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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut
Autoren: Juliette Benzoni
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il s’est amouraché de ses cheveux rouges. Il avait du bien, il était jeune… pas laid, il l’a persuadée que la seule manière pour elle de se mettre à l’abri de nos pattes, c’était de l’épouser. Paraît qu’il disait avoir des relations au Parlement et chez les gens en place. Toujours est-il qu’elle a accepté… Oui, elle a accepté. Ça t’embête, hein ?… Tu t’es amené ici tout faraud, en braillant que vous vous aimiez tous les deux et que tu avais tous les droits ? C’est pas la peine de jouer les redresseurs de torts, Tournemine. Elle se fichait pas mal de toi…
    — Continue ! ordonna Gilles froidement.
    L’œil goguenard de Tudal ne put rien déceler sur son visage revenu aussi dur que de la pierre ni dans ses yeux glacés mais dans sa poitrine la douleur s’était réveillée, jointe à une amère jalousie qu’il se reprochait déjà comme un sacrilège. Désappointé, le rouquin haussa les épaules.
    — On a retrouvé sa trace juste à temps. Le jour des noces, nous étions sur la lande, Morvan, Yann, moi et les autres. On a laissé faire la cérémonie. Il n’y avait pas grand monde : un prêtre et deux témoins. C’était un mariage discret. Et puis quand nous avons été bien sûrs qu’il n’y avait plus personne… que les tourtereaux étaient seuls ou à peu près, on est passés à l’action. Ça n’a pas été bien difficile, ni bien long. La mariée était encore toute parée. Elle buvait un verre de champagne avec son époux. Le pauvre, il n’a même pas eu le temps de le vider : mon épée lui est passée au travers du corps comme une aiguille dans de la soie. Il est tombé sans dire ouf… Il y avait un carrosse dans une remise. Nous y avons fait monter Mme Kernoa qui pleurait comme une fontaine… et la nuit suivante, tu sais ce qu’il est advenu d’elle…
    — Pourquoi la nuit suivante, en ce cas ! Pourquoi les bois de Trecesson ?
    Le rire de Tudal passa comme une râpe sur les nerfs à vif du chevalier.
    — Pour faire d’une pierre deux coups. D’abord parce que personne n’aurait l’idée de la chercher là et ensuite parce que ça nous faisait joie de faire ce cadeau au sieur de Châteaugiron avec qui on a eu certains démêlés l’an passé. T’en sais assez maintenant, j’espère ?… et quelque chose me dit que tes ennuis vont commencer.
    En effet, un volet s’arrachait d’un coup ! Un coup de feu claqua manquant Corentine d’un cheveu. Elle poussa un cri auquel le rire dément de Tudal fit écho. Mais Gilles était déjà à la porte extérieure, faisant jouer les verrous, ouvrait en grand tout en s’abritant derrière un battant. Il surprit un homme juste en face de lui, tira. L’homme tomba comme une masse. Pendant ce temps Corentine, courageusement, se glissait vers la fenêtre éventrée et, tenant à deux mains le gros pistolet de Tudal, se redressait brusquement, tirait au jugé… Une plainte qui s’acheva en gargouillis vint la récompenser.
    — Touché ! s’écria Gilles. Bravo, petite !
    Pour la première fois, il la vit sourire, un drôle de sourire timide qui tirailla son visage abîmé.
    — On se sent facilement une âme d’héroïne avec un gars comme toi, chevalier ! s’écria-t-elle. Si tu as un jour besoin de faire le coup de feu en Bretagne, pense à Corentine ! Mon père a servi au Régiment des Vaisseaux. C’est lui qui m’a appris à tirer… Mais faut pas s’endormir ; il en reste encore un et Morvan n’est peut-être plus loin.
    — Les chiens ! beuglait Tudal. Qu’est-ce que ces idiots attendent pour aller chercher les chiens ?
    Gilles était déjà dehors. Il vit un homme qui courait vers une grange d’où partaient des aboiements forcenés.
    — Halte ! cria-t-il. Jette ton fusil et arrête-toi ou tu es mort…
    L’homme, un paysan vêtu d’une veste en peau de chèvre et de larges braies plissées, les cheveux comme des baguettes de tambour sous un chapeau rond s’arrêta net mais sans lâcher le fusil. Puis, d’une seule pièce, il se retourna, lâcha son coup de feu. La balle s’enfonça dans le linteau de la porte mais déjà le second pistolet de Gilles avait lancé sa clameur mortelle. Le dernier des gardes de Tudal vacilla, plia les genoux et tomba dans la boue, face contre terre…
    Calmement, le chevalier rentra dans la maison, en referma soigneusement la porte sur laquelle il s’adossa. Son regard froid fit le tour de la pièce, accrocha au passage la
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