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Les croisades vues par les arabes

Les croisades vues par les arabes

Titel: Les croisades vues par les arabes
Autoren: Amin Maalouf
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empereurs, dont Alexis lui-même, ne cessent d'envoyer des délégations au pape de Rome, chef suprême de l'Occident, le suppliant d'appeler à la guerre sainte contre cette résurgence de l'islam. 
    Kilij Arslan n'est pas peu fier de son appartenance a une famille aussi prestigieuse, mais il n'est pas dupe non plus de l'apparente unité de l'empire turc. Entre cousins seldjoukides, on ne connaît nulle solidarité : il faut tuer pour survivre. Son père a conquis l'Asie Mineure, la vaste Anatolie, sans l'aide de ses frères, et c'est pour avoir voulu s'étendre au sud, vers la Syrie, qu'il a été tué par l'un de ses cousins. Et, pendant que Kilij Arslan était retenu de force à Ispahan, le domaine paternel a été dépecé. Quand, fin 1092, l'adolescent a été relâché à la faveur d'une querelle entre ses geôliers, son autorité ne s'exerçait guère au-delà des remparts de Nicée. Il n'avait que treize ans. 
    Ensuite, c'est grâce aux conseils des émirs de l'armée qu'il a pu, par la guerre, par le meurtre ou par la ruse, récupérer une partie de l'héritage paternel. Aujourd'hui, il peut se vanter d'avoir passé plus de temps sur la selle de son cheval que dans son palais. Pourtant, à l'arrivée des Franj, rien n'est encore joué. En Asie Mineure, ses rivaux restent puissants, même si, fort heureusement pour lui, ses cousins seldjoukides de Syrie et de Perse sont absorbés par leurs propres querelles. 
    A l'est notamment, sur les hauteurs désolées du plateau anatolien, règne en ces temps d'incertitude un étrange personnage qu'on appelle Danishmend, « le Sage », un aventurier d'origine obscure qui, à l'inverse des autres émirs turcs, pour la plupart analphabètes, est instruit dans les sciences les plus diverses. Il va bientôt devenir le héros d'une épopée célèbre, intitulée précisément la Geste du roi Danishmend, qui décrit la conquête de Malatya, une ville arménienne située au sud-est d'Ankara, et dont la chute est considérée par les auteurs du récit comme le tournant décisif de l'islamisation de la future Turquie. Aux premiers mois de 1097, lorsque l'arrivée à Constantinople d'une nouvelle expédition franque est signalée à Kilij Arslan, la bataille de Malatya est déjà engagée. Danishmend assiège la ville, et le jeune sultan refuse l'idée que ce rival, qui a profité de la mort de son père pour occuper tout le nord-est de l’Anatolie, puisse remporter une victoire aussi prestigieuse. Déterminé à l'en empêcher, il se dirige, à la tête de ses cavaliers, vers les environs de Malatya et installe son camp à proximité de celui de Danishmend pour l'intimider. La tension monte, les escarmouches se multiplient, de plus en plus meurtrières. 
    En avril 1097, l'affrontement semble inévitable. Kilij Arslan s'y prépare. L'essentiel de son armée est rassemblé sous les murs de Malatya lorsque arrive devant sa tente un cavalier exténué. Il débite son message en haletant : les Franj sont la, de nouveau, ils ont franchi le Bosphore, plus nombreux que l'année précédente. Kilij Arslan reste calme. Rien ne justifie pareille inquiétude. Les Franj, il les a déjà pratiqués, il sait à quoi s'en tenir. Finalement, ce n'est que pour rassurer les habitants de Nicée, et en particulier son épouse, la jeune sultane, qui doit bientôt accoucher, qu'il demande à quelques détachements de cavalerie d'aller renforcer la garnison de la capitale. Lui-même sera de retour dès qu'il en aura fini avec Danishmend. 
    Kilij Arslan est à nouveau engagé, corps et âme, dans la bataille de Malatya, quand, aux premiers jours de mai, arrive un nouveau messager, tremblant de fatigue et de peur. Ses propos jettent l'effroi dans le camp du sultan. Les Franj sont aux portes de Nicée, qu'ils commencent à assiéger. Ce ne sont plus, comme en été, des bandes de pillards dépenaillés, mais de véritables armées de milliers de chevaliers lourdement équipés. Et, cette fois, les soldats du basileus les accompagnent. Kilij Arslan tente de calmer ses hommes mais lui-même est torturé par l'angoisse. Doit-il abandonner Malatya à son rival pour revenir vers Nicée? Est-il sûr de pouvoir encore sauver sa capitale? Ne va-t-il pas perdre sur les deux fronts? Après avoir longuement consulté ses plus fidèles émirs, une solution se dégage, une forme de compromis : aller voir Danishmend, qui est homme d'honneur, le mettre au courant de la tentative de conquête entreprise par les
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