Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale
Autoren: Jean-François Parot
Vom Netzwerk:
je m’égare ! Pouvez-vous imaginer que ce responsable n’est pas encore sur place pour ordonner et surveiller ce grand concours de peuple ?
    Nicolas se replongea dans sa méditation. Leur voiture finit par s’engager sur le pont Royal, où le mélange bigarré des piétons et l’enchevêtrement des véhicules offraient l’image d’une armée en déroute. Emprunter le quai des Tuileries fut aussi malaisé que le reste du parcours. Deux flux tumultueux se rejoignaient et tentaient de se mêler en se repoussant : celui qui débouchait de la rive gauche et un autre, tout aussi abondant et désordonné, provenant du quai des Galeries du Louvre.
    — Le passage paraît bloqué à la hauteur du pont Saint-Nicolas.
    Semacgus n’attendait que cela pour rebondir.
    — Et pourtant, il n’y a pas de vaisseau de ligne pour réjouir le Parisien. J’étais enfant quand mon père — c’était encore sous le régent d’Orléans — me mena pour admirer un navire hollandais de huit canons qui mouillait à cet endroit.
    Nicolas s’impatientait et tapotait des doigts sur la vitre. L’obscurité était presque complète et les cochers s’arrêtaient pour allumer les lanternes, ce qui aggravait encore le désordre et la lenteur du convoi. À hauteur de la terrasse des Feuillants, il fit signe à son ami d’avoir à abandonner leur voiture. Il ordonna au cocher de regagner le Châtelet ; ils trouveraient par eux-mêmes le moyen de rentrer après la fête, et d’ailleurs ils devaient souper rue du Faubourg-Saint-Honoré au Dauphin couronné , chez la Paulet, une vieille connaissance. Traverser cette foule de plus en plus dense tenait du prodige. À plusieurs reprises, le chirurgien de marine attira l’attention du commissaire sur des visages menaçants qui, par petits groupes, se mêlaient au peuple. Nicolas haussait les épaules avec une mimique d’impuissance. Ils se trouvaient désormais entraînés dans un remous ; bousculés, pressés et à demi portés, ils parvinrent non sans mal jusqu’à la place Louis XV. À nouveau, deux flots grossis de peuple et de voitures se rencontraient, l’un venant du quai des Tuileries et l’autre de la promenade du Cours de la Reine. En se dressant sur la pointe des pieds, Nicolas remarqua que les voitures stationnaient de plus en plus nombreuses sur le quai sans qu’aucun représentant de l’autorité vînt réglementer ce désordre.
    Atteindre l’hôtel des Ambassadeurs Extraordinaires exigea un combat de tous les instants, tant les mouvements divers les poussaient dans des directions opposées. L’inquiétude de Nicolas s’accrut de constater l’absence totale de gardes. Heureusement, pensait-il, aucun membre de la famille royale ne devait assister au spectacle. Ils longèrent non sans mal le Temple de l’Hymen orné d’une magnifique colonnade adossée à la statue de Louis XV. L’ensemble était entouré d’une espèce de parapet dont les quatre angles étaient flanqués de dauphins destinés à vomir des tourbillons de feu. Des symboles de fleuves occupaient les quatre façades et devaient aussi répandre des nappes et des cascades du même genre. Ce palais était surmonté d’une pyramide terminée par un globe. Semacgus critiqua les proportions de l’ensemble, qui lui semblaient manquées. Nicolas releva que la plupart des pièces de départ du feu d’artifice étaient rangées autour de cette architecture ; un bastion de réserve d’où partirait le bouquet avait été disposé derrière la statue, côté fleuve.
    À l’hôtel des Ambassadeurs ils furent accueillis par M. de La Briche, secrétaire de M. de Séqueville, introducteur. Il paraissait hors de lui et peinait à retrouver son souffle.
    — Ah ! monsieur Le Floch, vous me voyez assailli sans répit par des harpies… Je veux dire par les ministres accrédités auprès de Sa Majesté. Malgré mes objurgations, la Ville a distribué plus de places réservées que nous n’en avons à offrir. La banquette des ambassadeurs est plus qu’archipleine. Quant aux chargés d’affaires, je vais devoir les asseoir les uns sur les autres. M. de Séqueville a éprouvé les mêmes misères à Versailles lors des fêtes du mariage…
    Il houspilla vivement deux garçons bleus qui transportaient une banquette et heurtaient un mur tout frais rechampi.
    — J’ajoute banquette sur banquette. Que puis-je pour votre service, monsieur Le Floch ? Où ai-je la tête ? Monsieur le marquis.
    — Le
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher