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Les héritiers

Les héritiers

Titel: Les héritiers
Autoren: Jean-Pierre Charland
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ralentit le pas de façon à se trouver à la hauteur du jeune marchand de la rue Saint-Joseph.
    — Alors, Picard, vous devez être satisfait du travail accompli.
    — Dans une certaine mesure, oui. Tout de même, il aurait été préférable de ne pas avoir d’opposition. Ce Galibois me semble une nuisance.
    — Mais il se trouve infiniment moins visible que Lavergne. Son dernier coup de griffe est plus pitoyable que blessant.
    Lui aussi avait eu en main le « communiqué » de François-Xavier Galibois.
    — Je ne vois pas notre premier ministre provincial parmi nous.
    — Il représente un comté de Montréal.
    — Surtout, il ne doit pas savourer ce moment. . Et vous, votre joie est sans partage ?
    Taschereau apprécia le ton persifleur. Son jeune collaborateur perdait
    rapidement
    sa
    naïveté.
    Cela
    en
    ferait
    éventuellement un précieux allié.
    — Je suis aussi content du résultat qu’il convient de l’être, dans ma situation. La suite des choses nous révélera tous les bienfaits attribuables à cet heureux événement.
    Ils arrivaient devant la grande demeure de Louis Létourneau. Une galerie couverte s’étendait sur toute sa façade. Quand Ernest Lapointe y monta, escorté par les membres les plus éminents du parti, une petite fille sortit de la maison, une grosse gerbe de fleurs dans les bras. Le vainqueur les reçut avec plaisir, fit la bise { l’enfant, et commenta, rieur :
    — Ces fleurs, c’est vous qui les avez méritées, et c’est moi qui les reçois.
    Dans ce genre de scénario, même les paroles les plus banales devaient susciter des applaudissements nourris. Le contraire laisserait tout le monde déçu. Tout de suite, le propriétaire de la maison, un ancien politicien municipal, enchaîna avec les félicitations d’usage au nouveau député de Québec-Est. Oscar Drouin lui succéda :
    — Aujourd’hui, les électeurs de ce beau comté ont resserré les liens autour de leur nouveau représentant. Demain, ce seront tous les Canadiens français qui le reconnaîtront comme le digne successeur de Wilfrid Laurier..
    De la part d’un ancien disciple d’Henri Bourassa, et plus récemment d’Armand Lavergne, ce genre de déclaration servait à se refaire une virginité politique. Eventuellement, les restes de méfiance à son endroit disparaîtraient.
    Sans doute parce que Arthur Lachance n’avait rien à se faire pardonner, il ne passa pas sur l’estrade improvisée afin de marquer de la même façon sa soumission au nouveau chef de l’aile québécoise du Parti libéral. Quand Lapointe reprit finalement la parole, ce fut pour dire toute sa fierté d’avoir obtenu la majorité des voix dans chacun des bureaux de scrutin, « sauf quatre d’entre eux situés dans Limoilou ».
    Quelque chose dans le ton laissait entendre que l’on pouvait s’attendre { n’importe quelle turpitude des gens de ce quartier. Il s’agissait tout simplement des voisins de François-Xavier Galibois.
    Le vainqueur souligna encore le moment historique de la participation féminine au suffrage, remercia chaudement ses électrices, fit de même avec ses électeurs, puis souhaita bonne nuit à tout le monde.
    Edouard s’attarda assez longtemps pour serrer une nouvelle fois la main de son candidat, et le féliciter.
    — Nous allons nous parler bientôt, monsieur Picard.
    Toutefois, je prends le train de nuit tout { l’heure pour Ottawa. Ma femme m’attend afin de me mettre { la recherche d’une nouvelle maison.
    — Elle ne semblait pas enthousiasmée par ce changement apporté à son existence.
    — Je sais. D’un autre côté, elle fera tout pour me permettre de continuer.
    Il voulait dire continuer d’avancer dans sa carrière politique.
    — Je ne vous retarderai pas plus longtemps. Je serai heureux d’avoir de vos nouvelles.
    Tous les deux se séparèrent sur des souhaits mutuels de bonne nuit.
    Novembre couvrait la ville d’un manteau de grisaille.
    Selon
    une
    habitude
    maintenant
    solidement
    ancrée,
    Françoise tenait le bras de Gérard Langlois en parcourant la terrasse Dufferin de long en large. Son compagnon se montrait un peu plus tendu que d’habitude, elle devinait qu’il désirait aborder bientôt un sujet «sérieux».
    A la fin, il cessa ses va-et-vient, l’entraîna vers un banc placé un peu { l’écart.
    — Tu sais que j’ai beaucoup d’affection pour toi, déclarat-il enfin.
    La formulation trahissait son profond malaise. Dire «Je t’aime » rendrait une
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