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Les Bandits

Les Bandits

Titel: Les Bandits
Autoren: E. J. Hobsawm
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capacité d’exercer
un contrôle sur les populations et les ressources par le biais de la cœrcition,
se prête à beaucoup plus de variations et de mutations historiques que les
structures économiques et sociales, dont l’évolution reste lente.
    Pour comprendre le banditisme et la place qu’il occupe dans
l’histoire, nous devons donc le considérer dans le contexte de l’histoire du pouvoir,
c’est-à-dire du contrôle exercé par les gouvernements ou par d’autres instances
(dans les campagnes, principalement les seigneurs possédant terre et bétail) sur
les territoires dont ils revendiquent le contrôle et sur les populations qui y
résident. Un tel contrôle est toujours limité à des territoires et à des
populations spécifiques, dans la mesure où il n’est pas d’État ou de détenteur
du pouvoir, et ce jusqu’aux empires les plus puissants, qui n’ait dû à ce jour coexister
avec des entités situées en dehors de son périmètre. Qui plus est, même dans
les limites de son empire, ce pouvoir s’est historiquement heurté à trois
limites : l’inadéquation des moyens de contrôle que les autorités ont à
leur disposition ; le fait que leur efficacité dépend dans une certaine
mesure de l’obéissance dont font preuve les sujets et de leur capacité à se
soustraire à l’autorité ; enfin (et en partie pour la même raison) le fait
que les autorités ne cherchent à contrôler directement que certains aspects de
la vie de leurs sujets. Aujourd’hui encore, le gouvernement colombien n’est pas
en mesure de contrôler certaines portions de son territoire si ce n’est en y
faisant des incursions militaires ponctuelles, et la police d’Irlande du Nord (Royal
Ulster Constabulary) sait que, dans certains quartiers de Belfast, les
activités de police sont menées de fait non pas par l’État, mais par des
commandos de gros bras « républicains ».
    Par définition, l’obéissance sied mal aux bandits : non
seulement leur place se situe hors de portée du pouvoir, mais ils peuvent
eux-mêmes prétendre à l’exercice du pouvoir, ce qui en fait des rebelles en
puissance. La signification première du terme
bandito
(en italien) désigne un homme qui se trouve « placé
en dehors de la loi » pour une raison quelconque, même si on ne sera pas
surpris d’apprendre que les hors-la-loi étaient fréquemment des voleurs. Les « brigands [16]  » n’étaient
au départ que les membres de groupes armés n’appartenant à aucun contingent
régulier. (Le terme n’a pris son sens moderne qu’à la fin du XV e siècle.) Le mot qui désigne usuellement les bandits en
castillan,
bandoleros
, est
dérivé du terme réservé aux partisans en armes actifs pendant les troubles et
les conflits civils qui ont agité la Catalogne du XV e au XVII e siècle, partisans « qui à terme
sombrèrent dans le banditisme [17]  ».
Au XVI e et au XVII e siècle,
on appelait
celalis
les
bandits de l’Empire ottoman qui, selon une étude récente, contribuaient à
renforcer le pouvoir du sultan plutôt qu’à l’amoindrir. Il n’en reste pas moins
que leur nom a pour origine la révolte idéologique (islamique et hétérodoxe) conduite
par Seyh Celal en 1519, ce qui amena le gouvernement à « recourir à ce
terme pour justifier sa répression des bandits, même lorsque ces derniers n’avaient
ni les motivations ni la viabilité révolutionnaires des véritables
celali
[18]  ». Quant aux
shiftas
de la Corne d’Afrique,
je me suis laissé dire qu’un dictionnaire amharique réputé définissait les
bandits comme des personnes qui, ayant répudié l’autorité du roi ou de l’empereur,
vivent dans les forêts ou les étendues sauvages, provoquent des troubles, et
refusent de s’acquitter des impôts ou des tributs ; bref, des
insurgés-voleurs. Enfin, dans la Chine traditionnelle, le lien potentiel entre
le banditisme et le renversement des dynasties, auquel on s’attendait
périodiquement, constituait un lieu commun de la pensée politique.
    On ne peut comprendre ou étudier correctement l’histoire du
banditisme, pas plus que celle du banditisme social, si on ne la replace pas
dans l’histoire plus large du pouvoir politique qui, à son niveau le plus élevé,
est celui que détiennent les empires et les États. Dans les sociétés de classes
antérieures à l’avènement du capitalisme moderne, le pouvoir économique était
fondé, en dernière instance, sur le pouvoir de
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