccompagna jusque dans sa chambre. La galanterie s'arrêta là, mais dura tout l'hiver. On en parla. Cela ne lui déplut pas.
    Au Carnaval suivant, son plaisir fut à son comble. Ses douze lingères et trois de ses femmes de chambre travaillèrent quatre jours durant aux dernières finitions de sa robe. Du velours noir bordé d'hermine qui mettait en valeur ses cheveux blonds et son teint clair. Quantité de diamants et de rubis cousus sur le corsage et, fixées sur la jupe, des petites houppettes de plumes rouges et blanches.
    Dans sa chevelure, des aigrettes de même couleur retenues par une chaîne de diamants semblaient en surgirtelles les fleurs d'un bouquet. Comme si tout cela ne suffisait pas, la mère de Charles avait tenu à lui prêter une paire de pendants d'oreilles, seul reste des bijoux de la couronne d'Angleterre qu'elle avait dû vendre pour subsister...
     
    Lorsque la jeune fille pénétra dans la salle du Petit-Bourbon, située au bord de la Seine, à côté du Louvre, les spectateurs étaient déjà là, les yeux pointés sur elle.
    — Quelle toilette ! glissa un marquis à ses voisines. Pour l'acheter, il y faudrait tous les impôts d'une province.
    — On dit que le spectacle sera un vrai régal. Le cardinal Mazarin fait représenter pour la première fois Orfeo de Luigi Rossi, une comédie à machines et en musique, à la mode d'Italie.
    — Un opéra, doit-on dire, affirma Mme de Motteville.
    — Un régal, vous croyez ? murmuraient certains, méfiants.
    — Quelle belle salle, en vérité ! Toute dorée, avec ses peintures en perspective, ses quatre énormes chandeliers en cristal. Et le trône, tout au bout, en haut des trois marches, avec son dais de toile d'or et d'argent... Et les sièges juste au-dessous. Comment vont-ils se placer ?
    — Chut, le petit roi arrive. Pas très grand pour ses neuf ans ! Mais joli avec son habit brodé et rebrodé de perles. Le prince de Galles l'accompagne.
    — Oh, regardez ! Le roi cède sa place sur le trône à son cousin Charles.
    — Mais que se passe-t-il ? Le prince s'incline devant Mademoiselle et lui cède à son tour le trône. Quelle galanterie !
    C'était vrai. Pour éviter les disputes de préséance, ils laissaient la place d'honneur à leur cousine.
    Alors, Anne-Louise se sentit la reine de la fête. Nulle princesse de la maison de Condé pour lui faire ombrage. Elles étaient en deuil du vieux prince. Une chance pour la jeune fille.
    Elle se vit pendant tout le spectacle seule sous le dais royal, avec le roi et le prince de Galles à ses pieds. Et Dieu sait que le spectacle fut long. Six heures !
    Pendant ce temps, l'ombre de
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