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La mort du Roi Arthur

La mort du Roi Arthur

Titel: La mort du Roi Arthur
Autoren: Jean Markale
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et à mesure que tombait la nuit.
    Ils approchèrent d’un tertre {83} et aperçurent, gisant là, deux corps. Ils se penchèrent sur le premier et reconnurent le visage ravagé de Mordret, le traître, responsable du désastre. Il avait la poitrine transpercée par une lance dont la hampe s’était brisée. Entendant alors un gémissement, ils allèrent vers le second et, tout en poussant de grands cris, s’agenouillèrent, car ils venaient de reconnaître le roi Arthur. « Seigneur roi ! s’écria Girflet, comment te sens-tu ? » Le roi tenta de se soulever, mais n’y put parvenir. Il murmura lentement : « Aidez-moi, je vous prie. Il ne me reste plus qu’à monter à cheval et à m’éloigner d’ici, car je vois bien que ma fin approche, et je ne veux pas mourir au milieu de mes ennemis. »
    Lucan se mit donc en quête de trois chevaux et, quand il les eut trouvés, revint auprès d’Arthur. Girflet et lui eurent beaucoup de mal à hisser le roi sur l’un des destriers, mais, lorsque ce fut fait, tous trois partirent en direction de la mer et chevauchèrent jusqu’à ce qu’ils fussent arrivés près d’une chapelle qu’on nommait la Noire Chapelle. Un ermite, qui logeait dans un bocage voisin, y chantait la messe chaque matin.
    Le roi, qui avait repris quelque force, descendit sans aide de son cheval et entra dans la chapelle. Là, il s’agenouilla devant l’autel et entreprit de réciter les prières qu’il connaissait. Et il demeura ainsi jusqu’au matin, sans bouger. Et, tout en priant, il pleurait si fort que Lucan et Girflet en étaient profondément attristés. Au matin, cependant, Lucan, qui se tenait derrière lui, vit qu’il ne bougeait pas. Il lui dit alors en pleurant : « Ah ! roi Arthur ! Quel chagrin nous avons pour toi ! »
    Le roi, en entendant ces paroles, se redressa péniblement, appesanti qu’il était par le poids de ses armes. Il saisit dans ses bras Lucan, qui était désarmé, et l’étreignit d’une si forte étreinte qu’il lui creva le cœur et que, sans pouvoir proférer un mot, celui-ci vit son âme lui quitter le corps. Au bout d’un long moment, Arthur enfin desserra son étreinte, sans même se rendre compte que Lucan fût mort. Mais Girflet vit que l’échanson ne bougeait plus ; il l’examina attentivement et, comprenant que le roi l’avait étouffé, se mit à gémir : « Ah ! seigneur roi ! Quel mal as-tu donc fait ! Tu as tué Lucan sans le vouloir ! »
    Arthur tressaillit, regarda autour de lui et vit Lucan inerte sur le sol. Son deuil redoubla et, éperdu de douleur, il s’écria : « Girflet, la Fortune qui me fut une mère m’est devenue une abominable marâtre. Elle veut que je passe dans le chagrin et la tristesse les derniers instants qui me restent à vivre. »
    Il ordonna au fils de Dôn de seller et de brider les chevaux, puis il monta en selle, et tous deux se dirigèrent vers la mer dont ils atteignirent le rivage vers l’heure de midi. Arthur descendit alors de son cheval, détacha son épée de sa ceinture, la tira du fourreau et l’examina pendant un long moment. L’épée brillait sous le soleil d’un éclat qui étincelait sur le visage de Girflet. « Ah ! dit Arthur, Excalibur, ma bonne, ma précieuse épée, la meilleure de ce monde après l’Épée aux Étranges Renges {84} , tu vas perdre ton maître ! À moins de tomber aux mains de Lancelot, où trouverais-tu un homme qui sache t’employer aussi bien que moi ? Ah ! Lancelot, le plus généreux de tous les hommes, le plus brave et le plus digne des chevaliers ! Plût à Dieu que tu eusses pu la brandir pour la gloire du royaume de Bretagne ! Si je savais qu’elle pût te revenir, mon âme en serait désormais plus à l’aise ! »
    Puis il dit à Girflet : « Monte sur cette colline qui est derrière nous. D’en haut, tu apercevras un lac {85} . Va jusque-là et jettes-y mon épée, car je ne veux pas qu’elle demeure en ce royaume. De mauvais héritiers risqueraient de s’en emparer. – Seigneur, répondit Girflet, je t’obéirai volontiers, mais j’aimerais mieux que tu me confies cette épée. – Cela ne se peut, dit sèchement Arthur. Ce n’est pas toi qui dois l’avoir, car tu n’en ferais pas un assez bon usage. Obéis et va jeter cette épée dans le lac. »
    Girflet escalada donc la colline et, ayant repéré le lac, s’en approcha. Puis il dégaina et se mit à contempler l’épée. Et il la trouva si belle et si
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