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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer
Autoren: Pierre Naudin
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lui en savoir gré et voulut le lui prouver par des bienfaits. Il avait même des raisons de chercher à s’attacher un homme d’un si grand poids dans sa ville, et il vint enfin à bout de forcer Eustache à la reconnaissance. Voilà, ce me semble, ce qui résulte naturellement de la combinaison des faits que je viens de rapporter.
    S’ils diminuent quelque chose à la haute idée que les éloges de quatre siècles semblaient avoir attachée pour jamais à la mémoire d’Eustache, hâtons-nous de rendre à sa famille toute la gloire dont elle se montra digne. Ses héritiers n’imitèrent pas sa conduite ; ils sacrifièrent les avantages qu’ils en auraient tirés aux devoirs de sujets fidèles. Eustache mourut en 1351. Des lettres du 29 juillet de la même année nous apprennent que les biens qu’il avait à Calais furent confisqués, parce que ses héritiers étaient demeurés attachés à leur maître légitime. Édouard, en les privant de ses dons, fit plus pour eux que s’il les en eût comblés. Il rendit à leur nom tout l’éclat que ces mêmes dons, acceptés par Eustache, avaient pu ternir.
    M. de Bréquigny, par ce texte qui ne figura jamais in extenso dans les procès de ses accusateurs, ne semble pas si sévère qu’ils le prétendaient. Pour lui, preuves à l’appui, l’épisode des Bourgeois ressortissait au roman. Tout y était imaginaire, à commencer par les dialogues de Jean de Vienne et des Anglais.
    Jean-Alexandre Buchon qui, en 1852, commenta l’édition des Chroniques de Froissart remarque, à propos des dialogues inventés : Ne peut-on pas faire le même reproche à plusieurs historiens des plus estimés ? Ne devrait-on pas plutôt lui savoir gré d’être le premier de nos écrivains qui ait essayé de sortir de l’aridité de la chronique pour s’élever au ton de l’Histoire ?
     
DES FAITS TROUBLANTS
     
    Plusieurs faits sont troublants, tout de même, à propos de ces bourgeois-martyrs. L’attitude de la reine qui fit confisquer les biens de Jean d’Aire. À son profit. La « bonne reine » ne l’était pas tant qu’on veut bien nous le dire encore ! C’était, elle aussi, une femme de la trempe des trois Jeanne : Montfort, Clisson et Blois-Penthièvre ; elle combattit les Écossais en l’absence de son époux.
    La concession à vie obtenue sur les maisons de Jean d’Aire avec leurs dépendances fut faite à Calais le 24 août 1347. Si l’on se pose tout simplement la question : pourquoi fut-il seul sanctionné ? La réponse va de soi : son attitude fut celle d’un patriote envers ses vainqueurs : digne, peut-être hautaine. Elle tranchait avec la veulerie de ses compagnons. Et notamment Eustache de Saint-Pierre qui obtint :
    1°Une pension de 40 marcs sterling, le 8 octobre 1347, pour service rendu au roi (Édouard) à Calais. On ignore tout sur la nature du service alors qu’on avait coutume, à l’époque, de consigner les raisons d’un bienfait. Mais un fait est patent et M. de Bréquingny l’a souligné : Saint-Pierre demeura jusqu’à sa mort, sous l’occupation anglaise, un notable. Il trépassa dans son lit, à soixante ans. Tant d’autres Calaisiens ne le purent !
    2° La restitution (faite, le 8 octobre 1347), de quelques-unes des maisons qu’il possédait à Calais et qui avaient été confisquées. Il fallait que le service rendu à l’occupant eût été en proportion des biens restitués !
    Et s’il était, depuis longtemps, anglophile ?
    Il faut noter la concession faite à Jean de Gerwadby, en date du 29 juillet 1351, des biens situés à Calais, qui avaient appartenu au défunt Saint-Pierre et qui avaient été confisqués après sa mort sur ses héritiers.
    De tout ceci, il apparaît qu’Eustache de Saint-Pierre était extrêmement riche (quelques-uns de ses biens, les moins importants, avaient d’ailleurs été attribués, le 8 octobre 1347, à trois Anglais : Jean Goldbeter, Jean Clerc et Jean Dalmaigne). Il apparaît aussi que, dès la reddition de la ville, il devint un fervent « collaborateur ». Édouard III apprit-il (pourquoi pas ?) de sa bouche que dès le début du siège, Saint-Pierre avait été défavorable à toute résistance ? Cela ne fait aucun doute mais devient choquant, bien sûr, car contraire à l’imagerie, magnifiée de loin en loin, des humbles (mais riches !) bourgeois résignés à subir un sort funeste pour la sauvegarde de leurs concitoyens !
    Qu’ils aient été
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