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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts
Autoren: Norman Mailer
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ils n’en avaient pas enregistré la signification. Et tout à coup ils comprirent que Wilson était mort. La chose les bouleversa, déchaînant à sa suite la familière irréalité de la guerre et de la mort, et leur chant se fit incertain. « Il me manquera ce vieux couillon », dit Polack.
    « Allez, remettons ça, grommela Red. Des gars viennent et des gars s’en vont, et après un temps on se souvient même pas de leur nom.
    « Roule-moi dans l’herbe. »
    Le canot décrivait une courbe et le mont Anaka leur, apparut au loin. Il paraissait immense. « Dis, est-ce que nous avons grimpé ça ? » demanda Wyman.
    Quelques-uns se portèrent contre la lisse, se désignant mutuellement la montagne, discutant pour savoir s’ils avaient gravi telle ou telle des falaises. Ils étaient fiers d’eux-mêmes. « Tu parles s’il est grand, le fils de pute.
    –  On a bien fait de monter aussi haut qu’on a pu. »
    C’était le sentiment général. Déjà ils songeaient comment ils en boucheraient un coin à leurs copains des autres sections.
    « On nous a oubliés dans le grand chambardement. Chacun aura son histoire à raconter.
    – Et comment. »
    Et cela aussi leur plaisait. Le dernier soutien de l’ironie.
    Le chant continuait.
    La demie passée six Elle me faisait des trucs. Couche-moi, Roule-moi, Refais-le me le fais.
    Croft regardait la montagne. L’éléphant inconquis ruminait sombrement au-dessus de la jungle et des collines.
    Tout y était pur et lointain. La lumière déclinante de l’après-midi y levait des verts veloutés et des bleus de roche et des bruns de terre faits d’une tout autre matière que le sol fétide de la jungle.
    Son vieux tourment le consumait de nouveau. Un courant de désirs inexprimables battait dans sa gorge, ravivant la familière et indicible tension que la montagne toujours éveillait en lui. Escalader cela.
    Il avait failli, et il en souffrait profondément. Sa frustration se donnait de nouveau libre cours. Jamais il n’aurait l’occasion de recommencer. Et, cependant, il se demandait s’il aurait pu réussir. L’angoisse et la terreur lui revinrent, qu’il avait éprouvées sur les gradins de l’amphithéâtre. S’il avait entrepris tout seul l’escalade, la fatigue et les autres ne l’auraient pas freiné ; mais, aussi, il eût été tout seul – et il se rendit compte soudainement que, sans eux, il eût été incapable de fournir l’effort. Les collines dénudées avaient de quoi corroder le plus grand des courages.
    La demie passée sept Elle se croyait au ciel…
    Dans quelques heures ils seront de retour, montant leurs tentes dans le noir, recevant peut-être une gamelle de café chaud. Et, le matin venu, la routine sans fin recommencera, jour après jour. Déjà la patrouille leur était étrangère, irréelle, et cependant le bivouac à venir était lui aussi sans réalité. Dans leur vie militaire toute transition était irréelle. Ils chantonnaient, à seule fin de faire un peu de bruit.
    … roule-moi Et refais-le me le fais.
    Croft continuait à regarder la montagne. Il l’avait perdue, et en la perdant il avait manqué quelque terrible révélation de lui-même.
    De lui-même et de bien davantage encore. De la vie.
    Tout.
     
    CHŒUR MUET

DE CE QU’ON FERA QUAND ON LES METTRA
    (Parfois parlé, généralement en sourdine, variant avec les circonstances.)
    Red . – Reprendrai le même foutu turbin de toujours. Est-ce qu’y a quelque chose d’autre ?
    Brown . – Quand on débarquera à Frisco je toucherai ma solde et je me flanquerai la plus formidable cuite de tous les temps,. je me dégoterai une putain et je ferai que baiser et boire pendant deux semaines bien sonnées, puis je m’en irai chez moi dans le Kansas, sans me presser, m’arrêtant où et quand ça me chantera, me payant un bordel de Dieu de bastringue comme t’en as jamais vu, puis j’irai trouver en douce ma femme, je m’en vas pas lui dire que j’arrive, et je lui ferai la grande surprise de sa vie, et y aura des témoins par Dieu, et je la foutrai dehors, et que les gens sachent comment on traite une pouffiasse après qu’on a pourri ici Dieu sait combien de temps sans savoir quand on allait se faire bousiller, pestant et se faisant chier et découvrant des choses sur vous-même qu’il vaut mieux pas savoir.
    Gallagher . – Tout ce que je sais c’est qu’y a un bordel de compte à régler, un compte à régler. Quelqu’un va payer ça, on leur fera
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