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La véritable histoire d'Ernesto Guevara

La véritable histoire d'Ernesto Guevara

Titel: La véritable histoire d'Ernesto Guevara
Autoren: Rigoulot
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l’armée gouvernementale.
    Avec la fatigue et la dénutrition, les ressorts psychologiques de toute cette folie se manifestèrent plus ouvertement. Guevara multiplia les actes suicidaires, allant au-devant de paysans dont il savait qu’ils allaient le dénoncer, ne se défaisait pas de deux mules qui retardaient la marche de son groupe ou campait sans précaution au milieu d’une route. Comme halluciné par cette mort qui serait son dernier et plus grand sacrifice pour la Révolution, il voulait, disait-il, aller « au bout » et demanda, méprisant, à ceux de ses compagnons qui voulaient quitter ces lieux malsains si c’est la peur qui les faisait parler 154 … !
    Il sembla comprendre enfin, début octobre, qu’une autre piste était possible. Il fallait, dit-il, chercher des zones plus propices et rétablir les contacts avec la base urbaine… C’était trop tard.
    Le 8 octobre 1967, Che Guevara fut fait prisonnier et abattu le lendemain.
    On ne manque pas habituellement de dénoncer ici la CIA, mais la CIA voulait le garder vivant pour qu’il soit jugé par les Nations unies et « faire pression sur Castro pour la libération des prisonniers politiques à Cuba. En plus, les Américains ne voulaient pas que le Che devînt une icône, un martyr plus dangereux mort que vivant 155 . »
    On met aussi en avant le PC bolivien qui aurait refusé d’appuyer la lutte du Che par couardise et par mollesse idéologique et politique. Mais Monje, en affirmant que les conditions n’étaient pas mûres, avait quelques arguments. Après tout il connaissait le pays, il y luttait depuis des années. Le Che avait balayé ses objections d’un revers de main, persuadé qu’« il suffit de vouloir pour pouvoir »… Guevara, dans sa folie sacrificielle, pensait que même l’échec était une manière de faire avancer les fameuses « conditions subjectives » : s’ils échouaient, le sang versé susciterait l’indignation, l’admiration et donc favoriserait la seconde vague de révolutionnaires, celle qui prendrait la place de ce commando d’avant-garde.
    Le 12 octobre 1967 au tribunal militaire de Camiri, Régis Debray affirme, non sans grandiloquence, que Guevara n’est pas de ceux qui meurent mais de ceux qui sont immortels : « Un Che est mort, d’autres vont naître, surgissant de l’action… L’Histoire et les révolutionnaires futurs se chargeront de juger ceux qui portent en eux la responsabilité de sa mort, de quelque côté qu’ils se trouvent. »
    Rien n’est moins sûr. Debray est d’ailleurs revenu de ce type de formule et ne pense plus que Guevara ait été comme « un ange foudroyé par un coup du sort » mijoté par l’impérialisme. Ce risque-tout en avait trop rajouté dans l’impréparation, l’ignorance des conditions de lutte, l’absence de communication avec l’extérieur. « Le Che n’a pas volé sa mort », laissera tomber plus tard Debray avec raison : « il la couvait depuis dix ans 156 . »
    Le pire ennemi du Che, en somme, ce fut le Che lui-même… Il s’est immolé comme « une victime expiatoire qui meurt pour racheter les siens » mais aussi comme « le paladin s’immolant en silence à son Charlemagne, tel le comte Roland refusant jusqu’au bout de sonner l’olifant ». Sans doute s’agissait-il de ne pas paraître lâche aux yeux du porteur de la Loi. Comme Roland, qui ne refuse d’ailleurs pas de sonner du cor jusqu’au bout, mais lorsqu’il a acquis la certitude que l’empereur arrivera trop tard pour le sauver. Charlemagne sera désormais chargé de la gestion d’un mort, d’une vie, d’un combat, d’un cri et bientôt d’un mythe.

XII
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    Le Che et nous…
    « J’adore ce pull – un cachemire d’une maison de luxe bien connue,
    et je trouve cette association avec le Che d’une insolence folle,
    qui n’est pas pour me déplaire »
    Juliette Gréco in VSD, 22 avril 2009
    « Dans la vie aussi les visages aimés s’usent
    comme les coudes des chandails »
    Pascal Quignard
    L es adolescents ont pu voir un temps chez Guevara, un homme qui n’était pas lié à une théorie, à un parti ou une organisation, ni même à un État – car était-il Cubain, notre Argentin ? Argentin, notre Cubain ? Ils aimaient en lui celui qui ne trouvait pas le marxisme dans les livres mais comme une évidence « tellement incorporée à la conscience des peuples que l’on ne pouvait même pas penser à le remettre en
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