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L'holocauste oublié

L'holocauste oublié

Titel: L'holocauste oublié
Autoren: Christian Bernadac
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travail.
    — Tiens, voilà Germain ! C’est un électricien civil français, requis à Figeac dans le Lot où j’ai de la famille qu’il connaît. Pour une autre firme, il surveille l’électricité de la galerie « A ». Je lui laisse d’un commun accord le travail le plus difficile. Il nous donne quelques informations recueillies à Vienne, où il a été dimanche. Il nous parle des effets des bombes au phosphore, les nouvelles militaires ne sont pas celles que nous attendons. Ça ne va pas vite. Le V.1 ? Moi je n’y crois pas. C’est de la propagande allemande. Je suis persuadé d’autre part qu’Hitler est mort au cours de l’attentat de juillet.
    — Il nous parle de son amie, une Russe dont il est emballé. Elle est infirmière pour les ouvriers requis au chantier. Il faut parler avec des « civils » pour aborder une telle conversation. En enfer, l’amour n’a pas d’attrait.
    — Mais des cris attirent notre attention, Germain va voir en éclaireur. Il nous raconte à son retour : c’est l’Oberkapo tsigane Houli qui assomme à coups de bâton un Russe surpris à échanger ses vêtements contre ceux d’un civil. D’après la description, la victime d’Houli est touchée à mort. Carette nous raconte alors que tout à l’heure il a vu Houli arriver aux cabinets construits de quelques planches à l’extérieur de la mine. Il était furieux de voir autant de monde, la culotte baissée, assis sur la barre de 5 ou 6 mètres derrière laquelle, sur la même longueur et sur 1 mètre de large, une fosse se remplit lestement des défécations des malades. Un Italien maigre ne s’est pas levé comme les autres s’enfuyant la culotte à la main sous les coups de bâton. Houli l’a attrapé par les pieds et l’a balancé dans la fosse. Le malheureux s’en est tiré difficilement pour aller se laver à l’eau glacée qui suinte de la mine et arrive canalisée jusqu’à l’extérieur. Il fut obligé de remettre des vêtements tout humides sur lui. Il mourut deux jours après au Revier.
    — Houli jouit physiquement quand il frappe. À côté de ça, le même Oberkapo, le jour de l’incendie de la mine, est rentré dans les galeries enfumées et a sauvé l’un de nos camarades français qui était Kapo. Un bon Kapo. Il le traîna alors qu’il était évanoui au risque d’y rester lui-même.
    — Un jour où nous prenions le train, je trébuche sur la première marche du wagon ; mes lunettes tombent je suppose entre le quai et la voiture. Houli était le seul à avoir le droit de descendre sur la voie. Pendant plus d’une minute à croupetons, il cherche mes lunettes. Ne les trouvant pas il a vraiment l’air désespéré. Mes lunettes avaient sauté sur le plancher du wagon et mes camarades les avaient piétinées…
    — À midi, c’est la soupe. La lumière coupée trois fois de suite prévient tout le monde jusqu’au fond. Chacun arrive sa précieuse gamelle à la main. C’est, paraît-il, de la soupe aux haricots.
    — Les bouteillons sont là, alignés, et nous, derrière attendons en colonne. Le Kapo hongrois sert à droite, le Kapo polonais à gauche. Le Hongrois a un meilleur coup de louche, tout le monde le sait. Et tout le monde est de son côté. Mais le bouteillon du Kapo polonais est incontestablement plus épais. Sa file va se renforcer sans qu’il ait besoin de schlaguer. Carette passe avec lui, moi avec le Hongrois. La soupe est vite savourée, elle n’est pas mauvaise, mais beaucoup trop liquide ; je compte combien d’haricots sont au fond de ma gamelle : dix-huit. Carette arrive tout fier en effet, la sienne est beaucoup plus belle ; il a bien cinq ou six cuillerées de haricots.
    — C’est fini, les gamelles sont léchées. Il faut regagner le travail et les surveillants nous chassent à coups de bâton. Nous montons sur notre observatoire et nous voyons, la faim tirant notre estomac, les Kapos et les surveillants happer de pleines cuillerées de haricots. Il y a toute une science pour distribuer la soupe, et les Kapos l’apprennent vite. Voici la tactique : ne pas trop remuer, servir le liquide qui se trouve au-dessus, quand on arrive à la fin, passer au bouteillon suivant en gardant le fond pour soi. Quand, repus, il reste encore de la bonne soupe, ils vont la vendre deux ou trois cigarettes à un camarade affamé et non-fumeur.
    — Mais le temps passe vite, encore quelques réparations à effectuer et c’est la fin du travail à
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