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Le sang de grâce

Le sang de grâce

Titel: Le sang de grâce
Autoren: Andrea H. Japp
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partout où je me
trouverai, vous serez avec moi. Dieu veille sur vous.
    Je supplie le ciel de ne vous
occasionner aucune peine. Madame, votre chagrin de moi me serait mortel.
    Vivez comme la magnifique que vous
êtes.
    Clémence, votre fille tant aimante.
     
    Les larmes suffoquèrent Agnès. La
feuille lui échappa des doigts et elle tomba à genoux, hurlant comme un animal.
    Plus tard, bien plus tard,
l’épuisement la coucha à plat ventre sur le plancher.
    Jamais ! Elle allait la retrouver,
même si elle devait sillonner le royaume en tous sens, pieds nus, fouiller
chaque maison, chaque masure. Elle allait la retrouver !
    Agnès se releva d’un seul effort.
    Jamais elle ne tolérerait d’être
séparée de Clémence.
    Artus d’Authon ne laissa à Eudes de
Larnay nulle chance de retraite. Il fondit tel un aigle sur sa proie, le
plaquant au mur de sa salle commune en déclarant d’un ton calme,
meurtrier :
    — Vous êtes un tout petit
monsieur, Larnay, une lamentable crapule qui pue du dedans à l’étouffement. Si
nous en venions à cela, je sais comment faire mordre la poussière aux voyous de
votre sorte et n’hésiterais pas. J’en concevrai même quelque plaisir. Aussi, ne
me tentez pas.
    Cédant bien vite aux menaces
précises de monseigneur d’Authon, son suzerain, bien que maintenant son presque
demi-beau-frère, le petit baron Eudes de Larnay finit par avouer la province
où, selon lui, sa tendre nièce avait aspiré à rejoindre la paix du Seigneur. Il
s’obstina cependant à prétendre n’en rien savoir d’autre, ne serait-ce que
parce qu’il ne tenait pas à tâter de la lame d’Artus d’Authon.
    Lorsque Agnès retrouva enfin la
trace de son aînée après une laborieuse et longue enquête, elle apprit que
Mathilde de Souarcy avait disparu de son abbaye deux mois plus tôt, à la nuit,
emmenant ses quelques frusques, sans oublier divers objets de culte volés et
une dizaine de livres aisément monnayables. Agnès d’Authon comprit aux soupirs
de la mère abbesse que sa fille avait été recherchée avec peu d’enthousiasme,
son séjour n’ayant laissé aucun agréable souvenir aux autres novices ou aux
moniales. La nouvelle la dévasta, pourtant moins qu’elle l’avait redouté… ou
espéré. Cependant, un instinct lui disait que Mathilde referait un jour
surface, ne serait-ce que pour exiger son héritage, sa mère étant remariée de
peu.

    Le chevalier de Leone se félicita de
recevoir une prolongation de congé en France de la part du prieur de la
citadelle chypriote. Arnaud de Viancourt lui enjoignait de se rapprocher de
monseigneur de Got, archevêque de Bordeaux, afin de plaider auprès de lui la
cause de l’Hôpital, en toute discrétion. Le chevalier s’exécuta, satisfait de
cette chance qui lui permettait de veiller sur le ventre de madame Agnès.

    Monseigneur de Got fut élu pape,
sous le nom de Clément V, le 5 juin 1305. Le nouveau souverain pontife eut
la finesse politique de conserver auprès de lui le camerlingue Honorius
Benedetti – dont il n’ignorait plus grand-chose grâce aux révélations
d’Arnaud de Viancourt –, à l’excellente raison qu’un ennemi proche s’avère
moins redoutable que le même ourdissant ses complots de derrière la tenture.

    Plutôt qu’un château, des terres, ou
d’époustouflants bijoux, Agnès de Souarcy requit de son bien-aimé époux, Artus
d’Authon, la promesse qu’il retrouverait pour elle ce « galopin » de
Clément. Devant l’étonnement du comte, elle finit par avouer que le garçon
était une fille, et qu’à ce titre elle méritait protection. Le reste étant trop
dangereux, elle s’accommoda d’un mensonge par omission.
    Un an plus tard, Agnès d’Authon,
entourée de la dévotion et de l’insistante sollicitude de son époux qui se
transformait, selon son expression, en « vieille poule inquiète »,
donna naissance à un fier gaillard, brun de poil comme son père. Le mignon
n’avait pas vu le jour qu’il ruait déjà des jambes et réclamait, à cor et à
cri, le sein toute la journée et une bonne partie de la nuit. La ventrière,
énamourée par l’enfançon braillard, le brandit selon la coutume réservée aux
premiers hoirs afin de montrer à tous « qu’il en avait deux et était
bellement membré, foi de matrone jurée [123]  ». Agnès souhaita donner à son premier mâle né le nom de
Philippe. Tous y virent un élégant hommage au roi. Elle ne les détrompa pas,
bien
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