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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi
Autoren: Mireille Calmel
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étroites rues de Londres, Cecily s’accroupit sur le bas-côté et releva le col du manteau de sa fille, l’œil tendre et ému.
    — Pour l’amour de moi, Mary. Et pour le tien. Car tu es dans ce monde ma seule fierté, mon seul courage et sans aucun doute ma seule raison de vivre.
    C’était pour sûr l’unique vérité que Cecily n’exagérait pas.
     

2
     
     
    M ary ne réussit pas à aimer lady Read.
    Malgré ses élans de tendresse et l’attention responsable dont la vieille dame la couvrait, elle demeura une étrangère. Une ennemie. Parce que Mary était l’unique univers de Cecily, Cecily demeurait son unique univers. Rien n’importait plus à Mary que de voir sa mère sourire, danser, rosir d’un fard et chantonner en l’entraînant à son bras comme un galant.
    « Ma fille, tu es l’homme de ma vie ! » proclamait Cecily dans ce joyeux désespoir qui faisait d’elle cette personne merveilleuse que Mary, seule, pouvait comprendre.
     
    Cet après-midi-là, lady Read reçut une de ses relations mondaines, veuve comme elle depuis peu. Mary, réfugiée comme à l’accoutumée en cuisine, attendait l’arrivée de son précepteur, se régalant d’un cake aux senteurs de vanille.
    — J’adore tes gâteaux, Jenny, lui fit-elle compliment en enfournant une deuxième portion.
    En quelques mois, Mary avait retrouvé un teint rosé sur ses joues de nouveau rondes. De même, grâce à la pension que lady Read versait, Cecily avait meilleure mine. Elles avaient aussi déménagé et, si elles vivaient encore dans une auberge, les meublés demeurant trop chers, celle-ci sentait le propre et les repas y étaient correctement préparés.
    Lady Read n’aimait pas que Mary Oliver se montre lorsqu’elle était en compagnie de ses amies. L’enfant avait appris par cœur tous les règlements de la maisonnée. Ils étaient nombreux, parfois ridicules, à son sentiment. Elle s’appliquait à les respecter, sachant que la moindre de ses erreurs serait prétexte à la faire renvoyer. Il fallait par exemple qu’elle gardât les yeux baissés et les mains jointes dans le dos lorsqu’on lui adressait la parole. Et elle devait refermer consciencieusement et en silence toutes les portes des pièces dans lesquelles elle se rendait ou d’où elle sortait.
    Certaines, d’ailleurs, lui étaient interdites. Du peu qu’elle en voyait, concentré entre la cuisine, le grand et le petit salon, le vestibule, le cabinet de feu sir Edward Read, où on lui donnait ses leçons, la salle d’armes et la salle à manger, Mary avait pu juger que la belle-famille de Cecily jouissait d’une jolie fortune. Les consoles, les coffres, les armoires et les tables étaient de bois précieux, somptueusement sculptés, tournés ou marquetés. Les vases de porcelaine s’ornaient de motifs charmants, subtilement rehaussés à la feuille d’or. Les bougeoirs étaient faits de cuivre ou d’argent et les tapis semblaient si moelleux que Mary n’avait aucun mal à accepter de se déchausser pour s’y promener.
    Elle aurait volontiers exploré l’étage de cette demeure sans jardin, située en plein centre-ville, sachant que plusieurs chambres s’y trouvaient, mais elle n’y était pas autorisée.
    Le petit salon où recevait lady Read était séparé de la cuisine par un étroit corridor qui permettait à Jenny de s’y rendre en quelques pas dès que sa maîtresse actionnait sa clochette. Faisant fi du règlement, Jenny laissait la porte ouverte, pour ne pas que les fous rires qu’elle prenait parfois avec ce garnement de Mary Oliver lui fassent rater ces appels.
    Elle aimait beaucoup cet enfant et estimait injuste la manière dont ses maîtres l’avaient négligé jusque-là. Et Mary, pour mieux l’attendrir et la gagner à sa cause, forçait le trait sur le désespoir de sa mère autant que sur ses innombrables qualités.
     
    Lady Read, ce jour-là, oublia de refermer la porte du petit salon, distraite et agacée par le courrier qu’elle avait reçu de son aîné le matin même. Elle lui avait écrit pour l’informer des dispositions qu’elle avait prises envers Mary Oliver.
    Tobias Read avait poursuivi les affaires de son père, à la mort de celui-ci. Il les avait fait fructifier et rêvait avec ambition de s’octroyer le marché de la marine royale anglaise.
    Il se montrait surpris, contrit et exaspéré par la décision de sa mère, écrivait-il, estimant qu’elle avait perdu sa lucidité et que sa trop grande
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