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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée
Autoren: Bernard Cornwell
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les marais des abords de la Temse, vers Sceaftes et Wodenes, des
oiseaux pataugeaient dans la glace, à la recherche de vers.
    C’était chez moi. Depuis deux ans, ma demeure
était Coccham, aux abords du Wessex, où la Temse coule vers Lundene et la mer. Moi,
Uhtred, un seigneur de Northumbrie, guerrier et exilé, j’étais devenu un
bâtisseur, un marchand et un père qui servait Alfred, roi de Wessex, non parce
que je le voulais ainsi, mais parce que je lui avais prêté serment.
    Et Alfred m’avait assigné pour tâche de bâtir
son nouveau burh à Coccham. Un burh était une ville fortifiée, et Alfred en
parsemait son royaume de Wessex. Tout au long des frontières, en bord de mer et
de rivières, sur les landes aux confins des terres des sauvages de Cornwallum, on
édifiait des murailles. Une armée dane pouvait passer entre les forteresses, mais
elle en découvrait toujours plus au cœur du royaume, et chacune abritait sa
garnison. Alfred, dans un rare moment d’exaltation, m’avait décrit ces burhs
comme des nids de guêpes d’où un essaim d’hommes pouvait s’envoler pour piquer
les Danes. On en construisait à Exanceaster, Oxnaforda, Cracgelad, Wæced et
partout entre ces villes. Murs et palissades étaient hérissés de boucliers et
de lances. Le Wessex devenait une terre de forteresses, et je devais faire de
la petite ville de Coccham l’une d’elles.
    Tout Saxon de plus de douze ans était
corvéable. La moitié travaillait à construire tandis que l’autre s’occupait des
cultures. J’étais censé avoir cinq cents hommes à tout moment à ma disposition,
mais la plupart du temps ils n’étaient que trois cents. Ils creusèrent, étayèrent
et coupèrent du bois pour les murs, et nous élevâmes une place forte sur les
rives de la Temse. En vérité, il y en avait deux, l’une sur la rive sud et l’autre
sur Sceaftes, une île divisant le fleuve en deux bras. Et en ce mois de janvier
885, les travaux presque terminés, plus aucun navire dane ne pouvait remonter
le fleuve pour piller fermes et villages. S’ils s’aventuraient le long de ces
remparts, ils savaient que mes soldats les suivraient, les acculeraient sur le
rivage et les massacreraient.
    Un marchand dane du nom d’Ulf était venu le
matin même et avait amarré son navire au quai de Sceaftes, où l’un de mes
hommes examinait son fret pour calculer son octroi. Ulf, avec son sourire
édenté, monta me saluer et m’offrit un morceau d’ambre enveloppé de peau d’agneau.
    — Pour la dame Gisela, seigneur, dit-il. Comment
va-t-elle ?
    — Bien, dis-je en portant la main au
marteau de Thor.
    — Et tu as un deuxième enfant ? m’a-t-on
dit.
    — Une fille. Et d’où le tiens-tu ?
    — De Beamfleot.
    C’était compréhensible : Ulf était du
Nord, mais aucun navire ne faisait le voyage de Northumbrie en Wessex au cœur
de l’hiver. Il avait dû passer la saison au sud de l’Estanglie, sur les bancs
de vase de l’estuaire de la Temse.
    — Ce n’est pas grand-chose, dit-il en
désignant son chargement. J’ai acheté quelques peaux et cognées à Grantaceaster
et je pensais remonter le fleuve pour voir si vous autres Saxons aviez encore
quelque argent.
    — Tu es venu pour voir si nous avions
terminé la forteresse. Tu es un espion, Ulf, et je crois que je vais te pendre
à un arbre…
    — Non, tu n’en feras rien, répondit-il
sans s’émouvoir.
    — Je m’ennuie, dis-je en rangeant l’ambre
dans ma bourse. Et voir un Dane se tortiller au bout d’une corde m’amuserait, ne
crois-tu pas ?
    — Tu as dû rire quand tu as pendu l’équipage
de Jarrel, alors.
    — C’est donc ainsi qu’il s’appelait ?
Jarrel ? Je ne le lui ai pas demandé.
    — J’ai vu trente corps. Peut-être plus. Tous
pendus à des arbres, et j’ai pensé que c’était là l’œuvre du seigneur Uhtred.
    — Trente seulement ? Ils étaient
cinquante-trois. J’aurais dû y ajouter le tien, Ulf, pour faire bon compte.
    — Tu ne voudrais pas de moi, répondit-il,
jovial. Il te faut un jeune homme, car ceux-là se tortillent plus que les
vieillards.
    Il cracha en direction d’un petit rouquin qui
fixait l’eau d’un air absent.
    — Tu pourrais pendre ce petit gueux, reprit-il.
C’est l’aîné de ma femme et rien de plus qu’un vit de crapaud. Il se
tortillerait bien.
    — Et comment est Lundene en ce moment ?
    — Le jarl Haesten va et vient. Il est
plus souvent là qu’absent.
    Cela me surprit. Je
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