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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée
Autoren: Bernard Cornwell
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s’y passe d’étranges choses. On raconte que des
hommes peuvent voler dans la nuit et j’ai ouï dire que les morts marchent sur
les mers gelées, mais je n’ai jamais rien vu de tel. Pour moi, ce ne sont qu’histoires
pour effrayer les enfants par les nuits d’hiver, seigneur.
    — Peut-être.
    Je me retournai en voyant un garçonnet courir
au pied de la nouvelle muraille. Il sauta par-dessus les poteaux qui
serviraient à fabriquer la plate-forme de combat, évita une flaque et arriva, essoufflé,
incapable de parler.
    — L ’Haligast, seigneur, dit-il
enfin. L ’Haligast !
    Ulf m’interrogea du regard.
    — Le Saint-Esprit, traduisis-je.
    — Il arrive, seigneur, reprit le jeune
garçon en désignant l’amont du fleuve. Maintenant !
    — Le Saint-Esprit arrive ? s’alarma
Ulf.
    Il n’avait sans doute pas la moindre idée de
ce que c’était, mais il en savait assez pour redouter les spectres et ma
question sur les morts l’avait effrayé.
    — C’est le navire d’Alfred, expliquai-je.
Le roi est à bord ? demandai-je au garçon.
    — Son étendard y flotte, seigneur.
    — Alors il y est.
    — Alfred ? interrogea Ulf. Que
veut-il ?
    — Savoir à qui je suis loyal, ironisai-je.
    — Alors c’est toi qui pourrais te
retrouver pendu au bout d’une corde, hein, seigneur ? dit Ulf.
    — Il me faut des cognées, répondis-je. Apporte
tes meilleures chez moi et nous parlerons du prix plus tard.
    L’arrivée d’Alfred
ne me surprenait pas. À cette époque, il passait beaucoup de temps à voyager
entre les burhs pour en suivre la construction. Il était venu à Coccham à une
dizaine de reprises en autant de mois, mais cette fois, à mon avis, ce n’était
pas pour inspecter les murailles mais pour découvrir pourquoi Æthelwold était
venu me voir. Les espions du roi s’étaient acquittés de leur tâche et il
voulait m’interroger.
    Son navire arrivait rapidement, porté par le
courant. Durant l’hiver, il était plus rapide de naviguer, et Alfred aimait Haligast, parce qu’il pouvait travailler à son bord tout en voyageant le
long de la frontière nord du Wessex. Le navire avait vingt rameurs et assez de
place pour la moitié des gardes du roi et son inévitable horde de prêtres. La
bannière royale, un dragon vert, flottait au grand mât, et deux à l’espart, l’un
orné d’un saint et l’autre d’une croix blanche sur fond vert. À la poupe se
trouvait une petite cabine où le timonier était à l’étroit, mais où Alfred
pouvait installer une table. Un second vaisseau, l’ Heofonhlaf, transportait
le reste des gardes et d’autres prêtres. Son nom signifiait « Pain du ciel ».
Alfred n’était pas doué pour baptiser ses navires.
    L’ Heofonhlaf accosta le premier, et une vingtaine d’hommes armés en maille débarquèrent et s’alignèrent
sur le quai de bois. L’ Haligast suivit et heurta la jetée si violemment
qu’il fit tituber Alfred, qui se tenait au milieu du navire. Certains rois
auraient fait étriper un timonier pour leur avoir fait perdre leur dignité, mais
Alfred sembla ne rien remarquer. Il était en grande conversation avec un moine
au visage étroit et pâle. C’était Asser de Galles. J’avais ouï dire que le
frère Asser était le nouveau favori du roi et je savais qu’il me haïssait, ce
qui était bien légitime car je le détestais.
    Je lui fis tout de même un sourire et il
recula, comme si j’avais vomi sur sa robe, puis il se pencha vers Alfred, qui
aurait pu être son jumeau car il avait plus l’air d’un moine que d’un roi. Il
portait une longue cape noire et sa calvitie ressemblait à la tonsure d’un
moine. Comme celles des clercs, ses mains étaient toujours tachées d’encre, et
son visage maigre était aussi grave que pâle. Il était souvent rasé de près, mais
ce jour-là il portait une barbe semée de blanc.
    L’équipage amarra le navire et Alfred prit le
bras d’Asser pour débarquer avec lui. Le Gallois portait sur sa poitrine une
énorme croix qu’Alfred toucha un instant avant de se tourner vers moi.
    — Mon seigneur Uhtred, dit-il.
    Il était d’une amabilité peu coutumière, non
parce qu’il était heureux de me voir mais parce qu’il pensait que je complotais
de le trahir. Je n’avais guère d’autres raisons pour fréquenter son neveu Æthelwold.
    — Mon seigneur, dis-je en m’inclinant.
    J’ignorai le frère Asser. Le moine m’avait
naguère accusé de piraterie, de meurtre et
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