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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort
Autoren: Caroline Roe
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attaché à son épaule. Il ne parlait ni ne bougeait.
    L’aîné le poussa délicatement de son pied nu. Sans plus de réaction que la question qu’il venait de lui poser.
    — Qu’est-ce qu’il a ? demanda le petit.
    — Il est mort. Enfin, je crois. On ferait mieux de s’en aller de là et de prévenir quelqu’un.
     
    Quelques heures plus tôt, ce même matin, trois hommes chevauchaient à pas modéré sur leurs mules et s’adonnaient de temps à autre à une conversation décousue.
    — Avez-vous pris cette route pour vous rendre à Gérone ? s’enquit un jeune homme à l’air grave.
    On lui avait demandé de se montrer aimable envers son compagnon, mais, par sa réserve, l’étranger avait épuisé depuis longtemps son lot de préambules. Le silence était étouffant.
    L’autre observa les environs.
    — Ces lieux ne me sont pas familiers, dit-il sèchement.
    C’était à peine plus qu’un jouvenceau imberbe et il semblait incarner tout ce que son âge peut avoir de maussade et de capricieux. Pourvu d’une masse de cheveux roux et bouclés impossibles à discipliner, il irritait son compagnon en écartant constamment des mèches de son visage avec la timidité d’une jeune fille.
    — Mais c’était un jour de pluie, poursuivait-il. Tout a l’air différent quand il fait soleil.
    — Comment êtes-vous venu de Séville ? demanda le jeune homme sérieux dont le nom était Daniel.
    Le garçon le regarda comme s’il était un juge l’interrogeant à propos de quelque faute impardonnable.
    — Par voie de terre ? ajouta Daniel. De mer ?
    — De mer. C’est un voyage épuisant par la terre, dit-on, et ce n’est pas très sûr.
    — Combien de temps cela vous a-t-il pris ? Par la mer, naturellement.
    — Pour me rendre à Barcelone ? Ça a pris… qu’est-ce que c’est ? fit-il brusquement en tendant le cou.
    — Un char à bœufs. Vous n’en aviez jamais vu ?
    Mais Rubèn devait songer qu’une telle question ne méritait pas de réponse et il retomba dans son mutisme.
    — Pourquoi vous rendez-vous dans ce port ? demanda-t-il après un long silence, comprenant certainement qu’il s’était montré peu courtois.
    — Je vais chez mon oncle Éphraïm. Le gantier. Son agent à Sant Feliu de Guíxols a reçu des marchandises qu’il désire me voir examiner. Ce n’est pas très intéressant à moins que l’on ne soit gantier, ce que je suis.
    Rubèn observait toujours le paysage.
    — Qu’est-ce qui vous a conduit à Gérone ? s’enquit Daniel, qui se jurait bien que ce serait là sa dernière tentative de faire la conversation. C’est assez loin, non ?
    — Oui, dit Rubèn avant un silence qui ne présageait rien de bon. Ma mère est une cousine de Mordecai. Son père et celui de Mordecai étaient frères. Ma mère est partie à Séville pour s’y marier mais, à la mort de mon père, nous avons quitté cette ville pour vivre avec ma grand-mère, à Majorque. Ma mère m’a pressé de rendre visite à ma famille de Gérone. Elle espérait certainement que j’y apprendrais un métier.
    — Vous n’en avez donc pas ?
    — De métier ? fit Rubèn, l’air pensif. Pas vraiment. On m’a éduqué pour que je devienne un érudit, mais mon père avait décidé que je devais prendre sa suite.
    — C’est-à-dire ?
    — C’était un marchand, comme celui que nous allons voir. Une grande partie du commerce passe par Séville, savez-vous.
    — Je connais peu cette ville, avoua Daniel.
    — C’est un endroit agréable et il y a plein de choses à y faire.
    Rubèn s’essuya le front du revers de sa manche et regarda le ciel.
    — Il fait très chaud aujourd’hui.
    — Vous devez être habitué à la chaleur puisque vous venez de Séville.
    — Certes, mais ici l’air est pesant, répliqua le garçon agacé.
    Comme s’il commandait aux éléments, un petit vent du Sud se leva alors, assez violent pour agiter les feuilles.
    — Pour combien de temps en avons-nous encore ? Je ne veux pas rater le bateau qui me ramènera chez moi.
    — C’est Aaron le responsable de ce voyage, dit Daniel en souriant. Quand arriverons-nous, Aaron ?
    Le serviteur corpulent qui chevauchait à leurs côtés se tourna vers Daniel.
    — La route n’est pas longue, maître Daniel. Même à ce rythme, il ne faut pas plus de cinq heures.
    — Dans ce cas, pourquoi ne va-t-on pas plus vite ? demanda Rubèn.
    — Nous serons à Sant Feliu à temps pour jouir d’un bon
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