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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium
Autoren: Jose Frèches
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l’aire du supplice, est provoqué par l’escadrille de mouches bleues bourdonnantes et assoiffées de sang qui tournoient comme des folles au-dessus du corps nu de l’homme.
    L’homme en question est accroché par les poignets et les chevilles à deux planches croisées pour former un « X   ».
    Lorsqu’il aura rendu le dernier souffle, le festin des insectes carnivores pourra commencer et le nuage vrombissant, déchaîné, assoiffé de sang de ces charognards volants recouvrira d’un manteau vorace son cadavre encore palpitant.
    Alors seulement, l’odeur aigrelette de la mort se dissipera et la place, peu à peu, se videra.
    Mais les mouches aux somptueux reflets turquoise vont devoir patienter. La peine à laquelle cet homme a été condamné a en effet pour nom « mort par découpage lent   ».
    L’expression est à prendre au pied de la lettre.
    Ses chairs vont être découpées avec minutie et patience, si doucement même que la victime va mettre beaucoup de temps à mourir. Son bourreau a appris à faire durer le plaisir, ou plutôt à prolonger jusqu’aux limites les plus extrêmes son épouvantable souffrance en faisant en sorte que les principales artères et veines de son corps soient épargnées le plus longtemps possible pendant qu’il procède au découpage de sa victime.
    Ne sont capables d’assister de bout en bout à ce supplice inventé par les Mongols I , sans jamais baisser les yeux ni détourner le regard, que les gens sous opium, et, de ce fait, rendus insensibles tant à la douleur qu’à la vision de celle-ci…
    Même les criminels les plus sadiques, ceux dont on retrouve les têtes fichées au bout de piques plantées aux grands carrefours, assorties d’un écriteau où figure la raison stupéfiante pour laquelle ils ont été condamnés à mort : le… à l’heure du cri du coq, a mutilé un vieillard avant de le poignarder en plein cœur; …a coupé les pieds d’un marchand avant de s’enfuir avec la caisse; …a émasculé un juge qui ne lui avait pas donné satisfaction ; … a saigné un marchand de soie pour s’emparer de son stock…, ne supportent pas la vue de la mort par découpage lent.
    Aussi, à part les opiomanes, les gens qui stationneront, ce jour-là, devant l’homme ensanglanté ne pourront pas y rester très longtemps. Au bout de quelques minutes, ils repartiront d’un pas lourd et les épaules basses, en souhaitant de toutes leurs forces ne jamais se retrouver à la place du malheureux - on ne sait jamais. La justice est si obscure, et les gens illettrés si démunis face à l’aveuglement des juges   !
    Parmi la populace pétrifiée d’horreur comme une forêt de statues de sel se tient un enfant qui, lui, ne lâche pas la victime du regard.
    Il a tenu à être là, mais ne sait pas encore ce qui l’attend ni ce qui attend la victime.
    Car la victime est son père, auquel il est venu dire un dernier adieu.
    S’il cessait de le regarder, il aurait l’impression de l’abandonner à son triste sort.
    Et ça, il ne le veut à aucun prix, même si, le pauvre, il est à mille lieues de se douter qu’il aurait mieux valu, pour sa sérénité, ne pas savoir ce qui était arrivé à son père…
    Tout de suite, l’enfant se met à haleter comme un jeune chien qui a trop couru lorsque le bourreau entame avec délicatesse, de la pointe de son couteau effilé comme un rasoir, la peau à la jointure du cou et des épaules du condamné.
    S’il était libre de le faire, l’enfant hurlerait son dégoût, maudirait le bourreau et ceux qui lui ont envoyé son père. Mais, malgré son jeune âge, il est conscient qu’il ne peut pas. Cela attirerait l’attention des trois gardes qui encadrent le supplicié. Tous ceux qui s’aventureraient trop près de lui seraient impitoyablement écartés : le bourreau a besoin de silence pour bien se concentrer afin de ne pas tuer trop vite sa victime, par exemple en lui sectionnant par erreur l’aorte ou la carotide, déclenchant une hémorragie salvatrice. S’il en était ainsi, le bourreau serait d’ailleurs amené à rendre des comptes devant les autorités judiciaires dont il dépend.
    C’est la règle intangible du supplice mandchou : il est fait pour durer. Il convient d’éplucher comme un fruit le corps de la victime. D’abord la peau, puis les petits morceaux de viande, jusqu’aux quartiers de muscles, en évitant soigneusement les gros vaisseaux vitaux, en coupant toujours les tendons et les
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