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L'holocauste oublié

L'holocauste oublié

Titel: L'holocauste oublié
Autoren: Christian Bernadac
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travail, car la plupart, couverts d’excréments, sont comme pétrifiés, raidis, crispés, enchevêtrés les uns dans les autres ; et si bien agglutinés que, lorsqu’on en tire un, il en vient une grappe. Enfin, tout est jeté sur le ballast.
    — Les survivants, tenant à peine debout, doivent alors charger les cadavres sur les quatre chariots. Par-dessus les tas, les S.S. lancent les corps aux têtes éclatées des petits enfants. Un ordre, des vociférations, des coups de « gummi », des cris de douleur, des râles, et le convoi reprend le chemin du camp, les « anciens » toujours à huit par voiture, tirant les chariots, les « nouveaux » les poussant, ou, trop épuisés, s’y accrochant et se laissant traîner. Quelques-uns tombent. Ils sont aussitôt achevés d’une balle dans la nuque et vont grossir le tas sans pour cela arrêter le convoi qui chemine péniblement, laissant derrière lui, dans les traces de sabots ou de pieds nus, une longue traînée de sang et d’humeurs diverses qui dégouline des chariots.
    — Au moment où nous entrons dans le camp, un « Posten » nous arrête :
    — « Gaillard.
    — « Présent.
    — « Zum Kommandants ! »
    — Les S.S. s’agitent, s’interposent. Le « Posten » exhibe un papier : l’ordre est formel. Gaillard est donc cueilli dans les brancards et, tandis que la colonne se dirige vers le fond du camp, il est conduit au bureau.
    — Le commandant l’attend.
    — « C’est vous Gaillard ?
    — « Oui.
    — « Vous êtes architecte ?
    — « Oui.
    — « Alors, vous savez dessiner ?
    — « Oui.
    — « Pouvez-vous faire un portrait ?
    — « Oui.
    — « Voulez-vous faire le mien ?
    — « …
    — « Alors, commencez tout de suite, je vous ai préparé ce qu’il faut. »
    — Sur une table, du papier à dessin, d’ailleurs de bonne qualité, des crayons, de diverses duretés, tous taillés. Et la séance commence immédiatement.
    — Au bout d’une heure on apporte une collation : pain et margarine, frugale et légère, mais quand même aubaine inespérée. Une heure de travail encore, et le portrait est achevé. Le commandant est enchanté du résultat, et pour témoigner sa satisfaction à l’artiste lui fait apporter son cachet : en l’occurrence quelques victuailles : deux pains, un saucisson, un morceau de fromage.
    — Serrant précieusement ces trésors inestimables, qu’il désire partager avec ses compagnons de misère, Gaillard regagne son Block, mais à peine y a-t-il fait quelques pas que des camarades se précipitent vers lui, affolés, les yeux exorbités.
    — « Gaillard !
    — « Surtout n’entre pas ! Fous-le camp ! vite ! et cache-toi ! Ils te cherchent ! »
    — Sans comprendre, Gaillard s’enfuit, gagne le Block voisin, qui est prévenu. Vite, on le cache, et c’est là qu’il apprend la suite de la tragédie.
    — Dès son entrée dans le camp, le convoi s’est dirigé vers le « Vestiaire » où les tsiganes encore vivants furent poussés. Les malheureux ignoraient l’horrible euphémisme : c’était en effet un vestiaire, mais un vestiaire où l’on ne faisait que se déshabiller, car la salle contiguë était la chambre à gaz.
    — Pendant qu’on exterminait la fournée, les trente et un chevaux restants, toujours traînant les chariots, contournèrent le bâtiment et en gagnèrent la sortie. En face, c’était le four crématoire. Ils y déchargèrent les cadavres entassés sur les véhicules, et y ajoutèrent bientôt les autres, fraîchement sortis de la chambre à gaz.
    — Quand tout fut terminé, les S.S. voulurent effacer toute trace du crime. Pour cela, il ne devait rester aucun témoin. Les « chevaux » furent donc rassemblés, et ils subirent le même sort que les malheureux tsiganes : chambre à gaz, puis four crématoire. Mais il en manquait un, qu’il fallait à tout prix retrouver pour préserver le secret de l’opération. À partir de 19 heures, une impitoyable chasse à l’homme fut organisée. Appels, contre-appels, fouilles, tout fut mis en œuvre. L’ingéniosité et le dévouement des camarades rivalisaient avec la nervosité et la sauvagerie des S.S. car tous sentaient que la fin approchait. Des signes indéniables annonçaient qu’il fallait à tout prix gagner du temps. Ce fut une véritable course contre la montre… contre la mort.
    — Enfin, à 23 heures, rassemblement général, mais cette
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