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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince
Autoren: Jocelyne Godard
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temps, se leva et reprit son rang parmi
les autres danseuses.
    La durée du trajet en barque sacrée dura jusqu’au
moment où le zénith éclaira de plein fouet le ciel.
    Un peu plus tard, la reine faisait son entrée
dans les rues de Thèbes. Le char de Thoutmosis côtoyait toujours le sien. Un
jour, ils partageraient le même, reléguant Méryet à l’arrière et distribuant
ensemble les gestes qui plaisaient à la foule.
    Agacée, elle eut un léger pincement de lèvres
quand elle vit que sa fille regardait encore Thoutmosis avec ce geste d’extase
qui n’échappait plus à la foule. Pourtant, celui-ci n’attachait pas ses yeux
sur ceux de la princesse et, à nouveau, Hatchepsout regretta la mort de
Néférourê qui avait toujours su forcer l’admiration de Thoutmosis.
    Lorsque la main de sa mère tira sur son bras,
Mérytrê eut un soubresaut et revint à ses devoirs de princesse. Elle s’efforça
de sourire au peuple. Mais, dieu que cela était fatigant !
    En fait, Mérytrê n’était guère exigeante. Elle
désirait que cette journée harassante en finisse, que ses habitudes simples et
quotidiennes reprennent au plus vite et que ses suivantes l’accompagnent à
nouveau dans ses jeux, ses promenades et ses discussions qui n’allaient pas plus
loin que les préoccupations journalières du palais.
    À présent, les chars empruntaient la grande
voie qui menait à la place centrale de la ville. Celui d’Hatchepsout filait à
bonne allure, les roues crissaient sur le dallage de pierre.
    C’était la seule portion du trajet où les
attelages devaient se hâter. Tout à l’heure, ils atteindraient la place et,
dans un brouhaha indescriptible, commencerait l’interminable file qui les
encerclerait jusqu’à les étouffer.
    Des milliers d’hommes et de femmes se pressaient
sur les bords du chemin. Ils riaient, criaient, se heurtaient parfois
violemment, tapaient dans leurs mains encore poisseuses du sucre des dattes ou
du miel des galettes qu’ils venaient d’absorber. Ils frappaient le sol d’un
pied agité, nerveux. Certains, d’un coup de genou habile, délogeaient le voisin
pour mieux apercevoir le passage des chars.
    Et la foule s’épaississait d’heure en heure.
    Dans tout Thèbes, c’était un jour de fête. Les
commerçants fermaient leurs échoppes et, seules, les auberges et les tavernes
offraient leurs tables, leurs vins, leurs chambres aux provinciaux de passage
venus pour saluer la famille royale.
    En ce jour férié, même les paysans des
environs avaient le droit de ne pas travailler. Les champs de céréales, les
plantations de papyrus, les jardins de fruits et de légumes se passaient pour
un jour d’eau et de soins.
    Le conducteur du char d’Hatchepsout connaissait
bien son métier et menait d’une main de maître son attelage à trois chevaux. En
vérité, il était fort envié pour ce privilège. Conduire ainsi la reine dans
tous ses déplacements, ses voyages, ses pérégrinations personnelles et
professionnelles lui attirait certaines jalousies qu’il préférait ne pas
remarquer.
    Youry avait un large buste, musclé, puissant
où chaque épaule roulait comme celles d’un lutteur de compétition en plein
exercice. Ses cuisses râblées, ses jambes fermes couvertes d’un épais poil noir
et frisé s’arrimaient solidement au plancher de bois qui recouvrait la petite
esplanade sur laquelle il se mouvait pour mener l’attelage.
    Youry n’aurait pas changé de travail pour tout
l’or d’Égypte. Peu importe – on l’a dit – si ses compatriotes l’enviaient
et, plus encore, si quelques-uns d’entre eux cherchaient à déstabiliser sa
carrière prometteuse.
    Conscient de l’importance de sa tâche, Youry
tenait les rênes avec cette assurance qui l’avait toujours caractérisé. Même
Thoutmosis, parfois, n’arrivait pas à le distancer. À trois reprises, ils
avaient engagé une course et Youry l’avait emporté par deux fois.
    La chaleur était à son apogée. Pas un souffle
d’air ne remuait les plis des tuniques ou des pagnes. De temps en temps, Youry
jetait un coup d’œil sur ses deux passagères et s’assurait du bon équilibre qu’elles
gardaient lorsque leurs mains quittaient la rambarde pour s’agiter dans l’espace
à la rencontre de la foule.
    Quand le char de Thoutmosis le rejoignit –
car dans le virage qui amorçait l’entrée de la place il avait pris un léger
retard – la vitesse des attelages était au maximum.
    Youry entendit
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