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L'armée perdue

L'armée perdue

Titel: L'armée perdue
Autoren: Valerio Manfredi
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glaciale, parmi ces peuples hirsutes, dans cette politique de village, pour être consigné sur une feuille blanche ?
    Un soir où il dînait en compagnie des officiers supérieurs dans la cabane de Seuthès, j’invitai Mélissa. Bavarder avec elle me réconfortait.
    « Je ne te comprends pas, dit-elle, Xéno a agi du mieux possible. À quoi t’attends-tu ? À ce qu’il soulève l’armée contre Byzance et la rase ? Je le sais, cette vie est dure, mais au moins nous avons de la nourriture et un abri. Une fois que nous aurons passé l’hiver, nous chercherons une autre solution. Ne te décourage pas. »
    J’ignorais quoi lui répondre. Je préparai une boisson à base de lait chaud et de miel, qui était mon seul réconfort, un petit luxe que je m’octroyais avec mon amie. Et puis Mélissa avait de belles histoires à raconter, des histoires qui finissaient toujours par me tirer un sourire : comment elle avait séduit de grands personnages, chefs d’armée, gouverneurs, philosophes, artistes. Ils avaient tous été à ses pieds et elle les avait utilisés. En leur donnant la seule chose qu’ils désiraient, elle avait obtenu d’eux maisons, bijoux, vêtements, parfums, mets raffinés, fêtes et réceptions.
    « En vérité, il ne m’est rien resté, disait-elle, car il faut toujours être élégante, bien coiffée, fardée, parfumée, ce qui coûte cher. Certes, si Cyrus avait gagné… Tu te rends compte ? J’aurais été sa maîtresse pendant un moment et il m’aurait couverte d’or… Bah, c’est la vie. Tant pis. Au fond, Cléanor est un vrai homme, ou plutôt un taureau. Et il est gentil avec moi. Il me donne tout ce qu’il peut. Mais quand cette guerre infecte sera terminée, je m’en irai dans une belle ville côtière, je trouverai une jolie maison où recevoir des hôtes de haut rang, et je m’enrichirai rapidement. C’est facile, tu sais. Il suffit d’enfiler une robe transparente et une jolie paire de sandales, et de se montrer en allant sacrifier deux colombes au temple d’Aphrodite. Puis on fait circuler le bruit selon lequel on se rend fréquemment dans des thermes particuliers, et le tour est joué. Une fois que les hommes t’ont vue nue, ils sont prêts à payer n’importe quelle somme pour te posséder. Naturellement, il faut avoir le physique adéquat. Tu sais que tu n’es pas mal du tout. Si Xéno te quittait un jour, tu aurais un avenir avec moi et nous serions bien, ensemble.
    — Oh oui ! Je viendrais volontiers, mais je suis incapable de séduire les hommes. Je te servirais de femme de chambre. Nous nous moquerions bien de ces imbéciles, n’est-ce pas ? »
    Et nous riions pour combattre la mélancolie des longues nuits.
    Un jour, je cédai à la tentation et je la priai de me lire les pages de Xéno.
    « Pourquoi me demandes-tu une chose pareille ? Je l’ai déjà fait une fois, et cela nous a porté malheur. Xéno t’aime, il t’a toujours gardée auprès de lui. Ces écrits lui appartiennent et il ne les a jamais montrés à personne, n’est-ce pas ?
    — Oui. Mais il faut que je sache ce qui est écrit dans ces pages.
    — Ce ne sont peut-être que des réflexions sur la vie, sur les principes, les vertus, les vices. Tu sais, il a été l’élève de Socrate.
    — … d’Achaïe ? Je ne savais pas qu’ils se connaissaient avant de partir.
    — Non. Un autre Socrate, son maître. Le plus grand sage de notre époque.
    — Je ne crois pas. Xéno a écrit l’histoire de l’expédition. Lis-moi les dernières pages.
    — Pourquoi ?
    — Je cherche une réponse à une question que je me pose depuis longtemps.
    — Ce n’est pas une bonne idée. Ce qu’on pense et écrit quand on est seul ne correspond pas toujours à la vérité. La vérité, c’est ce qu’on fait dans la réalité, la façon dont on agit. Ce sont les faits qui importent, pas les mots.
    — Je t’en prie. J’ai toujours eu de l’affection pour toi, même quand…
    — … je t’ai trahie ? »
    Je faillis répliquer que ce n’était pas ce que je voulais dire. Mais c’était trop tard, Mélissa avait compris.
    « D’accord, dit-elle, comme tu veux. Je suis débitrice et je t’obéirai, mais c’est une erreur qui pourrait te gâcher la vie.
    — Je le sais. »
    Elle ouvrit le coffret et demanda : « À partir d’où ? Chaque étape que nous avons parcourue porte un numéro.
    — Depuis notre arrivée à la ville
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