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La Revanche de Blanche

La Revanche de Blanche

Titel: La Revanche de Blanche
Autoren: Emmanuelle Boysson (de)
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suivant, Louise fut l’héroïne des Plaisirs de l’Île enchantée . Son entrée officielle à la Cour, devant six cents invités dans les jardins de Versailles, choqua moins que la représentation de Tartuffe. Les dévots crièrent au scandale ; la reine mère fit interrompre la représentation. Charlotte de Bouillon, la fille d’Arsinoé, en profita pour s’entretenir avec Charles de La Vallière dont elle avait été amoureuse autrefois, afin d’obtenir que sa fille, Aglaé, fasse partie des dames d’honneur de la reine.
     
    En cet automne, une blonde fait tourner la tête des messieurs emplumés. Mariée il y a un an à Louis-Henri de Pardaillan de Gondrin, marquis de Montespan, Athénaïs se désintéresse autant de son mari que de ses enfants. Le roi l’a vue danser dans le ballet opéra, Les Amours d’Hercule, composé par Benserade. La Montespan a ému le duc de Noailles, Louis la trouva souple comme un liseron. Sans plus.
    Le 16 novembre, la reine, Marie-Thérèse, met au monde un troisième enfant, une petite fille contrefaite, velue comme une Mauresque, qui mourra le mois suivant.
    Deux jours plus tard, la comtesse du Plessis-Guénégaud reçoit à l’hôtel d’Albret ce qui compte à Paris, excepté le roi parti se promener avec Louise de La Vallière dans les marécages qui entourent l’ancien pavillon de chasse de son père à Versailles. Pour l’occasion, les dames de Port-Royal sont sorties de leur abbaye. Blanche s’incline avec malice devant les vieilles Précieuses. Ce troupeau de pédantes fripées se délecte de crème fouettée. Blanche saisit des bribes de conversation : « Introspection, mortification, salut, contagion… » Elle lève les yeux au ciel. Pâle et grave, le père Rapin apostrophe la duchesse de Longueville :
    — Vous pratiquez un libertinage plus dangereux pour vous que celui des sens, le libertinage de l’esprit.
    — Je n’ai renoncé ni à la délicatesse ni à l’esprit, mon père, murmure la duchesse, yeux mi-clos.
    Voix affectée, gestes étudiés, poses : amaigrie par les jeûnes, Anne-Geneviève de Longueville ressemble à une Madeleine sur le retour. La Grande Mademoiselle expose à Mme de Motteville son projet de retraite idyllique dans une Arcadie qui bannirait le mariage et l’amour ; Blanche descend au jardin. Un blondinet, gringalet boutonneux, s’amuse avec un chaton enrubanné de rose. De deux ans son aîné, Charles-Paris, comte de Saint-Pol, bâtard du duc de La Rochefoucauld et de la duchesse de Longueville, ne manque pas de branche. Esprit caustique, à l’image de son père naturel, il aborde Blanche d’une voix pointue :
    — Ces vieilles biques me font mourir d’ennui. Comment vous appelez-vous, jeune fille ?
    — Blanche, Blanche de La Motte.
    — Adorable ! Morbleu ! Le chat de ma mère a disparu derrière les buis.
    Les jeunes gens se mettent à chercher le fugueur.
    — Il est là-haut, perché sur le pommier ! s’écrie Blanche.
    Charles grimpe à l’arbre, en descend avec le siamois. Après un signe de tête, il disparaît dans les nuées du salon.
    Au moment de partir, Blanche surprend Charlotte de Bouillon susurrer à la comtesse du Plessis-Génégaud :
    — Qui aurait dit que la fille d’Émilie reviendrait parmi nous ? N’est-ce pas mauvais signe ?
    Choquée par tant de médisance, Blanche rejoint Ninon dans sa chaise.
     
    Une matinée grise de lendemain de Toussaint, un postier frappe à la porte de la maison. Blase, le laquais préféré de Ninon, lui propose un verre de vin blanc de Loire. Il vide la carafe, sort d’une sacoche une lettre en provenance de Nouvelle-France.
    — C’est la petite qui va être contente, se réjouit le valet qui file dans la chambre de Blanche, lui tend la lettre.
    Sur l’enveloppe, une écriture penchée qu’elle ne connaît pas. Elle décachette le pli et lit, la gorge serrée.
    Ma chère fille,
    Je voudrais tant que tu me pardonnes de ne pas t’avoir écrit plus tôt et d’avoir été un si mauvais père. Depuis ta naissance, je ne cesse de penser à toi, de t’aimer, de prier pour toi. Tu es ce que j’ai de plus cher au monde. Ta maman m’a si souvent parlé de ta gaieté, de ta beauté, de tes dons, de ton courage aussi. Il t’en faudra beaucoup à présent et je ne doute pas que ta foi, ta force de caractère t’aideront à surmonter la triste nouvelle qu’il me faut t’annoncer. Ta merveilleuse maman est montée au ciel. Elle s’est
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