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Lancelot du Lac

Lancelot du Lac

Titel: Lancelot du Lac
Autoren: Jean Markale
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INTRODUCTION
    Celui qui devait venir
     
    À considérer l’ensemble des multiples épisodes qui constituent la grande épopée arthurienne, et dont le couronnement sera l’étrange Quête du Graal , on discerne aisément les éléments d’une subtile théogonie devenue, par une sorte de jeu littéraire, une fantastique cosmogonie où rien n’est laissé au hasard. Chaque personnage apparaît au moment opportun, chargé non seulement de sa propre histoire mais aussi de celle des autres, de cette collectivité d’abord informelle puis régie selon des normes précises. Le but avoué est de créer sur cette terre une société parallèle à celle qui est supposée exister dans un autre monde, le monde des « idées pures » si cher à Platon et aux néo-platoniciens, dont le plan est tracé par Dieu dans le chemin des étoiles et que les êtres humains doivent retrouver coûte que coûte s’ils veulent aller au bout de leur destin, s’ils veulent enfin accomplir ce qui a été prévu de toute éternité. Mais les êtres humains sont doués de liberté, et cette liberté, dont l’apprentissage n’est pas toujours réussi, peut les conduire en des impasses d’où il n’est pas toujours possible de revenir indemne. L’erreur est toujours pardonnable, mais elle laisse des blessures qui ne se guérissent jamais vraiment.
    Tout cela pose le problème, terriblement actuel, du déterminisme (voire du fatalisme) qui marque la recherche scientifique dans son ensemble, et plus particulièrement du « conditionnement » de l’individu humain qui serait emprisonné dans un programme génétique savamment mis au point, on ne sait d’ailleurs par quelle entité supérieure, au cours d’un « big-bang » aussi mystérieux qu’une équation mathématique prétendant expliquer le monde et l’existence. Mais les auteurs du cycle arthurien, loin de tomber dans le piège de l’analyse, tentaient de réintégrer l’humain dans une dimension cosmique à l’aide de notions simples et concrètes, matérialisées par des aventures , au sens étymologique du terme, c’est-à-dire des événements « sur le point d’arriver », ce qui laissait, nul ne peut en douter, une certaine incertitude sur un futur à la fois proche et lointain, néanmoins riche de potentialités en tout genre. Les romans arthuriens déroulent leurs arcanes majeurs sur une scène constamment bouleversée, alternativement soumise aux influences de l’ombre et de la lumière, où se débattent des acteurs qui semblent avoir oublié leur texte et qui improvisent, au fil des minutes, un jeu dramatique dont ils n’ont plus conscience des significations réelles. Pourtant, le plan divin, quel que soit le nom du dieu invoqué, est présent, dans le labyrinthe déroutant d’une forêt de Brocéliande parfaitement mythique, dont les sentiers, d’abord larges et somptueux, se perdent dans des fouillis de broussailles où dominent les ajoncs, ces arbustes qui égratignent au passage les imprudents désireux de continuer à errer à travers l’obscur, dans l’espoir fou de découvrir la clairière où se dressent les structures immanentes du château du Graal.
    Il y a pourtant des guides dans cette forêt. Toutes ces errances, qui peuvent paraître invraisemblables à des esprits mûris dans la logique méditerranéenne binaire héritée d’Aristote, ont été préparées de longue date par des précurseurs qui, chacun dans son époque, ont dévoilé une partie du message originel, celui qui a été perdu – symboliquement – durant l’épisode de la tour de Babel. Puis est apparu Merlin devant le roi Vortigern, traître, dictateur mais tristement faible par rapport au divin, avec toute sa verve diabolique , lui, l’enfant d’un démon incube, connaissant ce qui a été, ce qui est et ce qui sera. Merlin a été le « diable », « celui qui se jette en travers », le « provocateur » nécessaire à toute progression de l’aventure humaine, le prophète inspiré qui prêche le faux pour que surgisse le vrai, le « magicien » qui dérange l’ordonnancement d’un monde pourrissant pour que ce monde puisse renaître de sa dissolution et parvenir sinon à sa perfection, du moins à une étape supérieure de son évolution. Merlin, le diable… C’est-à-dire celui qui détruit le « ce qui va de soi » pour introduire la notion d’accomplissement. Merlin, le « Fou du Bois », qui vient réconcilier les inconciliables, le Bien et
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