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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince
Autoren: Jocelyne Godard
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puisse dépasser ses minces prérogatives.
Que de questions ambiguës quand elle n’arrivait pas encore à résoudre la simple
question du mariage de sa fille avec Thoutmosis !
    — Allons, fit Hatchepsout, je crois que
nous avons besoin de discuter ensemble. C’est par ma propre fille que je vais
apprendre ce qui se passe dans le harem.
    Elle tourna subitement son visage vers celui
de l’adolescente.
    — Aimes-tu Satiah ?
    — Oui, Mère. Hélas, je ne suis pas aussi
brillante qu’elle.
    — Pourquoi dis-tu cela ?
    Mérytrê passa une main aux doigts longs,
presque diaphanes, sur son front moite. Elle leva les yeux au ciel et regarda
sa mère.
    — Parce qu’elle réussit tout ce qu’elle
entreprend.
    — Par exemple ?
    Mérytrê réfléchit.
    — Elle nage, elle tire à l’arc, elle
conduit les chevaux, elle manœuvre les barques. Tout l’émerveille, tout la fait
vivre et bouger.
    Elle soupira et jeta dans un souffle :
    — Elle est belle et je crois que
Thoutmosis la préfère à moi.
    Encore une vérité qui devait longtemps abasourdir
Hatchepsout. Pouvait-elle supposer un instant, le jour où elle avait conseillé
à Séchât de laisser sa fille au Palais, qu’elle supplanterait sa propre fille, la
princesse royale ?
    — Que veux-tu dire ? s’enquit-elle
aussitôt.
    — Que Thoutmosis rit toujours avec elle,
jamais avec moi. Qu’il lui propose sans arrêt des parties de tir à l’arc, des
courses de natation, des promenades sur le Nil. Je sais qu’ils se cachent dans
les marais de papyrus pour discuter ensemble.
    La reine posa son bras sur les épaules de sa
fille.
    — C’est toi, Mérytrê, qui a le sang
royal. Ne l’oublie pas. C’est toi qui engendreras un vrai pharaon. Et
Thoutmosis le sait. Tu n’as donc rien à craindre.
    La fillette sourit. Sa mère venait de lui redonner
courage.
     
    *
    * *
     
    — Le char royal est prêt, Majesté. Votre
fille attend avec ses suivantes.
    Depuis le retour de son voyage au Pays du
Pount, c’était le premier passage officiel de la pharaonne dans les rues de
Thèbes.
    Déjà compacte, la foule grouillait, criait, s’agglutinait
jusque dans les ruelles les plus sombres et vers les places les plus éloignées
qui menaient toutes au port, là où débouchait la voie conduisant à la barque
sacrée.
    Les prêtres d’Amon, les porteurs d’offrandes
et tout le personnel du temple de Karnak s’y étaient déjà réunis, attendant qu’Hatchepsout
les assure de son soutien et que, face à la foule, elle sollicite de la
bienveillance des dieux la prospérité nécessaire à son peuple.
    Chanteurs, musiciens et danseuses s’intégraient
toujours aux festivités sacrées qui se déroulaient en faveur d’un pharaon.
Hatchepsout était le quatrième de sa dynastie et, malgré les heurts qui l’avaient
opposée à la dernière séance du conseil, elle comptait bien poursuivre les
traditions ancestrales de son pays.
    Hatchepsout connaissait toutes les phases successives
de la journée pour les avoir suivies maintes fois, adolescente avec son père,
puis jeune épouse avec son demi-frère et seule, enfin, levant devant la foule
le sceptre du pharaon des deux Égyptes.
    Après son arrivée sur le port, juchée sur son
char caparaçonné d’or, de cornaline et de turquoises, elle ferait une courte
halte sur le port, balancée tranquillement de droite à gauche sous le dais de sa
litière couleur de lapis-lazuli puis, acclamée par la foule en délire, elle
monterait majestueusement sur la barque royale.
    Sans être long, car il se terminait à l’autre
bout du port, ce voyage symbolique était empreint d’éclat et d’autorité, car il
reflétait toute la sagesse du Nil jointe à la générosité des dieux envers son
peuple, engendrant ainsi la richesse que le limon fertile apportait à la terre.
    Ensuite, Hatchepsout devrait redescendre de la
barque, reprendrait sa place sous le dais de la litière que tireraient quatre
chevaux – les plus beaux de l’écurie royale – et les acclamations se
poursuivraient jusqu’à ce que les rayons solaires entament de leur pesanteur un
ciel impitoyablement bleu.
    Mais, pour l’instant, l’heure de midi était
encore loin. Après un tour complet de la ville en compagnie de sa fille, car ce
jour-là, Hatchepsout avait jugé bon d’accomplir ce que son père avait fait pour
elle lorsque, adolescente, elle bouillait d’impatience d’être présentée à son
peuple.
    La foule devait à présent
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