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Le dernier vol du faucon

Le dernier vol du faucon

Titel: Le dernier vol du faucon
Autoren: Axel Aylwen
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arrachée.»
    La vieille femme semblait embarrassée.
    «Puissant Seigneur, il me faut d'abord implorer votre pardon », finit-elle par répondre.
    Avant que Phaulkon n'ait eu le temps de comprendre ce qui se passait, elle désigna d'un geste sa fesse gauche. A nouveau, un lourd silence plana dans la hutte. Phaulkon sentit des gouttes de sueur perler à ses tempes. Comment cette paysanne pouvait-elle connaître la marque qu'il avait à cet endroit précis de son corps? Il n'en avait jamais parlé, sachant que les Siamois auraient considéré cela comme une tare héritée d'une vie antérieure.
    Un nouveau frisson le parcourut. Il avait vu, une fois, une marque de naissance arrachée de la poitrine d'un criminel après que l'on eut introduit tout autour des échardes de bambou fichées profondément dans la peau.
    Il déglutit. «Et quand, d'après toi, devra s'accomplir cette issue fatale, petite mère ? » demanda-t-il en s'efforçant de conserver un ton détaché.
    Les lèvres de la vieille paysanne se mirent à trembler.
    «Avant que soixante lunes ne soient levées, Seigneur.
    - Soixante lunes ! Mais cela ne représente que deux mois! Voilà qui me laisse à peine le temps de regagner Ayuthia et de dire adieu aux miens. »
    Elle lui jeta un regard chargé de bienveillance.
    «Noble Maître, on peut accomplir beaucoup de bonnes actions en soixante lunes, quand on dispose de votre pouvoir et de votre influence. Lorsqu'un homme sait que le temps qui reste à vivre est limité, il est capable de prodiges.
    - Tu sembles bien sûre de toi, mère. Ne t'est-il donc jamais arrivé de te tromper?
    - Puissant Seigneur, ce n'est pas que je sois sûre de moi. Ce sont les étoiles qui parlent par ma bouche. Car c'est là que le cours de toute vie est écrit. J'ai seulement reçu le don d'interpréter leur message.
    - Mais ne crois-tu pas qu'un homme puisse changer son destin ?
    - Certains détails, peut-être, Seigneur. Mais les grandes lignes de son existence sont immuables.
    - Il n'y a donc rien que je puisse faire? A t'en-tendre, je n'ai qu'à rester assis là, bien sagement, en attendant mon exécution...
    - Je sais bien que vous ne le ferez pas. Car ce n'est pas dans votre nature.
    - Alors tu vois! J'ai peut-être encore une chance de changer le cours de la fatalité !
    - Je ne suis ici que pour vous rapporter les visions qui me sont apparues, Seigneur. »
    Luttant contre le poids oppressant de ces sombres prédictions, Phaulkon décida de mettre la prophé-tesse à l'épreuve. Il avait eu un enfant de sa concubine Sunida, ce que la paysanne avait peu de chances de savoir. De plus, sa femme était enceinte de quatre mois - un fait encore ignoré du public.
    «Est-ce que tu vois des enfants? interrogea-t-il soudain.
    - Puissant Seigneur, j'en vois trois. Mais aucun de la même mère. L'un d'eux ne survivra pas aux émeutes.
    - Des émeutes? répéta-t-il, attentif.
    - De grands troubles vont survenir, mais je ne peux encore dire avec précision les conditions dans lesquelles ces événements se dérouleront. Tout ce que je sais, c'est qu'ils se produiront bientôt.
    - Et ces enfants dont tu me parles, s'agit-il de filles ou de garçons ? »
    La vieille femme esquissa un sourire. «Je vois bien que vous me mettez à l'épreuve, Puissant Seigneur.»
    Une expression de soulagement apparut sur les traits de Phaulkon. Il s'était toujours moqué des man-
    darins de la Cour, incapables de remuer le petit doigt sans consulter leurs astrologues. Les familles leur demandaient de fixer des dates propices pour les mariages, de déterminer les endroits favorables pour construire leurs maisons. D'autres réclamaient leur aide pour retrouver des objets égarés ou volés. Le Seigneur de la Vie lui-même consultait ses brahmanes astrologues à tous propos. Fréquemment, Phaulkon s'était opposé à ces mages en apportant la preuve qu'ils se trompaient - ce qui lui avait valu, d'ailleurs, un regain d'estime de la part de son prestigieux souverain.
    En attendant, cette vieille villageoise pouvait posséder des talents de prophétie remarquables mais, si elle avait vu juste pour sa marque de naissance, elle avait commis une erreur en ce qui concernait le nombre de ses enfants.
    Changeant de sujet, il demanda alors: «Et le Seigneur de la Vie, sais-tu s'il vivra encore longtemps?»
    A l'évocation du nom du roi, la vieille femme toucha le sol du front à trois reprises.
    «Je ne peux vous répondre, Puissant Seigneur. Je dispose
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