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Le bouffon des rois

Le bouffon des rois

Titel: Le bouffon des rois
Autoren: Francis Perrin
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sourire le souverain. Ortis, le More du roi,
amuseur africain, mahométan converti au christianisme qui fut moine chez les
cordeliers, divertit quelques mois la cour avant de trépasser à la suite d’un
coma éthylique lorsque des courtisans ivres le forcèrent à engloutir une jarre
d’eau-de-vie qui provoqua sa mort.
     
    Venue
d’Éthylie,
    Ortis but
l’eau-de-vie
    Qui devint
l’eau-de-mort
    Il était né
noir
    Il est mort
noir
    Le More est
mort !
     
    On l’enterra dans ses habits de moine.
    Ensuite, apparut Villemanoche, un garçon d’humeur joyeuse,
du genre pince-sans-rire. Il avait deux lubies : la première, il se disait
noble, affirmant que ses ancêtres remontaient à l’Antiquité. La seconde :
persuadé que toutes les princesses rêvaient de l’épouser, il se lamentait de ne
trouver aucun parti digne de lui dans le royaume. Ce n’était qu’un fou
occasionnel que l’on payait au cachet mais il n’a jamais vraiment appartenu à
la maison du roi. Il faisait partie de ces fous qui réjouissent par hasard en
disant un bon mot.
    Celui qui était digne de me succéder s’appelait Brusquet, de
son vrai nom Jehan-Anthoine Lombart, d’origine provençale. Il avait d’abord
exercé la médecine et avait été employé un temps au camp d’Avignon où il fit
tant de victimes par son ignorance qu’on allait le pendre. Il réussit à
s’enfuir en se cachant dans une troupe de farceurs qui sillonnait les provinces
et finit par se perfectionner à tel point qu’un grand seigneur le remarqua et
l’introduisit à la cour où il fut tout de suite apprécié : je sentis dès
son arrivée que mon départ était proche.
    C’était dans l’ordre des choses, je voyais bien que les
plaisirs de la cour devenaient plus vifs et plus ingénieux, le bouffon tel que
je l’avais créé allait perdre de son lustre et on lui préférerait les bals et
le luxe élégant aux élucubrations d’un malheureux privé de l’usage de la
raison.
    Un jour prochain, le roi ne tolérera que des flatteurs de
cour au sourire hypocritement radieux qui n’oseront jamais grimacer une ombre
qui puisse effleurer le soleil de sa gloire, vivant dans la crainte d’être
envoyés en exil ou dans quelque geôle dont on ne s’évade jamais. Je portais
autour de mon cou des tablettes où étaient inscrits les noms de ceux qui me
faisaient concurrence et cela n’amusait que moi.
    François I er , en passant par un bel
après-midi d’été dans le quartier des halles, entrevit une femme exquise et
ravissante qui était l’épouse de l’avocat Jean Féron. Lui fixer un rendez-vous
par le truchement d’un de ses familiers fut aussi rapide que l’avait été la
séduction. La dame mit quelque coquetterie avant de consentir. Elle exigea
mille précautions, connaissant à merveille le caractère peu accommodant de son
époux, mais malgré ces précautions, trop tôt négligées, et surtout grâce à
l’intervention bienveillante d’un de ces « amis qui vous veulent toujours
du bien », Jean Féron apprit qu’il était royalement pourvu du double ornement
qui pare les taureaux de combat. Sa fureur ne connut pas de bornes et la fureur
des avocats, nul ne l’ignorait, était de l’espèce la plus redoutable. Féron
rumina naturellement les plus sombres projets de vengeance, voire celui d’ôter
la vie à son rival, couronné et par son rang et par sa femme. Sa rage prit un
tour imprévu, machiavélique et funeste. Il rechercha, au risque d’en périr
lui-même, quelque ribaude frappée de ce mal qu’on appelle napolitain.
    En peu de nuitées, il le prit pour le transmettre
incontinent à sa conjointe infidèle. Et mon pauvre roi constata peu après qu’il
était sans nul doute, ses médecins consultés, victime du plus terrible des
coups de pied que Vénus, parfois redoutable, peut donner.
    Comme il ne cessait de prodiguer à la duchesse d’Étampes son
affection agissante, Anne, atteinte à son tour, dut faire appel aux soins
éclairés du docteur Fernel qui parvint à endiguer le mal en lui ordonnant de
prendre quatre fois par jour des bains de lait d’ânesse. Elle ne garda nulle
rigueur à son partenaire d’une erreur, dont ses vingt-trois ans la sauvèrent
autant que le lait des troupeaux d’ânesses amenés chez elle à grands frais.
    Les traitements massifs à base de mercure altèrent la
robuste santé du roi aussi bien que son caractère. Des boursouflures
apparaissent aux joues d’abord, puis aux bras et
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