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L'holocauste oublié

L'holocauste oublié

Titel: L'holocauste oublié
Autoren: Christian Bernadac
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mi-mollet, des chaussures dépareillées. L’impression de détresse, de misère qui se dégage de ces épaves bouleverse Pierre. Parmi eux se trouvent des tsiganes, des musiciens qui jouaient, naguère, à l’Opéra : tous sont dans un état de délabrement physique qui confine de l’état de cadavre. Rozan se demande comment ces malheureux tiennent debout.
    — Ils sont arrivés à Dora, avec ceux d’Auschwitz, par trains de marchandises successifs. Ces convois possèdent des wagons dits spécialisés ; exemple : le wagon de lunettes, le wagon de bottes d’enfants, le wagon de chaussures d’adultes, etc. entre autres, un wagon d’instruments de musique. C’est comme ça ; on ne pourra jamais délimiter les bornes de la folie nazie ! Organisation ! Organisation !
    — Comme les invités du commandant du camp et le commandant lui-même éprouvent le besoin d’entendre de la musique, un officier S.S. demande à un soldat d’accompagner au magasin les musiciens, afin qu’ils choisissent leur instrument et qu’ils reviennent jouer, là, sous leur fenêtre.
    — Ainsi fut fait.
    — L’orchestre se forme et voilà les gueux, minables, hâves, crasseux, agoniques, les doigts gourds, qui jouent à la demande, pendant que les officiers S.S. boivent, gueulent, rient grassement. Le contraste dépasse tout ce que le cinéma expressionniste allemand a pu inventer. Parfois un officier hurle : « Jouez mieux, bande de salopes, sous-hommes, Stücke. » Les loqueteux s’appliquent davantage, essayant d’éviter que les menaces ne soient mises à exécution. C’est un spectacle de désolation que la musique, quand elle est gaie, dramatise plus encore !
    — Ce concert en plein jour, ce concert qui durera des heures est demeuré dans la mémoire de Pierre Rozan… Avoir assisté, atterré, à cette mascarade et n’avoir rien pu faire.
     
     
    Bergen-Belsen.
     
    Dans tous les coins derrière chaque baraque, dans les fossés gisent des cadavres. Les morts-vivants qui croupissent en attendant leur heure, sont chassés chaque matin à 5 heures, dans la nuit et le froid, pour l’appel. Ils y restent facilement quatre heures de rang. Quand l’épreuve est terminée, nombreux sont ceux qui gisent sans vie dans la boue…
    — Un jour nous voyons arriver des femmes venues de Ravensbrück, presque toutes « aryennes », évacuées en raison de l’avance russe. Parmi elles nous voyons des femmes tsiganes, une trentaine environ, formant les derniers rangs et portant dans les bras leur bébé mort de faim pendant le voyage. Les S.S. qui les comptent à l’entrée de la section, demeurent perplexes :
    — « Faut-il compter les bébés morts ou non ?
    — « Pas la peine, dit l’un avec un rire gras, ils ne s’évaderont pas ! »
    — D’ailleurs beaucoup de ces femmes tsiganes arrivent avec de nombreux enfants de tout âge.
    — Avec tous ces transports qui confluent sur Belsen, ce camp devient une véritable tour de Babel. On y voit de tout : Espagnols, Russes, Grecs, Italiens, Français, Belges, Hollandais, Norvégiens, Mongols, Usbeks, des gens du Grand Nord russe, un Chinois de Canton, des Arabes, des Tchèques, des Hongrois, et même un Sénégalais et un Martiniquais !
    — Le ravitaillement devient de plus en plus mauvais et l’on commence à découvrir des cas de cannibalisme. Les premiers sont pendus par les S.S. Il en est un, un jour, qui, trouvé avec un foie d’homme dans sa musette, déclare tranquillement :
    — « Es war mir Schade dass ein so gutes Fleisch verbrannt wurde. » Pour ceux qui comprennent l’allemand, la saveur de cette réponse sera bien meilleure. La traduction française ne peut la rendre aussi puissamment :
    — « Cela me faisait de la peine qu’une si bonne viande soit brûlée. » C’était un docteur, juif polonais !
    — Par la suite, ceux qui sont découverts sont pendus par les détenus eux-mêmes à une poutre dans le coin de quelque baraque.
    — Il me faut citer ce Russe pris alors qu’il dépeçait un mort, que les S.S. laissèrent à genoux devant le poste de contrôle pendant plusieurs heures avec entre les dents l’oreille du cadavre qu’il était en train de découper.
    — Puis on n’y fait même plus attention. Nombreux sont les morts dont le ventre a été incisé pour enlever le foie. Le foie et la fesse sont les morceaux les plus prisés par les anthropophages. J’ai vu un cadavre rester quatre jours dans la cour
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