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Les derniers jours de Jules Cesar

Les derniers jours de Jules Cesar

Titel: Les derniers jours de Jules Cesar
Autoren: Valerio Manfredi
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incompétent et donc dangereux.
Chassez-le ! Et maintenant brûlez tout ! ajouta-t-il, à la
consternation des pauvres. Ne faisons pas trop attendre les dieux. »
    Il réclama une autre bassine d’eau, acheva de se nettoyer et
s’essuya les mains dans une toile de lin tendue par un serviteur.
    Silius gravit les marches qui menaient au portique du
sanctuaire. Du haut, il vit la foule se disperser. On allumait le feu, sur
l’autel, et jetait aux flammes l’animal découpé. Ce n’était toutefois pas
l’objet de son intérêt : il voulait s’assurer que la litière était postée
à l’endroit convenu et que les hommes étaient sur le qui-vive.
    Il se tourna ensuite vers l’intérieur, comme pour saluer les
dieux de la triade, immobiles dans l’ombre. Un objet brillait sur un coussin de
pourpre, aux pieds de la statue de Jupiter, si haute que sa tête touchait
presque le plafond. C’était une couronne en or. Un cartouche gravé dans le bois
disait :
     
    À JUPITER, UNIQUE ROI DES ROMAINS
     
    Il pivota. Voyant que César achevait de célébrer le
sacrifice selon les rites traditionnels, il redescendit.
    Les nuages s’ouvraient çà et là, offrant des déchirures de bleu,
que le gris effaçait vite. Silius attendit sur le côté sud de l’escalier que le
grand pontife eût salué les membres de l’assemblée pour l’accompagner à
l’embouchure de la voie Sacrée. La litière s’ébranla.
    Le bruissement de la foule s’élevait du Forum, mêlé aux cris
des vendeurs et des bonimenteurs qui s’échappaient des boutiques. On percevait
par bribes le discours d’un magistrat réclamant, aux Rostres, l’approbation du
peuple pour son travail.
    « Puisque tu as trouvé le cœur, pourquoi ne l’as-tu pas
arraché ? interrogea Silius.
    — Fouiller dans les viscères d’un animal est pour le
moins répugnant. De plus, c’était inutile. L’animal était vivant, il est donc
certain qu’il avait un cœur. Connais-tu l’histoire du veau d’Anaxagore ?
    — Non, César.
    — Du temps où Périclès était un simple meneur, un veau
unicorne naquit à Athènes. Périclès consulta un devin, lequel lui répondit
qu’il s’agissait d’un présage. Cela signifiait que le parti du peuple, doté de
deux chefs, Éphialtès et lui, serait bientôt conduit par un seul représentant,
c’est-à-dire lui-même. Le philosophe Anaxagore fut aussitôt convoqué afin
d’interpréter le prodige. Il ouvrit le crâne de l’animal, examina son cerveau
et y trouva de graves anomalies. Si l’animal n’avait qu’une corne, répondit-il,
c’était à cause d’une malformation. Il y a toujours une explication, Silius. Et
s’il n’y en a apparemment pas, ce n’est pas à un prodige qu’il faut
l’attribuer, mais à notre ignorance, à notre inaptitude, à notre incapacité de
comprendre les raisons d’un phénomène. »
    Ils avaient atteint la base de la rampe. La voie Sacrée
virait à droite en direction du temple de Saturne et de la basilique. César
s’assit au pied du grand ficus ruminalis, le figuier sauvage qui
commençait à se couvrir de feuilles. Il aimait s’asseoir dans ce coin
tranquille et écouter, sans être reconnu, les gens converser.
    « Qu’est-ce que tu es allé faire dans le temple ?
demanda-t-il soudain. Prier ?
    — J’ai lu une inscription. Une inscription placée
devant une couronne en or. Je la connaissais de réputation et j’étais curieux
de la voir. C’est bien celle dont on a tant parlé, mon général ? »
    Quelques gouttes tombèrent, et une odeur de poussière se
répandit dans l’air. César ne broncha pas. Il semblait savoir que la pluie
cesserait vite. De nombreux passants, en revanche, coururent s’abriter sous le
portique de la basilique.
    « Oui, c’est celle dont on a parlé. Trop parlé.
    — Ce jour-là tu m’avais envoyé en mission à Capoue.
J’ai eu des difficultés, à mon retour, à savoir ce qui s’était produit. On m’a
livré au moins une demi-douzaine de versions de cet épisode.
    — Cela prouve que la vérité historique n’existe pas.
Non seulement parce que la mémoire de chaque homme est différente, mais aussi
parce que ce qui attire l’attention de l’un échappe à l’autre. Bonne foi mise à
part, chacun se rappelle ce qui a attiré son attention, non ce qui s’est passé
réellement sous ses yeux. Quelle version as-tu crue ?
    — Tu assistais à la cérémonie des Lupercales. Antoine
t’a offert à deux
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