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Lacrimae

Titel: Lacrimae
Autoren: Andrea H. Japp
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quand la fantaisie de me jeter dehors, sans le sou, le prendra. Aussi me fais-je très rare, ainsi que je te l’ai dit. J’ai honte, Amâtre, la honte m’étouffe… parce qu’il me fait peur, termina-t-il dans un murmure.

    Le silence s’installa, bercé par le bruissement des feuilles sous le vent, par les sons diffus et indistincts de la vie de la forêt. Soudain, Amâtre passa son bras musculeux autour du cou de son jeune frère, le tirant vers son torse puissant.
    — Nulle honte, mon frère. C’est un soudard et un bandit. Un sans-honneur qui la baille belle 6 en contant ses exploits de bravoure. Ah ça ! J’ai appris de fort vilaines histoires à son sujet, lors de mon voyage. Je n’étais pas encore certain de te les devoir rapporter. Un bâtard noble, reconnu sur le tard ? Qu’elle est plaisante, celle-là ! Notre père, le héros, est un gueux, un coupe-jarret de la plus vile espèce. J’ai remonté sa trace jusqu’à Blois.
    — Que veux-tu dire ? s’étonna Cyr en détaillant le lourd faciès de son aîné.
    — Oui-da ! Un ancien bandit de chemins qui a amassé une jolie fortune en égorgeant, en torturant, puis en dupant ses compagnons de vilenies car il n’avait aucune intention de partager le butin. Philippe Barbette de son véritable nom, seigneur autoproclamé de Saint-Denis-d’Authou. Le reste, son passé de preux guerrier, d’éternel voyageur – expliquant que nul ne l’ait connu dans le coin – n’est que contes à dormir debout. La description que j’en ai obtenue à trois reprises, notamment de la part d’un vieux prêtre, lui sied tel un gant, jusqu’aux quatre doigts qu’il lui reste à la main gauche. C’est lui, te dis-je, même si je suis le seul à avoir fait le rapprochement. La vie de cet assassin détrousseur a été mise à prix dans plusieurs provinces, avant notre naissance.
    — Diantre !
    — Ne nous reste qu’à le livrer à la justice royale, qui lui réglera son affaire au plus preste, conclut Amâtre.
    Cyr digéra ces informations qui changeaient du tout au tout le plan qu’il avait formé depuis longtemps.
    — Mon frère, ne nous hâtons pas. Jouons de patience. Réfléchissons encore. Or donc, nous sommes les rejetons d’un vil coquin nommé Barbette qui a usurpé un titre, un nom au vieux Géraud en le contraignant à le reconnaître comme son bâtard noble. Dès lors, la seigneurie ne te revient plus, ni les biens. De plus, quelle sera la réaction d’Ivine, non que je doute qu’elle ait formé un attachement pour toi, que ton éloignement a sans doute attisé, ainsi qu’il est fréquent chez les dames. Toutefois, elle est de bien plus belle naissance que nous, et de sang noble. Même si son cœur la pousse vers toi, son rang lui interdira de telles épousailles et son père exigera son retour, d’autant que par lien de sang, la seigneurie reviendrait alors à celui-ci. Et puis, et pardonne-moi cette pensée bien égoïste, si tu te retrouves pauvre paysan sans terre, que deviendrai-je ?
    Connaissant la petitesse d’esprit de son frère, Cyr fut certain que ce dernier argument le convaincrait tout à fait de sa sincérité.

    Un pesant silence se réinstalla. Il fallait du temps à Amâtre pour soupeser ce raisonnement. Un claquement exaspéré de langue, puis :
    — Tu as raison. J’avais oublié ton agilité d’esprit. Alors quoi ? Un duel ?
    Cyr fit mine de réfléchir. Cette perspective, la plus prometteuse avant les révélations de son frère, devenait trop risquée. L’idée qu’il cajolait depuis des années – pousser les deux hommes à s’entre-tuer – avait été pourtant bien séduisante. Dans l’éventualité où leur père avait le dessus sur Amâtre, il ne resterait à Cyr qu’à se débarrasser ensuite du vainqueur. Dans le cas contraire, Amâtre tuant Philippe en combat singulier, Cyr se faisait fort de se rapprocher du secrétaire du bailli, un Leonnet Charon qui n’avait pas inventé l’eau tiède mais qu’il flattait de façon subtile depuis deux ans. Il insinuerait alors qu’il y avait eu traîtrise, que son aîné avait occis leur père en profitant d’une faiblesse, due à la beuverie par exemple, dans l’unique but de récupérer les biens et la veuve. Le duel se métamorphosait en odieux parricide, Amâtre était pendu et Cyr devenait seigneur. Cependant, sa belle ruse venait de s’effriter. En effet, si tel était le cas, en dépit de son esprit obtus, Amâtre comprendrait qu’il
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