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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang
Autoren: Pierre Naudin
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que j’ai à dire au roi après que vous lui aurez annoncé la victoire de Cocherel. Nous aurons au retour, lui et moi – je parle de cette bête – au moins septante lieues à couvrir aussi vélocement que possible. La prudence m’impose cette conduite. Je me permettrai de me recommander de vous, messire l’huissier d’armes, si je suis obligé d’échanger ce cheval contre un autre.
    Ni l’Alemant ni La Rivière ne s’informèrent des raisons d’une aussi longue et immédiate chevauchée. Tristan leur sut bon gré de cette indifférence. En quel lieu se trouvait le château Ganne ? Près de La Pommeraye. Et La Pommeraye ? Près d’un hameau du nom de Saint-Christophe, proche d’Athis-de-l’Orne… Il trouverait. Il rejoindrait, aux abords de la forteresse, Paindorge, Tiercelet, Matthieu, Thierry Champartel et Ogier d’Argouges. Ils sauraient décider du meilleur moyen de délivrer Luciane et Guillemette des griffes des Navarrais.
    « C’est une bonne chance, en vérité, que Guillemette soit auprès d’elle… Pauvre Raymond, son époux, qui gît désormais sous la terre de Cocherel !… Comment vont-elles ? »
    Question terrible. Il se pouvait que les deux femmes eussent été violées puis occises.
    « Et je me trouve à moins d’une demi-lieue de Reims pour rapporter au roi un fait dont sans doute il n’a cure, tout occupé qu’il est d’un sacre qui va lui fournir plus de malice, d’aisance et d’autorité que naguère. »
    –  Nous restons avec vous, décida l’Alemant. Voyez cette poudrière. Ils sont au moins cinq cents : le roi, la reine, les seigneurs, gentilfames, hommes d’armes, chambrières et gens de cuisine…
    – Ils vont si lentement que nous nous rapprochons.
    La Rivière souriait. C’était un être assez petit, à face brune et glabre tannée par le grand air et une vie turbulente. Ses yeux noirs et chagrins soudain se soulevèrent. Il montra dans le ciel un oiseau qui planait en décrivant de grands cercles pour tomber tout à coup et disparaître dans la crépelure des arbres.
    –  Une buse, dit l’Alemant.
    – Non : un chasseton 7 .
    – C’en est un, dit Tristan. Ce grand-duc qui s’est pris quelque temps pour un sacre n’est point convié au couronnement.
    Il avait cru pouvoir susciter quelques rires. Il n’en fut rien. « Ils ont le crâne épais », songea-t-il sans ébahissement tandis que La Rivière se retournait :
    – La nuit ne tardera pas. Holà ! Lanvellec, déploie la bannière de Bertrand. Va devant avec tes deux compères. Je vous suis : nous allons annoncer qui nous sommes.
    Le cheval du gonfanonier se mit à trotter mollement. Les trois autres suivirent, peu enclins, eux aussi, à la vélocité.
    – Il veut tout le succès pour lui, commenta l’Alemant. La Rivière se fait torrent !… Grand bien lui fasse. Je dirai au roi comment nous avons vaincu… Je vous ai vu estriver 8 contre ces malandrins, Castelreng. Il saura que vous avez fait merveille.
    Tristan hocha sa tête lourde, quoique privée de bas sinet. Il eut une pensée pour son armure dont Paindorge et Matthieu s’étaient chargés, puis il osa :
    – Cocherel ne fut rien qu’une maigre victoire.
    – C’est vrai, mais elle sera outrément gonflée puisqu’elle advient au bon moment : deux jours avant le couronnement !… De quoi demain sera-t-il fait ? Guesclin n’est point invincible.
    « Tiens », releva Tristan, « il ne l’aime guère et profite de l’absence de La Rivière pour le confesser… Quant à moi, je serais mécontent qu’il me faille une fois de plus guerroyer sous le mandement de ce cotereau 9 . Dois-je l’avouer ? »
    Mieux valait s’abstenir : il se pouvait que son compagnon prêchât le faux pour savoir le vrai.
    L’Alemant souriait. Huissier d’armes de Charles le Cinquième, il jouissait du privilège d’approcher celui-ci fréquemment. C’était une sorte de clerc à l’œil et au nez d’aigle, au menton pointu, arrogant. Sa bouche aux lèvres étroites et minces semblait de loin en loin mâchonner des anathèmes.
    – Hâtons-nous tout de même un petit, dit-il. La Rivière pourrait se parer de tous nos mérites… Voyez : ils ont vu la bannière de Bertrand et alentissent. Heureusement que sire Charles n’est point à la semblance de son père, sans quoi, bien que le Breton soit affreux, je craindrais qu’il ne s’en soit épris comme le roi Jean le fut de Charles d’Espagne… Qu’en pensez-vous,
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